24/11/22

Renforcer la pratique de l’allaitement maternel au Burkina Faso

woman-gb8a3c11ab_1280
Les mamans sont encouragées à allaiter leurs bébés jusqu'à l'âge de 24 mois. Crédit image: Valéria Rodrigues Valéria de Pixabay

Lecture rapide

  • Dans la région des Cascades par exemple, presque 66% des mères allaitent leurs bébés jusqu’à 23 mois.
  • Le lait maternel offre tout ce dont l’enfant a besoin jusqu’à 6 mois et renforce l’affection mère-enfant
  • Sensibilisation, encouragements des mères et levée des barrières aux bonnes pratiques sont recommandés

Envoyer à un ami

Les coordonnées que vous indiquez sur cette page ne seront pas utilisées pour vous envoyer des emails non- sollicités et ne seront pas vendues à un tiers. Voir politique de confidentialité.

[OUAGADOUGOU] Une étude sur l’évaluation des pratiques d’allaitement chez les mères d’enfants de moins de 24 mois réalisée de mai à avril 2016 dans la région des Cascades au Burkina Faso a montré que 71% des mères pratiquent la mise au sein dans l’heure qui suit la naissance de l’enfant.

Cette étude dont les travaux ont été publiés récemment dans la revue « Médecine d’Afrique noire », a concerné 255 mères ayant des enfants d’âge compris entre 0 et 23 mois.

Elle révèle aussi que 79,6% des enfants de moins de 6 mois sont exclusivement allaités au sein. Mais, seulement 65,7% des mères poursuivent l’allaitement maternel jusqu’à 23 mois.

“Plus les mères pratiquent l’allaitement exclusif, plus les avantages en termes de santé s’améliorent chez l’enfant et chez sa mère. Parmi ces avantages, il y a la relation proche et affectueuse entre la mère et le bébé”

Alain Hien, IRSS, Bobo-Dioulasso

A en croire Alain Hien*, chercheur à l’Institut de recherches en science de la santé (IRSS) de Bobo-Dioulasso et auteur principal de l’étude, ce travail a montré que l’âge des mères (moins de 30 ans), leur lieu de résidence et la situation matrimoniale étaient des facteurs déterminants dans les bonnes pratiques d’allaitement.

« Les résultats montrent que les femmes qui vivent en couple pratiquent mieux l’allaitement exclusif que les mères célibataires », dit-il.

L’étude conclut aussi que les femmes vivant en couple pratiquent plus l’allaitement exclusif que les mères célibataires ; et que les mères d’enfants du district sanitaire de Magodara pratiquent plus l’allaitement maternel que les mères venant des autres districts sanitaires de la région des Cascades.

« Plus les mères pratiquent l’allaitement exclusif, plus les avantages en termes de santé s’améliorent chez l’enfant et chez sa mère. Parmi ces avantages, il y a la relation proche et affectueuse entre la mère et le bébé, une satisfaction émotionnelle de la mère, une réduction de l’incidence des allergies chez les enfants », indique Alain Hien.

Ousmane Ouédraogo, enseignant-chercheur à l’université Joseph Ki-Zerbo de Ouagadougou, ajoute que le lait maternel contient tous les éléments nutritifs et protecteurs (protéines, matières grasses, lactose, eau, sels minéraux, vitamines, immunoglobulines et des leucocytes) dont le bébé a besoin pendant les 6 premiers mois de son existence

Au passage, ce dernier trouve que cette étude confirme que l’environnement dans lequel vivent les mères est très important pour la pratique de l’allaitement.

Ousmane Ouédraogo souligne en outre que les messages diffusés à travers plusieurs canaux ainsi que les sensibilisations des agents de santé dans les structures sanitaires influencent également les pratiques d’allaitement.

Besoins énergétiques

Quant à Ali Bagué, nutritionniste à la direction de la nutrition au ministère de la Santé, il conseille aux mères d’allaiter leurs enfants avec le lait maternel jusqu’à deux ans ; car, à lui seul, ce lait couvre l’essentiel des besoins énergétiques du bébé.

« Si on arrête d’allaiter le bébé trop tôt, l’enfant peut tomber dans la malnutrition du moment que les aliments de complément qui ne sont pas diversifiés et riches ne pourront pas couvrir tous les besoins énergétiques et en d’autres nutriments », explique cette source dans un entretien avec SciDev.Net.

Alain Hien rappelle qu’en 2013, les résultats des enquêtes nutritionnelles nationales menées par la direction de la nutrition du ministère de la Santé avaient montré une forte prévalence de la malnutrition chronique ou du retard de croissance de 40,9% dans la région des Cascades.

Parmi, les causes de cette malnutrition, il cite notamment l’apport alimentaire insuffisant chez les enfants de moins de 24 mois et l’insécurité alimentaire des ménages. Or, explique-t-il, la région des Cascades est l’une des plus arrosées du pays avec une disponibilité alimentaire « satisfaisante ».

Le Burkina Faso a adhéré en 2011 au Mouvement appelé SUN (Scaling Up Nutrition -Améliorer la nutrition) pour réduire le taux de malnutrition chronique et augmenter le taux de pratique d’allaitement maternel chez les enfants âgés de moins de 6 mois de 38% en 2012 à au moins 80% en 2025.

« L’intérêt de cette étude était d’identifier les facteurs de risque afin de mieux orienter les interventions communautaires dans la promotion des pratiques optimales d’alimentation du nourrisson et du jeune enfant pour l’atteinte des 80% d’ici à 2025 », explique Alain Hien.

Au terme de ses investigations, l’équipe que conduit le chercheur recommande la nécessité d’encourager les mères à poursuivre l’allaitement maternel jusqu’à l’âge de 2 ans.

Ousmane Ouédraogo, par ailleurs président de la Société de nutrition du Burkina (SNB), pense que les acteurs de la nutrition devront fournir plus d’efforts pour améliorer les indicateurs d’allaitement dans cette région, même si le niveau atteint « est déjà bon ».

« C’est vrai que certaines mères ont une alimentation qui est pauvre mais cela n’influence pas beaucoup la quantité de production du lait. De plus, il faut savoir utiliser le peu d’aliments qu’on a à la maison pour bien se nourrir en appliquant les conseils fournis par les nutritionnistes et les agents de santé », affirme-t-il.Ali Bagué, pour sa part, soutient qu’au ministère de la Santé, via la direction de la nutrition, des actions sont menées pour encourager les mères à allaiter les bébés jusqu’à l’âge de 2 ans.

Ces actions sont, entre autres, des conseils nutritionnels pour une bonne alimentation de la femme enceinte, la levée des barrières aux bonnes pratiques d’allaitement au sein de la communauté, etc.

Mais, par-dessus tout, Ali Bagué, conseille aux mères de faire confiance aux conseils nutritionnels des agents de santé, de ne pas céder à la pression sociale et de ne pas se laisser influencer par les préjugés sur la pratique de l’allaitement maternel.

* Cet article a fait l’objet d’une mise à jour le 25 novembre 2022 à 11:39 GMT pour corriger le nom de l’auteur principal de cette étude qui est bien Alain Hien et non Aristide Hien comme nous l’avions précédemment écrit. Nous présentons nos sincères excuses à l’intéressé et à nos lecteurs.