15/03/21

Comment la COVID-19 a exacerbé les inégalités entre hommes et femmes

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La COVID-19 a eu beaucoup d’impacts sur les toutes couches sociales au Burkina Faso. Crédit image: SDN / Abdel Aziz Nabaloum

Lecture rapide

  • 34,6% des femmes ont été victimes de violences physiques liées à la COVID-19 contre 20ù des hommes
  • La pandémie a affecté négativement les activités de 72% des femmes et de 75% des hommes
  • Le renforcement des capacités et la mise en place de lignes budgétaires spéciales est préconisée

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[OUAGADOUGOU] Renforcer les capacités des services sociaux et des associations de lutte contre les violences basées sur le genre en vue de la prise en charge psycho-sociale des victimes. Telles est l’une des principales recommandations d’une étude réalisée en 2020 et publiée février 2021 sur l’impact de la COVID-19 au Burkina Faso.

Intitulée « Analyse genre des effets de la maladie à coronavirus 2019 (COVID-19) dans les secteurs sociaux économiques au Burkina Faso », l’étude a été réalisée en partenariat avec le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) et le ministère en charge de la Femme et la famille du Burkina Faso.

Elle suggère aussi de doter les fonds contre la COVID-19 de lignes spéciales pour la relance des activités génératrices de revenus des femmes, des filles et des petites et moyennes entreprises touchées par pandémie

“Nous allons proposer des mesures correctives dans un plan d’action opérationnel dont la mise en œuvre va contribuer à résoudre un tant soit peu ces problèmes”

Mathieu Ciowela, PNUD

Selon cette étude, 34,6% des femmes en ont été victimes de violences physiques consécutives à cette pandémie, contre 20,5% des hommes. Quant aux violences sexuelles, jusqu’à 25,4% des femmes et seulement 5,7% des hommes les ont subies.

« Même si certains reconnaissent que le confinement a rassemblé la famille, ceux qui n’avaient pas l’habitude de rester à la maison ont subi cela négativement à travers des violences causées soit par les parents, soit par les conjoints », relate Mariamé Ouattara, consultante en genre et co-auteur de l’étude.

Ainsi, les résultats de l’étude révèlent que près de 56% des femmes et 39,8% des hommes victimes de violences les ont subies de la part de leurs conjoints. Ces violences ont été commises par d’autres membres de la famille chez 17,3% des femmes et 18,2% des hommes. Enfin, chez 10,8% des femmes et 8% des hommes, ces violences venaient des parents.

D’après Mariamé Ouattara, compte tenu du confinement et du ralentissement des activités des acteurs de lutte contre les mutilations génitales féminines, certaines personnes ont profité de l’occasion pour braver l’interdiction.

Sur le plan économique, près de 72% des femmes et 75% des hommes de la population cible ont estimé que la maladie a impacté négativement leurs activités économiques et professionnelles.

Par contre, la COVID-19 a eu un impact positif sur les activités de 1,5% des femmes et de 2,2% des hommes. Mariamé Ouattara confirme que 68,7% des hommes et 63,3 % de femmes ont connu une baisse de leur pouvoir d’achat depuis l’apparition de la COVID-19 en mars 2019 dans le pays.

« Il ressort également de l’analyse des données que ce sont les acteurs du privé formel et informel qui ont connu la plus forte baisse de leur pouvoir d’achat à cause des mesures restrictives prises par le gouvernement. Viennent ensuite les salariés du public et du parapublic », confie cette dernière.Assétou Sawadogo, la secrétaire permanente du conseil national pour la promotion du genre, pense que lorsqu’on parle d’inégalités, on ne peut pas parler de développement. Or, pour elle, la pandémie est venue exacerber les inégalités entre les sexes. « Cette situation a impacté négativement la vie des hommes et femmes », dit-elle.

Illustration avec les membres du Groupement féminin solidaire, une association du secteur N°5 de la ville d’Ouahigouya, située à 200 km de Ouagadougou. Spécialisées dans la fabrication de savons à base de neem, ces femmes ne cessent de dire que la pandémie a eu un impact négatif sur leur projet d’autonomisation économique.

« Nos activités sont désormais au ralenti », regrette Souwado Zoundi, la présidente du groupement. Avec la crise sanitaire, les femmes de l’association peinent à avoir des revenus à cause de la baisse des activités économiques consécutive à la fermeture des frontières et au confinement.

Pour sa part, Sara Traoré, commerçante au grand-marché de Bobo-Dioulasso, la capitale économique du pays, affirme qu’après la fermeture des marchés, elle s’est retrouvée à la maison et contrainte de puiser dans son épargne pour nourrir sa famille. Aujourd’hui, dit-elle, même si elle a repris ses activités, elle peine à satisfaire les besoins alimentaires de sa famille.Partageant les conclusions de l’étude, elle confirme que cette pandémie a replongé de nombreuses femmes dans une situation de pauvreté parce que les investissements sur lesquels elles comptaient pour satisfaire les besoins élémentaires de leurs ménages sont ruinés.

Elle pense dès lors que des mesures d’accompagnement devraient être mises en place pour permettre aux femmes victimes des effets de la COVID-19 de relancer leurs activités.

Pour Mathieu Ciowela, le représentant-résident du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) au Burkina Faso, il est important de savoir ces manifestations de la pandémie sur les couches de la population parce que cela permet de mieux paramétrer la réponse en prenant en compte les besoins spécifiques de chaque cible.

« Nous allons proposer des mesures correctives dans un plan d’action opérationnel dont la mise en œuvre va contribuer à résoudre un tant soit peu ces problèmes », promet-il.

Abondant dans le même sens, l’étude préconise entre autres d’impliquer les femmes aux postes de décision dans les programmes de réponse et d’intervention d’urgence relatifs à cette pandémie afin de garantir une prise en compte adéquate des besoins des femmes et des filles.