06/05/09

Les pays pauvres n’ont pas les moyens de diagnostiquer la grippe porcine

La méthode PCR permet de détecter le virus de la grippe A (H1N1) Crédit image: Epicatt

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Si l’on en croit un expert en santé publique spécialisé dans la préparation aux pandémies,
Un certain nombre de pays en développement ont des "capacités extrêmement limitées" de diagnostiquer des maladies telles que la grippe porcine et il est probable que cette situation n’évoluera pas au cours des décennies à venir.

Des investissements considérables ont été faits dans les pays en développement pour garantir la surveillance de la santé animale et de la santé humaine, affirme Richard Coker, professeur de santé publique à la London School of Hygiene and Tropical Medecine au Royaume-Uni. Mais ces pays manquent de ressources et sont confrontés à des problèmes logistiques.

"C’est pourquoi il peut s’avérer difficile de diagnostiquer de nouvelles maladies infectieuses," a-t-il affirmé au reporter de SciDev.Net. "Et les maladies existantes qui présentent un risque de pandémie pourraient ne pas être identifiées en temps et en heure pour permettre de lutter contre elles."

Il prédit que cela pourrait prendre "des décennies, voire ne jamais" permettre à tous les pays de se doter des capacités de diagnostic, au moment même où les bailleurs de fonds réduisent leur soutien à cause de la crise financière mondiale.

Ces observations interviennent alors que l’OMS envoie le kit de diagnostic de la grippe porcine, officiellement appelée grippe A (H1N1), à ses différentes représentations dans le monde.

L’OMS dispose de laboratoires de référence dans les Centres nationaux de la Grippe (CNG) dans plus de 60 pays. Nikki Sambo, médecin au Département Alerte et Réaction en cas d’épidémie et de pandémie de l’OMS, a confié au reporter de SciDev.Net que les centres équipés pour réaliser la technique appelée transcription de réaction en chaîne par polymérase (PCR) recevront dans les prochains jours les réactifs nécessaires pour diagnostiquer la grippe porcine.

Ces réactifs, ou ‘amorces’, sont de petits bouts de matériel génétique qui contribuent à l’identification du virus. Sans elles, les laboratoires ne peuvent pas détecter le virus, selon Shindo. Mais grâce à elles, la méthode RT-PCR devrait confirmer en à peu près deux heures la présence du virus.

Les NIC suivent l’évolution de la grippe saisonnière pour le compte de l’OMS à travers le Réseau mondial de Surveillance de la Grippe. Tous les centres ne sont pas en mesure de réaliser des RT-PCR, mais les centres qui n’en ont pas les capacités ont été mis en liaison avec ceux qui en sont capables afin que les premiers puissent envoyer leurs échantillons à ces derniers, explique Shindo.

De même, des pays entiers qui ne disposent pas de capacités de réalisation des RT-PCR enverront leurs échantillons à d’autres pays pour les analyser grâce au système de courrier de l’OMS.

Enrique Paris, membre du comité consultatif d’experts médicaux mis en place par le Chili dans le cadre de la lutte contre la grippe porcine, estime que l’insuffisance des capacités de diagnostic dans les pays en développement limite la détection de nouveaux cas.

Au Mexique même, le manque d’équipements de RT-PCR pourrait expliquer l’incertitude autour du nombre de cas et de décès causés par le virus. Les autorités ont signalé environ 150 décès, mais seulement 29 ont été confirmés jusqu’à présent comme étant dus à la grippe porcine.

Ce pays n’a reçu 15 machines de RT-PCR que la semaine dernière (30 avril). Jusqu’à cette date, les scientifiques devaient recourir à des tests plus élémentaires qui permettent de distinguer divers sous-types de grippe mais ne permettent pas de diagnostiquer le virus en question, selon Celia Alpuche, Directrice adjointe de l’Institut de Diagnostic épidémiologique et de Référence.

Shindo concède que les préoccupations liées au retard dans le diagnostic sont légitimes et affirme que l’OMS mène une campagne permanente de communication à travers le Réseau mondial de Surveillance de la Grippe de manière à se tenir prêt dans le cas d’une probable propagation du virus H1N1.

Les capacités de diagnostic des pays en développement se sont toutefois renforcées au cours des dernières années, surtout après l’éclatement de l’épidémie du SARS et l’émergence du virus H5N1 de la grippe aviaire.

Certains pays en développement, notamment en Asie, se sont dotés de laboratoires spécialisés dans le domaine du diagnostic de la grippe, indépendamment ou avec l’appui d’organisations telles que les Centres for Disease Control des Etats-Unis ou l’institut Pasteur de France, a expliqué au reporter de SciDev.Net Sandra Mounier-Jack, professeur de politique sanitaire et experte en préparation aux pandémies à la London School of Hygiene and Tropical Medecine.

De plus, l’OMS a mis en place une stratégie de renforcement à long terme des capacités de surveillance et de diagnostic, dans le cadre du Règlement sanitaire international, adopté en 2005, qui impose aux pays d’augmenter leurs capacités à signaler de nouvelles infections. Cette stratégie sera "renforcée" compte tenu de l’urgence actuelle, explique Shindo.

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