30/05/22

Le Congo invité à renforcer le respect des droits des peuples autochtones

Peuples autochtones Congo
Une famille Baka, peuple autochtone que l'on trouve dans le nord du Congo-Brazzaville. Crédit image: Survival International

Lecture rapide

  • Des textes encadrent le respect des droits des peuples autochtones ; mais leur application laisse à désirer
  • Le Congo invité à améliorer la participation des populations autochtones dans les projets de développement
  • Si les droits des peuples autochtones ne sont pas respectés, on n’arrivera pas au développement durable

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[BRAZZAVILLE] « Nous avons la loi sur les peuples autochtones, mais l’implication et la participation de cette couche de la population sur le terrain dans certains projets et programmes, ne sont pas au niveau souhaité ».

Arsène Guelélé, président exécutif d’Actions pour l’environnement et la solidarité internationale (AESI), s’exprimait ainsi ce 24 mai 2022 à Brazzaville au Congo à l’occasion du 13e forum sur la gouvernance forestière auquel j’ai eu le plaisir de participer.

« Les populations autochtones connaissent la forêt, le secret de la forêt et aujourd’hui, ne pas prendre en considération certaines de leurs connaissances est un risque », analyse cet acteur de la société civile.

« Nous attendons des gouvernants congolais la volonté de rendre effective cette implication des peuples autochtones dans la gouvernance forestière », conclut Arsène Guelélé.

“Si les droits humains ne sont pas respectés dans un pays, quel que soit ce qu’on peut faire, on n’arrivera pas au développement durable”

Justin Assomoyi, ministère de la Justice, Congo

Au ministère de la Justice du Congo, on abonde dans le même sens. « Si les droits humains ne sont pas respectés dans un pays, quel que soit ce qu’on peut faire, on n’arrivera pas au développement durable », renchérit Justin Assomoyi, directeur général de la promotion des peuples autochtones dans ce ministère.

Dans la suite de ses propos, j’ai retenu qu’il y a quelques années, la prise en compte des communautés locales et des peuples autochtones dans la gouvernance forestière en République du Congo était « une vue de l’esprit ».

Mais de nouvelles règles contenues dans de nombreux textes nationaux dont la loi N°33-2020 de juillet 2020 portant code forestier, fixent les procédures de consultation et de participation des peuples autochtones aux projets et programmes de développement socio-économique.En outre, « nous avons élaboré une notion nationale qui fait la promotion et la protection des peuples autochtones par une loi. Cette loi, depuis 2019, a son décret d’application », indique Justin Assomoyi.

Joël Loumeto, professeur à l’université Marien Ngouabi de Brazzaville, rappelle pour sa part que le Congo participe et mène le processus de l’Accord de partenariat volontaire (APV-FLEGT) qui encourage la bonne gouvernance forestière ; et les populations autochtones sont impliquées et prises en compte dans les consultations.

Le forum a également rappelé que le pays et ses partenaires au développement sont tenus de respecter et veiller au respect de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones qui stipule en son article 18 que « les peuples autochtones ont le droit de participer à la prise de décisions sur des questions qui peuvent concerner leurs droits… ».

Difficultés

Seulement, « il n’est pas toujours évident d’écouter la voix des communautés, en raison parfois de la multitude de voix », relève Christ Herbert, responsable du programme de politique forestière internationale et des initiatives internationales en matière de gouvernance forestière à la GIZ, l’agence de coopération internationale allemande pour le développement.

S’adressant à SciDev.Net, ce dernier indique que les difficultés tiennent le plus souvent au fait que les communautés parlent différentes langues et il ne leur est pas évident de participer aux échanges avec les autorités et les partenaires au développement.

« Il faut se souvenir que les populations autochtones et les communautés locales au niveau du Congo sont de plus en plus organisées en associations qui sont toutes réunies autour de réseaux nationaux et sous-régionaux », réagit Joël Loumeto

D’après ses explications, cela leur donne la possibilité d’être sollicités, d’être consultés, d’être impliqués dans pas mal des processus concernant l’exploitation forestière ou la gouvernance forestière.

Joël Loumeto illustre son propos avec l’exemple du déroulement du processus REDD+ sur la réduction des émissions dues à la déforestation et à la dégradation forestière. « Une plateforme était formée et les populations autochtones étaient représentées dans ce processus », dit-il.Comme Arsène Guelélé, Jean Nganga de l’Association de défense et de promotion des droits des populations autochtones, émet des réserves. « Je nuancerais mon avis sur l’effectivité de l’implication des peuples autochtones dans la gouvernance forestière », dit-il d’entrée.

« Je crois que c’est à nous de faire avancer les choses à travers de nouveaux mécanismes pour que cette l’implication dans la gouvernance forestière des peuples autochtones soit réelle. Sinon, comme d’habitude, nous resterons dans des discours, parce que sur le terrain, les choses ne sont pas encore au niveau que nous voulons et il y a encore beaucoup à faire », recommande ce dernier.

L’universitaire Joël Loumeto l’admet d’ailleurs quand il concède dans un entretien avec SciDev.Net que « le problème actuel, c’est peut-être d’améliorer leurs contributions et améliorer leurs participations dans la mise en œuvre des projets. Mais on ne peut plus penser comme il y a quelques années, qu’on oublie la représentation des populations autochtones ».