13/11/20

Vivre en haute altitude « peut ralentir la croissance des enfants »

Children playing
Crédit image: Image by Rapheal Nathaniel from Pixabay

Lecture rapide

  • En 2019, environ 52 millions d'enfants en Afrique subsaharienne avaient une taille courte pour leur âge
  • Une étude suggère que ceux qui vivaient à des altitudes élevées étaient plus susceptibles d'être petits
  • Les décideurs politiques devraient mettre en œuvre des interventions pour ceux qui vivent en altitude

Envoyer à un ami

Les coordonnées que vous indiquez sur cette page ne seront pas utilisées pour vous envoyer des emails non- sollicités et ne seront pas vendues à un tiers. Voir politique de confidentialité.

[NAIROBI] Les enfants vivant dans les régions de haute altitude sont plus à risque de retard de croissance, ce qui souligne la nécessité de politiques de santé adaptées à la vie dans les régions montagneuses du monde, selon une étude.
 
Selon les estimations du Fonds des Nations Unies pour l'enfance, de l'Organisation mondiale de la santé et de la Banque mondiale, en 2019, environ 52 millions d'enfants de moins de cinq ans souffraient d'un retard de croissance en Afrique subsaharienne.
 
Les chercheurs affirment que le retard de croissance affecte environ 155 millions d'enfants – 23% des enfants – de moins de cinq ans dans le monde et qu’il est associé à un risque accru de mortalité, de déficits cognitifs et de troubles du développement qui les rendent plus vulnérables aux maladies chroniques plus tard dans la vie. 

“Les décideurs et les professionnels de la santé publique devraient accorder plus d’attention aux grossesses et à la croissance des enfants vivant à des altitudes élevées”

Kaleab Baye, université d'Addis-Abeba, Ethiopie

L'étude, publiée dans le Journal de l'American Medical Association le 24 août 2020, offre de nouvelles perspectives sur le lien entre l'altitude et la dénutrition, justifiant ainsi une politique adaptée aux contextes de haute altitude.
 
« L'étude a révélé que les enfants résidant à des altitudes plus élevées étaient, en moyenne, nés plus courts et restaient sur une trajectoire de croissance plus faible que les enfants résidant à des altitudes plus basses », explique à SciDev.Net Kaleab Baye, auteur principal de l'étude et professeur agrégé à l'université d'Addis-Abeba (Ethiopie).
 
L'étude suggère qu'une attention particulière et des conseils en matière de soins de santé sont nécessaires pour gérer les grossesses et le développement de la petite enfance en haute altitude.
 
« Ne pas s'attaquer aux déficits de croissance induits par l'altitude peut conduire une proportion importante de la population mondiale à ne pas atteindre les objectifs de développement durable et les objectifs nutritionnels de l'Assemblée mondiale de la Santé », indique l'étude.
 
Kaleab Baye dit que les enfants résidant dans des « environnements domestiques idéaux » grandissent au même rythme que l'enfant moyen selon la norme de croissance de l'OMS de 2006 , mais que leur croissance change à partir d'environ 500 mètres au-dessus du niveau de la mer.
 
Selon l'étude, un environnement domestique idéal comprend l'accès à l'eau potable et à l'assainissement, des parents possédant un téléviseur ou une voiture, les mères éduquées et les bébés nés à l'hôpital.
 
« Après 500 mètres au-dessus du niveau de la mer, la taille moyenne des enfants en rapport avec son âge s'est considérablement écartée de la courbe de croissance de l'enfant médian dans la population de référence de l'OMS en 2006 », explique-t-il.
 
Kaleab Baye affirme que l'étude a identifié les semaines situées immédiatement avant et après la naissance comme la période la plus vulnérable pour les enfants vivant en altitude, car les grossesses sont compliquées par un apport chronique d'oxygène loin d’être optimal, ce qui expose le fœtus à un risque de croissance limitée.
 
A en croire le chercheur, les causes du retard de croissance en Éthiopie et dans toute l'Afrique subsaharienne comprennent une mauvaise alimentation, de mauvaises qualités de l'eau, de l'assainissement et d'hygiène, la pauvreté, l'insécurité alimentaire et des services de santé et de soins inadéquats.
 
Les chercheurs ont analysé 133 enquêtes démographiques et sanitaires nationales de 59 pays à revenu faible ou intermédiaire, menées entre 1992 et 2018. Cela représentait près d'un million de mesures de taille chez 96 552 enfants à des altitudes allant de 372 mètres en dessous du niveau de la mer à près de 6000 mètres au-dessus.
 
Kaleab Baye confie à SciDev.Net qu'environ 288 millions de personnes en Afrique vivent à des altitudes supérieures à 1500 mètres au-dessus du niveau de la mer.
 
« En Afrique subsaharienne, l'Éthiopie, le Kenya, l'Afrique du Sud, la Tanzanie et l'Ouganda sont parmi les pays qui comptent le plus grand nombre de leur population vivant au-dessus de 1 500 mètres au-dessus du niveau de la mer », dit-il.
  
« Les décideurs et les professionnels de la santé publique devraient accorder plus d’attention aux grossesses et à la croissance des enfants vivant à des altitudes élevées », recommande le chercheur.
 
Mercy Lung'aho, spécialiste de la nutrition auprès de l'Alliance of Bioversity International et du Centre international pour l'agriculture tropicale, affirme que le retard de croissance a un impact négatif sur le développement cognitif, qui affecte plus tard le potentiel de revenu des adultes et l'économie.
 
« Par exemple, le coût de la malnutrition en Éthiopie équivaut à 16,1% du produit intérieur brut du pays », dit-elle.
 
Les actions pour la nutrition, la santé et d'autres secteurs, tels que l'agriculture, la protection sociale et l'éducation, doivent travailler ensemble pour lutter contre la malnutrition en Afrique, ajoute Mercy Lung'aho.
 
Les résultats de l'étude, explique-t-elle, soulignent la nécessité d'améliorer le ciblage des programmes de santé et de nutrition infantiles, en tenant compte des vulnérabilités spécifiques des populations et en s'attaquant aux inégalités en matière de santé infantile dans tous les contextes, en particulier lorsque l'altitude est une considération.
 
Cet article a été produit par le bureau anglophone de SciDev.Net pour l'Afrique subsaharienne.

Références

Kaleab Baye and others Evaluation of linear growth at higher altitudes (Journal of the American Medical Association, August 24, 2020)