24/11/17

Q&R : L’Afrique doit mener la révolution quantique

Zomahoun article
Thierry Zomahoun, président et directeur général de l'Institut Africain des Sciences Mathématiques (AIMS) Crédit image: Anna Valmero

Lecture rapide

  • L'Afrique est en position idéale pour mener la révolution quantique
  • Il existe une volonté politique d'accompagner les percées dans le domaine de la R&D
  • Les premiers résultats devraient se faire sentir en trois générations

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Thierry Zomahoun est président et directeur général de l'Institut Africain des Sciences Mathématiques (AIMS) et et président-fondateur du Next Einstein Forum (NEF), qui aide à favoriser la collaboration entre jeunes scientifiques africains.
 
Dans le but de rehausser le profil de l'Afrique en matière scientifique, notamment sur la façon dont la science et les mathématiques peuvent permettre de relever les défis du développement, Thierry Zomahoun promeut le programme scientifique du NEF en tant que plate-forme pour connecter la science, la société et la politique.
 
Il croit que l'Afrique est en bonne position pour mener la révolution technologique quantique – qui repose sur l'informatique basée sur la mécanique quantique pour faire progresser le traitement de l'information et les percées technologiques – en exploitant son talent scientifique pour définir des solutions aux problèmes propres à l'Afrique et au monde en développement".
 
Thierry Zomahoun s'est entretenu avec SciDev.Net, en marge de la 10ème Conférence mondiale des journalistes scientifiques (26-30 octobre) à San Francisco, aux États-Unis.
 
Cette interview a été éditée pour plus de clarté et de concision.
 

Quel rôle l'Afrique peut-elle jouer dans la révolution quantique ?

Je crois que l'Afrique jouera un grand rôle. Nous y travaillons et nous voulons permettre au continent de mener cette révolution technologique. Si vous regardez en arrière, nous avons manqué la révolution analogique et numérique. Nous essayons toujours de rattraper la révolution numérique.
 
Nous voulons mener la révolution quantique parce que nous en avons le talent, les jeunes Africains sont là – quand nous prenons l'exemple des populations d'autres parties du monde, on réalise que c'est une population vieillissante et c'est un handicap. [C'est] la deuxième chose qui m'a fait dire que l'Afrique mènera la révolution quantique.
 
La troisième raison qui fait du continent africain un bon candidat pour mener la révolution quantique est liée à la volonté politique. Nos dirigeants sont déterminés à fournir le cadre juridique et politique dont nous avons besoin pour permettre aux chercheurs du monde entier de venir en Afrique.
 

Comment la révolution quantique profitera-t-elle à l'Afrique, quelle différence cela apportera-t-il ?

Le premier domaine qui profitera aux chercheurs africains est la collaboration pour la recherche. Lorsque l'Afrique commencera à investir dans la recherche quantique et le développement technologique, nous attirerons des chercheurs de l'Amérique centrale à l'Europe, en passant par l'Asie. Cela peut aider à renforcer les compétences, renforcer l'infrastructure de recherche et ajouter de la valeur aux efforts des jeunes scientifiques africains.
 
Un autre avantage sera l'augmentation du renforcement global des capacités d'analyse des données [dans la région]. Nous avons d'énormes données sur le continent, générées depuis les années 1960. Elles n'ont pas encore été utilisées. Positionner l'Afrique pour mener la révolution quantique impliquera la formation des gens à l'analyse des données et au traitement des données en temps réel.
 
Le dernier domaine dans lequel le continent peut tirer des avantages est le niveau politique. [La] révolution quantique nécessitera tout un ensemble de règlements et de politiques. Par exemple, le secteur bancaire parle de la confidentialité des données des clients – comment continuer à garder les choses confidentielles à l'ère de la révolution quantique et de l'intelligence artificielle ?
 
Ce changement prendra trois générations, soit 45 ans. Les avantages peuvent être mesurés par les petites industries qui en bénéficieraient. Si vous regardez ce que nous avons réalisé dans les industries que nous avons créées, grâce à la révolution numérique, vous pouvez dire [à quel point la révolution quantique nous sera bénéfique].
 

Quels sont les défis en termes d'utilisation des résultats des percées scientifiques de régions en développement telles que l'Afrique [considérant que 1% de la recherche mondiale vient d'Afrique] ?

 
Vous avez entendu mentionner que la contribution de l'Afrique à la recherche mondiale est inférieure à 1%, mais n'oublions pas qu'il y a une énorme réalité cachée dans ce 1%. Il y a vingt ans, personne ne parlait de recherches en provenance d'Afrique. Nous parlions de scientifiques d'Afrique qui vivent et font de la recherche à l'étranger.
 
Si vous prenez les 12-15 dernières années, le volume de la recherche en Afrique a plus que triplé – c'est quelque chose dont les gens ne parlent pas. Oui, à 1% ce [niveau de contribution] soulève des inquiétudes. Mais quand vous réalisez qu'aucune autre région n'a même triplé sa production de recherche en une seule décennie, cela vous dit quelques choses – d'abord, nous ne cachons pas le défi auquel nous sommes confrontés ; et deuxièmement, si vous voyez la qualité dans ce 1%, il y a eu un changement de paradigme. Si l'Afrique peut maintenir et quadrupler sa production de recherche tous les dix ans, vous pouvez imaginer dans trois, quatre ou cinq décennies à partir de maintenant où nous en serons.