26/12/23

Q&R : Fanta Yadang veut prouver que les plantes peuvent soigner l’Alzheimer

Fanta Yadang 3
Sabine Adeline Fanta Yadang dans son laboratoire de l'IMPM à Yaoundé. Crédit image: S. A. Fanta Yadang

Lecture rapide

  • Ses travaux visent à trouver des plantes pour traiter les maladies neurodégénératives comme l’Alzheimer
  • Elle a été récompensée parmi 30 scientifiques d'Afrique subsaharienne pour la qualité de ses recherches
  • Elle encourage les jeunes filles à faire des études scientifiques afin de réaliser leurs rêves

Envoyer à un ami

Les coordonnées que vous indiquez sur cette page ne seront pas utilisées pour vous envoyer des emails non- sollicités et ne seront pas vendues à un tiers. Voir politique de confidentialité.

[YAOUNDE] Sabine Adeline Fanta Yadang, la trentaine, est neuropharmacologiste et titulaire d’un Doctorat/Ph.D. Originaire de la province de l’Extrême-Nord du Cameroun, elle travaille comme chercheure à l’Institut de recherches médicales et d’études des plantes médicinales de Yaoundé (IMPM).

Grâce à ses travaux de recherche sur les maladies neurologiques, elle a été récompensée au mois de novembre dernier du « Prix Jeunes Talents L’Oréal-Unesco pour les femmes et la science », parmi 30 scientifiques d’Afrique subsaharienne pour la « qualité de ses recherches ».

Certaines de ces plantes pourraient être une source prometteuse pour le traitement de la maladie d’Alzheimer”

Sabine Adeline Fanta Yadang, IMPM

Son rêve est de pouvoir mettre au point un traitement des maladies neurodégénératives à base des plantes médicinales.

Dans cet entretien accordé à SciDev.Net, la jeune chercheuse se confie sur ses projets et la nécessité de soutenir l’éducation des jeunes filles et de les encourager à se lancer dans les filières scientifiques.

Vos recherches portent sur les maladies neurologiques et leur traitement par des plantes médicinales. Où en êtes-vous avec vos travaux ?

Mes travaux de recherche ont pour but de trouver des plantes médicinales pour stopper la progression des maladies neurodégénératives. Notamment, je travaille sur la maladie d’Alzheimer qui est une maladie qui a pour symptôme majeur la perte de mémoire.

J’évalue expérimentalement les propriétés antioxydantes et anti-inflammatoires des plantes médicinales en utilisant les rongeurs de laboratoire. Pour mes travaux de thèse, j’ai utilisé la plante « carissa edulis » et pour mon projet actuel, je vais travailler avec le lait de souchet [lait végétal ndlr].

Croyez-vous au traitement de ces maladies notamment l’Alzheimer, dans un futur proche ou lointain, par les plantes ?

Oui bien évidemment. Plusieurs études scientifiques ont déjà prouvé l’efficacité des plantes médicinales. De plus, les plantes regorgent plusieurs principes actifs qui ont de bonnes propriétés antioxydantes, anti-inflammatoires et neuroprotectrices.

Certaines de ces plantes pourraient être une source prometteuse pour le traitement de la maladie d’Alzheimer.

Comment est née cette idée ou cette volonté d’utiliser les plantes pour soigner les maladies neurologiques ?

Déjà depuis toute petite, j’ai rêvé de devenir médecin pour soigner mon entourage. J’ai toujours été fascinée par la science et c’est en master que j’ai été attirée par l’étude du cerveau et des maladies qui peuvent l’attaquer. Depuis longtemps, les hommes se sont soignés par les plantes et même dans mon entourage aussi.

Et vous savez, l’OMS estime que 80% des populations des pays en voie de développement utilisent les plantes médicinales pour se soigner. Donc je me suis demandé pourquoi ne pas regarder de ce côté-là pour trouver une plante médicinale pouvant soigner ou stopper la progression des maladies neurodégénératives comme la maladie d’Alzheimer.

Bien qu’il n’y ait pas de chiffre, la maladie d’Alzheimer reste un problème de santé pour les personnes âgées au Cameroun. Et c’est comme ça que je me suis lancée dans cette recherche depuis mon master.

Vos travaux vous ont valu d’être sélectionnée parmi les 30 meilleures scientifiques africaines. Aux côtés de deux autres jeunes scientifiques camerounaises, vous avez été récompensée du « Prix Jeunes Talents Afrique subsaharienne L’Oréal – UNESCO Pour les Femmes et la Science ». Que représente ce prix pour vous ?

Ce prix est une très belle opportunité. Déjà elle a fait connaitre mes travaux de recherche au niveau national et même international et ça montre que mon travail a une grande portée scientifique. En outre, il me permettra d’avoir des collaborations pour pouvoir continuer mes travaux.

Vous êtes originaire de la province de l’Extrême-Nord du Cameroun où le taux de scolarisation des filles est l’un des plus faibles du pays. Que symbolise dès lors votre parcours scolaire et académique ?

Il est plus qu’évident de soutenir l’éducation de la jeune fille. J’espère vraiment être un modèle pour ces jeunes filles de ma région et du Cameroun. Leur faire comprendre qu’avec un peu de volonté et beaucoup de travail, on peut aller loin. Je les encourage à poursuivre leurs rêves.

Malgré quelques avancées, la présence des femmes et des filles dans le domaine scientifique reste faible, comparativement à celle des hommes. Comment inverser cette tendance ?

Il faut encourager les jeunes filles à aller à l’école car elles sont les actrices du futur. Les encourager à choisir les filières scientifiques car il n’y a pas que les garçons qui peuvent suivre ce cursus.

Aussi faire comprendre aux parents qu’il est important de scolariser la jeune fille. Il faudrait créer des programmes, des opportunités pour les jeunes femmes pour leur faire comprendre qu’elles ont beaucoup à apporter dans le domaine de la science.

Quels sont vos projets ?

Grâce à ce prix, je vais continuer mes travaux de recherche au Nigeria. Aussi, je vais postuler aux bourses postdoctorales afin d’acquérir plus d’expériences pour contribuer à l’avancée de la recherche scientifique au Cameroun et en Afrique.