25/12/17

Q&R: Renforcer la gouvernance des officines

WHO FD
Crédit image: Keng Po Leung

Lecture rapide

  • Un mécanisme assure la surveillance et apporte une assistance aux États membres
  • Pour cela 550 agents de réglementation opèrent dans 141 pays à travers le monde
  • Aucune organisation ne viendra seule à bout du problème

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L'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) est à l'avant-garde de la lutte contre la prolifération des médicaments falsifiés, à travers une cellule spécialement dédiée à la question.
 
Michael Deats est le directeur du projet pour le contrôle qualité et la sécurité des médicaments auprès de l'OMS. Dans cet entretien avec SciDev.Net, il énumère les grandes lignes de l'action de l'organisation, en matière de lutte contre les médicaments de qualité inférieure, ainsi que les protocoles en vigueur.
 
Quels sont les principaux risques associés aux médicaments falsifiés en Afrique ?
 
Les médicaments falsifiés nuisent à la santé des patients, sapent la confiance dans les médicaments, les personnels de santé et les systèmes de santé, contribuent à la résistance aux antimicrobiens et sapent les campagnes de vaccination. Ils encouragent le gaspillage de ressources précieuses, en particulier dans les pays les plus vulnérables.
 
Quelle est l'ampleur du phénomène en Afrique ?
 
L'OMS vient de publier les premières estimations depuis près de dix ans. La plupart des rapports proviennent de la région Afrique. Les produits les plus fréquemment rapportés sont les antipaludéens et les antibiotiques, suivis des contraceptifs d'urgence.
 

“Souvent, il n'y a aucun registre des points de vente de médicaments dans les pays à faible revenu. Les systèmes plus développés ont des enregistrements stricts des établissements de santé, des grossistes, des détaillants, des pharmacies, etc. ”

Michael Deats

Quels sont les principaux centres de distribution, les principaux pays concernés ?
 
Aucun pays n'est à l'abri de ce problème, dans une certaine mesure. La question des médicaments falsifiés est complexe. Les composants proviennent de plusieurs régions du monde. De fait, des sites de fabrication illégaux ont été signalés dans toutes les régions de l'OMS.
 
Quels sont les principaux facteurs qui déterminent le marché ?
 
La demande. Il y a un manque d'accès (accessibilité, disponibilité et acceptabilité) qui peut être un déterminant principal, mais pas le seul. Tous les produits médicaux, les vaccins, les diagnostics in vitro sont signalés, certains issus de l'innovation, certains génériques, d'autres chers et d'autres moins chers.
 
Que fait l'OMS pour aider à combattre les médicaments contrefaits ?
 
Deux choses : le mécanisme des États membres sur les produits médicaux de qualité inférieure a été établi par l'Assemblée mondiale de la santé en 2012. Cet organisme unique a évolué et s'est transformé en une institution qui assure la surveillance, offre des conseils techniques et une assistance aux États membres. Il aide les États membres à coordonner la prévention, la détection et la réponse aux produits médicaux de qualité inférieure.
 
La deuxième chose, c'est le système mondial de surveillance des produits médicaux de qualité inférieure. Il s'agit d'un système mondial de signalement soutenu par des points focaux formés au sein des agences nationales de réglementation des médicaments. Les régulateurs peuvent rechercher des produits médicaux de qualité inférieure dans la base de données sécurisée, accéder à des photothèques et signaler des cas. 141 pays sont actuellement formés, avec plus de 550 personnels de réglementation. Dix-huit des plus grandes agences d'approvisionnement ont été sensibilisées au système et à la question.
 
Le système a reçu des rapports sur plus de 1.500 produits médicaux concernant plus de 100 pays dans toutes les régions. Nous fournissons un support technique en cas d'urgence. La base de données identifie les médicaments les plus à risque, les faiblesses des chaînes d'approvisionnement et les vulnérabilités des systèmes de santé qui soutiennent la politique fondée sur des données probantes et l'investissement dirigé, ainsi que le renforcement des capacités.
 
Notre enquête a montré qu'au Cameroun, par exemple, certaines pharmacies s'approvisionnent sur le marché noir. Comment mettre fin à ce genre de pratiques ?
 
Les hôpitaux, les pharmacies, les cliniques et les centres de santé doivent s'assurer que leurs produits sont livrés par des fournisseurs avec une bonne réputation. Le manque de diligence raisonnable est le moyen le plus courant de faire pénétrer les produits sous normes dans la chaîne d'approvisionnement légale et d'atteindre les patients.
 
Existe-t-il des mécanismes contraignants pour forcer les États membres de l'OMS à assurer un contrôle renforcé ?
 
L'équipe de renforcement de la réglementation a inclus des indicateurs spécifiques dans ses programmes d'évaluation réglementaire liés aux produits médicaux de qualité inférieure. Répondre à ce problème dans les fonctions de régulation de base est essentiel. En outre, nous organisons des ateliers régionaux et nationaux impliquant toutes les parties prenantes – par exemple, les travailleurs du secteur de la santé, la société civile, la police, les douanes, les juges, les procureurs, les fabricants, les importateurs, les grossistes et les détaillants, pour promouvoir leur engagement. Aucune organisation ne viendra seule à bout de ce problème.
 
Les produits de qualité inférieure sont rappelés par les fabricants dans les pays du Nord. Pourquoi est-il si difficile, sinon impossible, de faire de même dans les pays du Sud ?
 
Souvent, il n'y a aucun registre des points de vente de médicaments dans les pays à faible revenu. Les systèmes plus développés ont des enregistrements stricts des établissements de santé, des grossistes, des détaillants, des pharmacies, etc. Les systèmes sont généralement beaucoup plus informels dans les pays à faible revenu.
 
Comment expliquez-vous que le système perdure ?
 
Il y a de l'argent à faire. La demande est là pour être satisfaite. Les systèmes sont faibles dans certains pays. Des personnes sans scrupules exploiteront toujours la situation.
 
Quels sont, à votre avis, les facteurs qui contribuent à l'aggravation du problème ?
 
Où la mauvaise gouvernance et la faible capacité technique prévalent, les produits médicaux de qualité inférieure proliféreront.

Cet article fait partie du dossier de SciDev.Net Afrique sur les médicaments contrefaits en Afrique.