26/06/19

Un pacte mondial contre la pollution de l’air en gestation

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La pollution atmosphérique a des conséquences économiques, environnementales et sanitaires. Crédit image: Alfred T. Palmer. (Public domain image).

Lecture rapide

  • La pollution de l'air cause 7 millions de décès évitables chaque année
  • Les scientifiques ont évalué les données relatives aux impacts sur la santé et l'environnement
  • Le pacte demande des mesures concrètes pour éviter les risques pour la santé humaine

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[SÃO PAULO] Cinq académies nationales des sciences et de la médecine exhortent la communauté internationale à adopter des mesures concrètes pour lutter contre la pollution atmosphérique et prévenir les millions de morts qu'elle cause chaque année.

La déclaration des académies des sciences d'Allemagne, du Brésil et d'Afrique du Sud, ainsi que des académies des sciences et de médecine des États-Unis, a été rendue publique au siège des Nations Unies, à New York et appelle à un pacte mondial pour adopter des politiques et des technologies réduisant la pollution.

« Cet appel est étayé par des preuves scientifiques sans équivoque sur les effets de la pollution de l'air sur la santé », indique la déclaration conjointe.

“L'accord propose la reconnaissance du droit à l'air pur et une articulation plus efficace garantissant le développement de stratégies de contrôle de la pollution atmosphérique contribuant à catalyser les investissements pour la promotion de politiques plus durables.”

Luiz Davidovich, Académie des sciences du Brésil

La pollution de l'air provoque environ 7 millions de décès évitables chaque année, principalement chez les femmes, les personnes âgées, les enfants et les pauvres, selon ONU Environnement, l'autorité mondiale de l'environnement.

Elle peut affecter le développement du cerveau des enfants et entraîner de graves problèmes de santé, notamment des maladies cardiaques, de l'asthme, du diabète et du cancer.
 
Luiz Davidovich, président de l'Académie brésilienne des sciences, déclare dans un entretien avec SciDev.Net que « l'accord propose la reconnaissance du droit à l'air pur et une articulation plus efficace garantissant le développement de stratégies de contrôle de la pollution atmosphérique qui aident à catalyser les investissements destinés à promouvoir des politiques plus durables. »

Dans une déclaration qui sera présentée lors du Sommet des Nations Unies sur le climat à New York en septembre, les académies ont exhorté tous les pays à mettre en œuvre des systèmes de contrôle des émissions industrielles et de surveillance de l'air.

Dans la mesure du possible, les succès des villes et des pays devraient être partagés pour aider ceux qui luttent pour améliorer la qualité de l'air, ont-ils suggéré.

La combustion de combustibles fossiles et de biomasse, qui servent à la production d'énergie, au chauffage, à la cuisine, aux transports et à l'agriculture, constitue la principale cause de la pollution atmosphérique.

La pollution par les combustibles fossiles est particulièrement nocive pour l'homme, car elle contient de grandes quantités de particules, en particulier celles d'un diamètre inférieur à 2,5 microns (PM2,5), qui ont tendance à rester plus longtemps dans l'air que les particules plus lourdes. Lorsque ces particules s’en prennent au corps humain, elles peuvent pénétrer dans les poumons et même dans le sang.

Paulo Artaxo, de l'Institut de physique de l'Université de São Paulo, qui a aidé à collecter et à analyser les données du rapport, a déclaré à SciDev.Net que « ces particules endommagent les poumons, le cœur, la peau, le corps et d'autres organes, augmentant ainsi le risque de maladies et d'incapacités. »

Pour rédiger le document, des experts nommés par les académies ont analysé les données publiées au cours des dernières décennies sur les effets de la pollution de l'air sur la santé humaine et l'environnement.

Paulo Saldiva, chercheur à la Faculté de médecine de l’Université de São Paulo, qui a participé à la rédaction du rapport, a déclaré que « c’est la première fois que des académies des sciences de plusieurs pays s’associent dans un projet commun pour lancer un appel de ce type ».

Le document souligne que la combustion de combustibles fossiles est la source de deux des principaux gaz à effet de serre : le méthane (CH4) et le dioxyde de carbone (CO2), dont l'accumulation dans l'atmosphère est associée au changement climatique.

« Si nous contrôlions ces combustions, le changement climatique serait également réduit et contribuerait à atteindre l'objectif de limiter le réchauffement planétaire moyen à 1,5 ° C », explique Paulo Artaxo, se référant aux objectifs climatiques globaux énoncés dans l'accord de Paris de 2015.

Le rapport indique que cette action permettrait d'éviter 2,4 millions de décès. Pour sa part, Luiz Davidovich explique aussi qu'il existe d'autres politiques et solutions pour réduire les produits de combustion, tels que la suppression des subventions fiscales pour la production et la consommation de combustibles fossiles.

Rien qu’au Brésil, ces subventions se sont élevées à environ 21,2 milliards de dollars américains (plus de 12.000 milliards de Francs CFA) en 2018, selon les données de l’Institut d’études socioéconomiques, basé à Brasilia.

Paulo Saldiva estime que les économies résultant de la suppression des subventions pourraient être orientées vers des politiques visant à stimuler la production d'énergie propre et les technologies et infrastructures de contrôle de la pollution.

La lutte contre la pollution atmosphérique présente également des avantages économiques évidents, insiste Luiz Davidovich. On estime qu'en 2015, les maladies causées par la pollution de l'air dans 176 pays ont coûté 3.800 milliards de dollars – plus de 2 millions de milliards de Francs CFA.

« En outre, ce fardeau économique ajoute également des coûts de santé qui peuvent même absorber tous les budgets nationaux de la santé des pays en développement », ajoute-t-il.
 
Le biologiste William Laurance, enseignant-chercheur à la James Cook University, en Australie, qui n'a pas participé au rapport, estime qu'une initiative comme celle-ci « est opportune et vitale pour le bien-être humain ».
 
William Laurance indique que les pays en développement en général, et les villes asiatiques en particulier, notamment celles de l'Inde, du Pakistan et de la Chine, ont la pire qualité d'air de la planète.
 
« Vivre dans ces endroits, c'est comme fumer un paquet de cigarettes par jour », déclare-t-il à SciDev.Net.
 
« C’est formidable de voir le Brésil, l’Allemagne et les États-Unis soutenir cette initiative, mais il sera également bon d’avoir de solides partenaires asiatiques », ajoute-t-il.