05/11/17

L’IRD invite les chercheurs à sortir des laboratoires

IRD Pleniere
Crédit image: SDN/AKF

Lecture rapide

  • Les chercheurs doivent veiller à ce que leurs travaux aient un impact sur les hommes
  • L'impact de la recherche passe par un partenariat avec toutes les parties prenantes
  • D'où l'importance d'une collaboration accrue entre tous les acteurs du développement

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L'Institut de Recherche pour le Développement (IRD), a organisé ce 2 novembre au Campus International IRD/UCAD de Hann, sur la côte est de Dakar, une matinée des acteurs du développement durable, visant à sensibiliser le public sur les activités de recherche.
 
Anciennement connu sous le nom d'Orstom (Office de Recherche scientifique et technique d'Outre-mer), l'IRD est l'un des centres de recherche les plus importants d'Afrique francophone.
 
Créé en 1947, l'Orstom s'est installé à Dakar en 1949 et a pris le nom d'IRD en 1998.

“Dans les discours ambiants, on parle toujours de l'importance de la recherche. Mais le public ne sait pas toujours sur quels leviers chercheurs et décideurs agissent.”

Amadou Thierno Gaye

Pour illustrer l'impact de son action et, de manière générale, les contraintes de toute activité liée à la recherche scientifique, Laurent Vidal, le représentant de l'IRD au Sénégal, a rappelé les conditions de la mise au point, dans les années 1990, du Plumpy'Nut, une pâte à base d’arachides prête à l’emploi, qui a révolutionné la lutte contre la malnutrition.
 
Conçu en 1997 sur la base d'une collaboration entre André Briend, chercheur à l'IRD et la société Nutriset, ce produit a très vite eu les faveurs de la communauté scientifique, des ONG et des agents de santé.
 
Toutefois, il n'est devenu vraiment populaire sur le marché qu'en 2005, soit huit ans après l'étude de concept.
 
Il aura donc fallu, a expliqué Laurent Vidal, un chercheur, un industriel, mais aussi le soutien d'ONG et de médecins sur le terrain, ainsi que du temps, pour populariser cet "outil", adopté depuis par un certain nombre d'Etats et d'organisations internationales, pour lutter contre la malnutrition.
 

Pour le chercheur, le triptyque R&D, temps et partenariats est indispensable à la réussite de toute entreprise de recherche et justifie pourquoi l'IRD ouvre ses portes à diverses parties prenantes au processus de recherche.
 
Dans une interview à SciDev.Net, Laurent Vidal a par la suite précisé que "l'IRD est un organisme de recherche connu dans les milieux universitaires, mais beaucoup moins du grand public, d'où l'idée d'inviter un certain nombre de personnes actives dans le secteur du développement, pour renforcer la synergie entre la communauté du développement et les chercheurs et par là, l'impact de la recherche sur le bien-être de la population."
 
Les invités à cette matinée des acteurs du développement – universitaires, responsables du ministère sénégalais de l'Enseignement Supérieur, de la Recherche scientifique et de l'Innovation, ONG et autres agences spécialisées du système des Nations unies -, ont tour à tour loué l'opportunité offerte par l'IRD de nouer un dialogue indispensable avec la communauté du développement, ainsi qu'avec les bénéficiaires intermédiaires et finaux de la recherche scientifique : les décideurs, aussi bien que la population.
 
"Le développement consiste à penser l'avenir, à s'y diriger de la façon la plus utile pour tous", a ainsi déclaré Christian Deuwel, directeur de l'hôpital de l'Ordre de Malte, à Dakar, qui traite, entre autres, les personnes atteintes de la lèpre.
 
Pour sa part, Amadou Thierno Gaye, directeur général de la Recherche et de l'Innovation au ministère sénégalais de l'Enseignement supérieur, a souligné l'importance des partenariats dans la valorisation des travaux des quelque 3000 enseignants-chercheurs des universités du Sénégal, afin de promouvoir l'innovation, devenue à la faveur du dernier remaniement ministériel au Sénégal, une nouvelle attribution du ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche.
 
Tout en louant l'initiative de l'IRD, il a cependant regretté que la recherche ne jouisse pas auprès du citoyen ordinaire, de l'aura qu'elle mérite.
 
"Dans les discours ambiants, on parle toujours de l'importance de la recherche", a-t-il expliqué.
 
"Mais le public ne sait pas toujours sur quels leviers chercheurs et décideurs agissent", a-t-il poursuivi, insistant sur le besoin d'impliquer le citoyen lambda, consommateur final des résultats de la recherche.
 
Amadou Thierno Gaye a par ailleurs demandé aux chercheurs présents de profiter du potentiel de recherche existant, pour "impacter davantage le développement."
 
Ce besoin d'impact a conduit Laurent Vidal à insister sur le fait que "l'IRD, un petit peu tardivement par rapport au Cirad [1] ou à l'INRA [2], travaille désormais à analyser comment certaines recherches ont eu une efficacité et pourquoi d'autres, qui avaient un impact potentiel parce que les publications étaient de haut niveau, n'ont pas réussi à influencer les stratégies."
 
Enfin, abordant la question particulière de la relation entre les chercheurs et le secteur privé, Laurent Vidal a insisté sur le souhait de son organisation de voir les résultats de la recherche déboucher, au besoin, sur la création d'entreprises.
 
Mais, a-t-il précisé, à défaut, il est impérieux de nouer un dialogue constructif et mutuellement bénéfique avec le secteur privé.
 
"Ce n'est pas parce qu'on est un organisme public qu'on doit s'interdire de discuter avec le secteur privé", a-t-il fait valoir.
 
"Il ne faut pas avoir d'état d'âme en la matière, à partir du moment où les règles d'éthique et de déontologie sont respectées de part et d'autre."
 
De plus, a-t-il souligné, "si on veut avoir un impact sur le bien-être des jeunes, il faut, à un moment donné, que les populations concernées s'approprient les résultats de la recherche et la meilleure façon d'aller vers l'appropriation de directives politiques – en admettant que le chercheur réussisse à faire passer son message au niveau du politique -, c'est en associant les populations le plus tôt possible dans le processus".