20/05/11

Le succès des tests rapides de paludisme fait exploser le recours aux antibiotiques

Plusieurs dispensaires ne disposent pas d'outils pour diagnostiquer les fièvres qui ne sont pas causées par le paludisme Crédit image: Flickr/MikeBlyth

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D’après une étude, l’amélioration du diagnostic du paludisme a eu pour effet imprévu d’accroître l’utilisation à tort des antibiotiques dans une capitale africaine.

Une équipe chargée d’évaluer le déploiement de tests de diagnostique rapide et précis du paludisme à Dar es Salaam, en Tanzanie, a constaté que les prescriptions d’antibiotiques pour soigner certaines fièvres ont augmenté de presqu’un quart, en passant de 49 à 72 pour cent, faisant craindre que ce comportement favorise la résistance aux antibiotiques.

Cette équipe évaluait l’impact des tests de diagnostique rapide du paludisme, qui ont remplacé les diagnostiques au microscope, moins précis, dans trois hôpitaux et dans trois dispensaires de la capitale. Dix-huit mois après le déploiement des tests, les prescriptions de médicaments pour soigner le paludisme sont passées de trois quart à seulement un cinquième des patients.

Ces résultats montrent que les tests ont réussi à réduire les prescriptions à tort de traitements contre le paludisme, lesquels contribuent fortement à accroître la résistance aux médicaments tels que l’artémisinine, ce qui inquiète fortement au niveau international.

Par conséquent, Valérie D’Acremont, premier auteur et responsable scientifique à l’Institut Tropical et de Santé Publique, en Suisse, a déclaré que les cliniciens n’administraient plus de médicaments contre le paludisme mais des antibiotiques à tous les patients ayant de la fièvre mais testés négatif au paludisme.

"Ils procèdent ainsi afin d’éviter de mettre les patients en danger", a-t-elle déclaré à SciDev.Net, "en particulier car il n’existe aucun outil pour diagnostiquer d’autres maladies telles que la typhoïde ou la pneumonie. La hausse de l’utilisation absolue d’antibiotiques est la conséquence mathématique du fait qu’on sache que moins de patients sont atteints du paludisme".

V. D’Acremont a indiqué qu’il existait un risque réel que l’introduction des tests de diagnostique du paludisme conduise à une utilisation accrue des antibiotiques à travers le continent.

"Idéalement, les formations et la mise en œuvre d’instructions cliniques devraient permettre de réduire l’utilisation des antibiotiques de 80 pour cent à 25 pour cent des patients", a-t-elle déclaré en citant une étude ayant été précédemment réalisée par son équipe, également en Tanzanie.

Andreas Heddini, Directeur d’Action on Antibiotic Resistance (ReAct), a indiqué : "Dans l’idéal, il existerait des tests pour diagnostiquer le paludisme ainsi que d’autres infections bactériennes, mais il est peu probable qu’ils soient disponibles au cours des prochaines années. Dans cette attente, la formation peut être fortement améliorée".

"Le principal obstacle est qu’il est difficile, dans les pays ayant des systèmes sanitaires peu performants, d’avoir une approche prudente à l’égard des infections. Il est impossible de demander à quelqu’un de revenir au bout de quelques jours si les symptômes empirent".

Cette équipe, qui incluait des scientifiques du City Medical Office of Health, du ministère de la Santé et des Services sociaux, et de l’Ifakara Health Institute de Tanzanie, a publié ses résultats le mois dernier (29 avril) dans le Malaria Journal.

Lien vers l’article complet publié dans le Malaria Journal (en anglais)