11/04/22

Burkina Faso : Mieux gérer son cycle menstruel grâce au téléphone

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Un utilisateur de l'application « Paga, moi femme ». Crédit image: SDN / AAN

Lecture rapide

  • L’application permet d’avoir des informations sur la date des règles et la période d’ovulation
  • Elle comporte des avantages pour celles qui ont un cycle irrégulier
  • L’espace de discussions permet aux utilisatrices d’échanger avec des médecins sur des questions de santé

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[OUAGADOUGOU] « Paga, moi femme », c’est le nom d’une application conçue par Kassoum Yamba, docteur en physique nucléaire et chercheur à l’Institut de recherches en sciences appliquées et technologies de Ouagadougou au Burkina Faso.

Il s’agit d’une application qui permet aux filles et aux femmes de mieux gérer leur cycle menstruel. Notamment d’avoir des informations sur la date de leurs prochaines règles, la période d’ovulation et de mieux connaitre leur corps à travers le syndrome prémenstruel.

Pour avoir toutes ces informations, l’utilisatrice doit préciser les deux dernières dates des menstrues. Ensuite, l’application évalue elle-même, la durée du cycle.

“Le sujet des menstrues demeure un tabou dans nos sociétés, au point que le besoin de s’informer est présent. Cette application est une opportunité pour des filles et des femmes d’avoir l’information juste et dans la discrétion”

Rasmata Ouedraogo, ministère de l’Education nationale

Chaque mois, au fur et à mesure que les règles viennent, l’utilisatrice introduit les nouvelles dates et l’application fait des calculs statistiques pour indiquer la date des menstrues.

« Même si les dates varient, on pourra trouver une moyenne. Cela est très avantageux pour les femmes qui ont un cycle irrégulier. Il n’y a pas une méthode aussi fiable que cela pour les femmes qui ont un cycle irrégulier », explique Kassoum Yamba.

L’outil permet également aux utilisatrices de faire une projection sur six mois, pour voir comment les règles vont se comporter durant cette période.« Chaque fois que vous mettez une nouvelle date, l’application refait une simulation des six prochains mois et ça permet de faire un bon programme pour des femmes et à long terme », précise le concepteur de « Paga, moi femme ».

En ce qui concerne la confidentialité des données, Kassoum Yamba précise que les utilisatrices peuvent sécuriser leurs informations lorsqu’elles créent leur compte.

D’après ses explications, leurs données sont stockées directement et uniquement sur leur téléphone et le service en charge de la gestion de l’application n’a pas accès à ces données, rassure-t-il.

Briser les tabous

Au ministère de l’Education nationale, de l’alphabétisation et de la promotion des langues nationales (MENAPLN), l’application est plutôt bien accueillie.

Rasmata Ouedraogo directrice de la Promotion de l’éducation inclusive dans cette institution, soutient que l’amélioration de la gestion de l’hygiène menstruelle des filles contribue à briser les tabous et les stigmatisations dues aux menstrues et à réduire les pratiques discriminatoires qui peuvent conduire à l’exclusion sociale et aux inégalités envers les femmes et les filles.

« Le sujet des menstrues demeure un tabou dans nos sociétés, au point que le besoin de s’informer est présent. « Paga, moi femme » est une opportunité pour des filles et des femmes d’avoir l’information juste et dans la discrétion », déclare-t-elle.

Rasmata Ouedraogo est convaincue que cette technologie peut aider les jeunes élèves à mieux gérer leur cycle menstruel surtout celles qui ont des appareils téléphoniques qui leur offrent la possibilité d’y accéder.Pour Stevie Reine Yaméogo, présidente de l’organisation des jeunes engagés pour la participation citoyenne et le développement durable au Burkina Faso (OJEPC), les femmes rencontrent des difficultés dans la compréhension des changements de leur corps.

Or, poursuit-elle, les menstruations font partie de la vie des femmes et filles et la compréhension des enjeux liés à ce phénomène biologique est un devoir pour chaque femme ou fille en dépit de son niveau d’instruction.

Elle pense que l’application « Paga, moi femme » vient combler ce gap et permettre aux femmes et filles de contrôler, suivre, gérer au mieux leur cycle menstruel qui contribue à un épanouissement individuel de la vie sexuelle de chacune.

Stevie Reine Yaméogo ajoute que cette application favorise également la prévention des grossesses non désirées dans le sens où elle permet aux filles et femmes, à travers les différentes informations fournies, de mieux connaître leur cycle menstruel, leur période de fécondité, d’ovulation…

Consultation à distance

La plateforme, téléchargeable sur Google Play, intègre également un volet « chat » (discussions) où les utilisateurs peuvent échanger sous anonymat avec des médecins bénévoles sur les questions de santé de la reproduction.

« Il suffit de mettre un pseudo pour échanger avec les médecins que nous connaissons puisqu’ils ont des badges », explique Kassoum Yamba

Il ajoute qu’on dénombre actuellement plus de 2 000 membres dans le forum de discussions. Les femmes discutent entre elles, mais également avec les médecins. Elles posent des questions dans l’application, et obtiennent des réponses.

Haoua Belem utilise l’application depuis le mois d’avril 2022 et fait partie des 4 200 utilisatrices de la plateforme, précisément en son volet hygiène et santé menstruelle.

A en croire cette dernière, cet outil lui a offert une autre opportunité de consultations à distance, d’informations et de sensibilisation sur la santé sexuelle et reproductive et la gestion de l’hygiène menstruelle.

Mais surtout « il permet de combler l’insuffisance d’informations sur la gestion hygiénique des menstrues et la santé sexuelle et reproductive », confie-t-elle.

Au regard des défis qui existent autour de ces thématiques principalement les enjeux pour la population jeune, Stevie Reine Yameogo souhaite que cette trouvaille soit vulgarisée parce qu’elle participe efficacement à la résolution des difficultés en matière de santé sexuelle et reproductive.