23/04/20

Les éleveurs évitent la violence et la sécheresse grâce aux satellites

Space spotlight Nomads 1 - Main
Des éleveurs nomades utilisent des données satellites transmises vers une application sur un portable pour planifier leurs déplacements. Crédit image: SNV Burkina Faso

Lecture rapide

  • Les données satellitaires aident les pasteurs à localiser points d’eau, pâturages et zones à risque
  • Elles fournissent aussi les prévisions météo qui permettent aux agriculteurs de planifier leurs activités
  • Cette innovation a déjà été portée à la connaissance de plus de 65 000 éleveurs et producteurs agricoles.

Envoyer à un ami

Les coordonnées que vous indiquez sur cette page ne seront pas utilisées pour vous envoyer des emails non- sollicités et ne seront pas vendues à un tiers. Voir politique de confidentialité.

[OUAGADOUGOU] Avant que le changement climatique et les conflits ne fassent sentir leurs effets, les éleveurs nomades au Burkina Faso observaient des phénomènes de la nature pour prédire les pluies. Ils envoyaient aussi des éclaireurs à la recherche d’eau et de pâturages. Mais ce mode de vie est de plus en plus menacé.
 
Honoré Zidouemba, qui fournit des conseils aux pasteurs, explique l'étendue du problème :  « Avec les conséquences des changements climatiques, les méthodes traditionnelles sont de moins en moins fiables et l’insécurité au Sahel rend les déplacements des éclaireurs aléatoires, coûteux et risqués. » 

Permettre aux éleveurs de s’informer en temps réel sur les paramètres écologiques en lien avec les productions animales est une véritable révolution

Moumouni Ouédraogo, PRAPS

Grâce aux informations satellitaires transmises par une application pour téléphone portable, les éleveurs peuvent anticiper leurs mouvements, économiser du temps et de l’argent et, par conséquent, améliorer la productivité de leur élevage, souligne Honoré Zidouemba coordinateur du projet d’amélioration de la Mobilité du bétail et des revenus des agropasteurs par l’utilisation de la téléphonie mobile et l’imagerie satellitaire (MODHEM) à SNV Burkina.
 
Marc Tamini est un producteur agricole à Ouarkoye, une localité située à 294 km de Ouagadougou, la capitale burkinabé. Depuis qu'il a commencé à se servir de cette application appelée Garbal, il ne se tourne plus les méninges pour savoir s’il va pleuvoir ou pas. Il ne sème plus non plus sans savoir si c’est la période idéale ou pas.
 
« J’ai utilisé la plateforme Garbal pour la première fois lorsque je voulais m’assurer si à partir de la fin du mois de juillet dernier, je pouvais encore semer du coton », affirme Marc Tamini. Il avait alors obtenu des informations relatives à l’extension des pluies dans le temps et surtout au temps nécessaire au cotonnier pour arriver à maturité.
 

Les satellites montrent la voie à suivre

Concrètement, Garbal recueille les données et images satellitaires et les analyse pour générer des informations qui sont mises à la disposition des éleveurs, y compris les pasteurs qui pratiquent la transhumance, qui consiste à déplacer le bétail d'un lieu à l'autre selon les saisons.
 
Ces informations comprennent l'identification et l'analyse des pâturages, la localisation des infrastructures pastorales utiles pour les éleveurs (parcs de vaccination, marchés à bétail, postes vétérinaires…), les points d'eau, la pluviométrie, les poches de sécheresses, etc.
 
Le service est disponible pour les abonnés de l’opérateur téléphonique Orange Burkina Faso qui peuvent accéder au centre d’appel ou recevoir des messages-textes en français ou dans la langue locale de leur choix. Le coût de l’appel étant de 30 FCFA (0,051 dollars) la minute.
 
Le projet MODHEM qui a donné naissance à cette application réunit plusieurs institutions, à savoir le ministère des Ressources animales et halieutiques, l’Organisation néerlandaise de développement (SNV), Orange Burkina Faso, le centre Aghrymet pour ses stations météorologiques et Satelligence pour les images satellitaires.

Nomads and satellites
Plus de 65,000 éleveurs au Burkina Faso utilisent ce service de données mobiles.
SNV Burkina Faso

Hamado Ouédraogo, directeur général des espaces et aménagements pastoraux au ministère des Ressources animales et halieutiques du Burkina se félicite de la capacité de l'application à fournir des données qui sont à jour. « Les agriculteurs, éleveurs et agro-pasteurs ont besoin d’informations fiables pour leurs activités et un travail est fait en amont pour actualiser régulièrement les données techniques et de terrain à envoyer sur la plateforme afin d’éviter la transmission de vieilles information aux utilisateurs », dit-il.
 
Pour lui, la priorité est maintenant d'élargir l'accès à ces informations : « Dans toutes les familles, on dispose de téléphone et le challenge est de faire en sorte que les éleveurs puissent savoir l’existence de cette plateforme. Les agriculteurs et éleveurs démontrent leur intérêt pour le service. »
 

Eviter les zones de conflits

Moussa Diallo, éleveur à Fada N’Gourma, dans l’est du Burkina, est un utilisateur assidu de Garbal. Il confie à SciDev.Net que ce système l’aide entre autres à déterminer les itinéraires à emprunter pour éviter les zones de conflits.
 
« Il n’y a pas un service numérique plus proche de nous que ce système. Nous sommes vraiment satisfaits. Car, les données que nous recevons sont généralement concordantes », se réjouit-il.
 
Jérôme Thiombiano, membre du Réseau de communication sur le pastoralisme (RECOPA) de la région de l’est, souligne que les données satellitaire de Garbal ont permis aux membres du réseau, qui sont plus de mille, « d’avoir à manger et à boire sans conflit pour leur bétail tout en choisissant les meilleures destinations pour la transhumance ».
 
D’après les statistiques du programme, plus de 65 000 éleveurs et agropasteurs ont déjà été sensibilisés par les organisations professionnelles agricoles et pastorales sur l’utilisation du programme, et 43 000 appels ont déjà été enregistrés.
 
A en croire Honoré Zidouemba, 91 % de ces appelants estiment être très satisfaits de la qualité des informations fournies par le service Garbal.
 
Moumouni Ouédraogo, assistant technique au Projet régional d’appui au pastoralisme au Sahel (PRAPS) souligne que cette technologie va transformer la vie des agriculteurs : « Permettre aux éleveurs de s’informer en temps réel sur les paramètres écologiques en lien avec les productions animales est une véritable révolution. »