24/01/24

Madagascar s’engage à préserver sa biodiversité

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Les feux de brousse sont parmi les principaux agents destructueurs de la biodiversité. Crédit image: SDN / R. Razafison

Lecture rapide

  • Madagascar abrite 5 % de la biodiversité mondiale mais 56% des espèces pourraient disparaître d’ici 2080
  • La feuille de route prescrit des techniques de protection de la biodiversité dans toutes les activités
  • Notamment à travers le changement des habitudes dans les pratiques agricoles

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[ANTANANARIVO] A Madagascar, les pratiques agricoles dominées par l’utilisation de feux, le défrichement et les techniques traditionnelles… sont préjudiciables à la riche diversité biologique du pays qui représente près de 5 % de la biodiversité mondiale avec un taux d’endémisme floristique et faunistique d’environ 80 à 90 %.

Telle est la quintessence d’un atelier organisé le 18 décembre à Antananarivo par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) pour restituer les résultats d’un projet portant sur l’intégration de la biodiversité dans les secteurs agricoles à Madagascar.

Ce projet a abouti à la définition de la feuille de route de l’intégration de la biodiversité dans les secteurs agricoles à Madagascar ; feuille de route qui est en cours de finalisation pour une mise en œuvre prévue dès cette année 2024.

“La biodiversité est la source de la nutrition. Pour cultiver, élever, pêcher, faire de l’aquaculture… de manière durable, il faut préserver la biodiversité”

Mbuli Charles Boliko, FAO Madagascar

« La biodiversité est la source de la nutrition. Pour cultiver, élever, pêcher, faire de l’aquaculture… de manière durable, il faut préserver la biodiversité », rappelle Mbuli Charles Boliko, représentant de la FAO à Madagascar.

La cible 14 du Cadre mondial pour la biodiversité de Kunming-Montréal adoptée en décembre 2022 à la COP 15 sur la diversité biologique recommande l’intégration de la biodiversité dans les politiques, réglementations, processus de planification, stratégies de lutte contre la pauvreté, évaluations environnementales stratégiques, évaluations d’impact sur l’environnement et dans tous les secteurs qui ont d’importantes incidences sur la biodiversité.

Outre les événements extrêmes (cyclones, sécheresses, invasion acridienne…), les exploitations minières illégales, les trafics illicites, les feux de brousse, de forêt, de culture et de pâturage qui détruisent une moyenne annuelle de 100 000 ha d’espaces sont les premiers exterminateurs de la biodiversité de l’île.

Selon les organisateurs de cet atelier, pour atteindre les objectifs, il est « indispensable » de changer progressivement les comportements individuels et collectifs vis-à-vis des pratiques agricoles sur l’île en préservant l’environnement tout en assurant l’autosuffisance alimentaire des habitants.

« La mise en œuvre de la feuille de route devrait s’appuyer plus sur le civisme et l’éducation citoyenne en tenant compte de la spécificité malgache », suggère Herintsoa Rabemananjara, responsable de projet à la coopération technique allemande GIZ, lors de l’atelier de restitution des résultats de l’étude.

La feuille de route en question repose sur seize activités prioritaires regroupées dans trois axes d’orientation à savoir la responsabilisation de toutes les parties prenantes, y compris les paysans eux-mêmes, l’alignement des documents clés de politique et de stratégie et l’augmentation substantielle des pratiques respectueuses de la biodiversité.

A cette fin, un accent est mis entre autres sur l’adoption des pratiques d’agroécologie et d’agriculture intelligente face au climat ainsi que sur la mise en œuvre de la pêche et de l’aquaculture durables par les organisations paysannes et le secteur privé.

Les actions à court terme sont planifiées pour être exécutées sur trois ans et celles à moyen terme sur trois à six ans.

Collaboration intersectorielle

Les départements ministériels chargés de l’environnement et du développement durable, de l’agriculture et de l’élevage, sans oublier ceux de chargés de la pêche et de l’économie bleue sont chacun tenus d’élaborer, de faire valider et de faciliter la promulgation des politiques, stratégies et lois relatives à l’intégration de la biodiversité dans leurs secteurs respectifs.

Toutefois, Naly Rakotoarivony, spécialiste du développement territorial chez l’ONG Blue Ventures, a émis une réserve sur la collaboration intersectorielle. “Celle-ci ne va pas de soi. Il y a des secteurs coopératifs et antagonistes. Il convient de mettre ensemble les secteurs coopératifs et séparer les secteurs antagonistes. Le secteur de la biodiversité ne va jamais avec le secteur extractif. Il faut aussi prendre en compte la différence contextuelle de chaque région », a-t-il expliqué.

Pour Yolande Razafindrakoto Leondaris, cheffe de mission de l’assistance technique au Bureau d’appui à la coopération extérieure, soutenu par l’Union européenne, le rôle des femmes est déterminant pour l’effectivité de la mise en œuvre de cette feuille de route.

Cette dernière travaille actuellement pour faire émerger une politique agricole de transition agroécologique en faveur des femmes des zones rurales. Celles-ci ont, d’après elle, besoin de techniques agricoles résilientes pour faire face au changement climatique et aux crises comme la pandémie de COVID-19.

Pour la FAO, la mise en œuvre de cette feuille de route est d’autant plus importante que les foyers de l’insécurité alimentaire dans le monde coïncident quasiment avec ceux de la perte de la biodiversité.

Et d’après l’Indice mondial de la faim de 2023, Madagascar occupe le 124e rang mondial sur 125, faisant ainsi partie des zones les plus menacées avec 56 % des espèces qui risquent de disparaître d’ici 2080.

La création du comité interministériel feux, l’élaboration du plan de contingence feux et l’opérationnalisation du centre de surveillance des feux sont parmi les mesures déjà prises pour faire face à ces fléaux.