07/01/11

Analyse africaine : Bilan de la politique scientifique en 2010

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Linda Nordling analyse les tendances de la politique scientifique pendant l'année écoulée, et se projette vers une nouvelle 'décennie de la science'.

2010 a commencé avec des notes d'espoir pour la science en Afrique, et ce malgré les revers enregistrés au cours de l'année précédente – notamment, l'annonce par le commissaire de l'Union africaine (UA) pour la science et la technologie (S&T) en octobre 2009 que son département était à sec.

L'Égypte, l'une des économies les plus solides du continent, s'apprêtait à succéder au Kenya à la présidence du Conseil des ministres africains de la science et la technologie (AMCOST). L'Afrique du Sud, une autre locomotive du continent, rejoignait le bureau de l'AMCOST, suscitant de grands espoirs pour une 'équipe de rêve' qui relancerait les projets scientifiques du continent.

2010 était l'année des grands rendez-vous pour l'émergence d'une politique scientifique africaine. L'engagement pris par les dirigeants africains de consacrer 1 pour cent du PIB de leurs pays à la S&T arrivait à échéance. Et le sommet du G8 de Gleneagles de 2005, à l'occasion duquel les dirigeants de la planète s'étaient engagés à doubler leurs contributions à l'aide au développement, marquait son cinquième anniversaire.

2010 aura-t-elle répondu aux attentes ? En bref, la réponse est non. Aucun de ces objectifs n'a été atteint. En outre, un programme majeur de formation postdoctorale n'a pas su s'épanouir sous la nouvelle direction de l'AMCOST.

Un continent à la dérive

Certes, personne ne s'attendait à voir l'objectif de 1 pour cent du PIB consacré à la S&T réalisé – et cela même au moment où les pays s'y sont engagés en 2007. Si multiplier par dix (au moins) les budgets de la science en Afrique semble une bonne idée dans un document signé par des chefs d'Etat, cela n'a guère de sens dans la pratique. La plupart des pays africains sont très loin d'avoir les systèmes de formation et de financement capables d'absorber un tel afflux de fonds et de les transformer en une science utile.

Pour ce qui est de Gleneagles, le monde a changé depuis que cet engagement a été pris. La crise financière a, en effet, modifié la carte économique du monde. Les bailleurs de fonds classiques – l'Europe et les États-Unis – perdent aujourd'hui du terrain face aux économies émergentes telles que l'Inde et la Chine.

L'Université panafricaine(UPA), un réseau continental de programmes de formation postdoctorale basés dans les cinq régions du continent et programme phare de la Commission de l'UA, est au point mort.

La Libye et l'Algérie se sont livrées rude bataille pour accueillir le nœud du réseau dans la partie nord, destiné à mettra l'accent sur les sciences de l'eau. Dans la partie sud, des projets d'ouverture du nœud régional aux étudiants en janvier 2010 n'ont toujours pas abouti, après que des questions aient été soulevées avec l'attribution du nœud à l'Université de Stellenbosch, en Afrique du Sud.

The foot-dragging might be a consequence of a stronger AMCOST, which typically enters the decision-making process at a late stage to weigh in on pan-African plans like the PAU. While AMCOST often voices concern about the free rein the AU has in developing continental science policy, until now attempts to keep it in check have been modest.

Les atermoiements pourraient bien être la conséquence d'une AMCOST plus forte, qui a pour habitude de s'immiscer dans le processus de prise de décisions à un stade tardif afin de peser sur les projets panafricains comme l'UPA. L'AMCOST a beau exprimer souvent ses réserves concernant la liberté d'action de l'UA dans le développement de la politique scientifique du continent, les tentatives pour la contenir ont été jusqu'à ce jour plutôt modestes.

La Commission de l'UA a déjà été accusée d'outrepasser les décideurs politiques nationaux. Mais elle a souvent eu à agir en l'absence d'un engagement solide de la part d'AMCOST — la faible participation aux réunions des ministres en charge de la science étant notoire.

Et le continent a pris du retard dans ces réunions. Ainsi, la quatrième réunion biennale de l'AMCOST, qui devait se tenir au cours du dernier trimestre de 2009, n'a eu lieu qu'en mars 2010. La réunion du bureau de l'AMCOST, attendue vers la fin de 2010, se fait toujours attendre.

Si cet état de choses s'avère politiquement délicat dans le court terme, cela devrait produire de meilleures politiques à plus long terme. Les Etats membres de l'UA doivent donner une légitimité à la commission — sans un soutien des Etats, les politiques communes du continent ne prendront pas forme. Un appui plus ferme de la part des Etatspour les projets scientifiques panafricains figure en bonne place sur la liste de souhaits de l'UA.

Faire confiance aux pays

Si 2010 a été l'année où l'élaboration des politiques scientifiques du continent a tourné court, l'année fut également marquée par la prise, dans une poignée de pays, d'engagements envers la science plutôt encourageants.

L'Ouganda et la Tanzanie ont ainsi dévoilé des budgets nationaux respectueux de la science en juin. Même l'Angola a publié un projet de politique S&T, approuvé par les parties prenantes réunies à Luanda, la capitale, en novembre.

Le gouvernement tanzanien a multiplié par trente la dotation de sa Commission pour la science et technologie. Or cela ne fait augmenter que très légèrement le pourcentage du PIB consacré à la S&T, illustrant ainsi la nature chimérique de l'engagement d'allouer 1 pour cent au financement de la S&T.

But the money will kick-start a reform of Tanzania's old-fashioned funding mechanisms, where seniority currently outranks ingenuity.

And it signals a growing realisation in African governments that how research funding is spent is at least as important as how much of it there is.

Ces fonds serviront néanmoins à lancer une réforme des mécanismes de financement en Tanzanie, des systèmes démodés où l'ancienneté prime sur l'ingéniosité.

C'est le signe d'une prise de conscience croissante par les gouvernements africains de la nécessité d'accorder autant d'importance à la façon de dépenser les fonds alloués à la recherche qu'aux montants disponibles.

Une décennie de la science ?

2011 pourrait bien s'inscrire dans la continuité de l'année écoulée. Les pays riches étant encore sous le choc de la crise financière, l'aide en toute vraisemblance ne sera qu'une priorité secondaire. Les pays africains le savent, et élaborent des stratégies pour réduire leur dépendance.

A l'échelle continentale, l'année 2011 est censée marquer le début d'une 'Décennie de la science' en Afrique. Mais plutôt que de d'élaborer de nouveaux projets, la priorité de l'AMCOST ne devrait-elle pas se porter sur la nécessité de revoir les programmes en cours, afin de s'assurer qu'ils soient réalisables malgré ce nouvel environnement financier difficile ?

Je reste convaincue que les Etats africains représentent le plus grand espoir du continent. Si les pays qui ont commencé à investir dans la science persévèrent dans leurs efforts — et si les fonds sont judicieusement investis — les retombées commenceront à être perceptibles.

Cela pourrait ne pas se voir dès 2011, mais l'attente ne sera pas trop longue. Et une fois que le leadership de ces pays commence à émerger, à mesure qu'ils récoltent les fruits de leurs investissements, d'autres pourraient être encouragés à suivre leur exemple.

Une décennie de la science ? Espérons-le.

Journalist Linda Nordling, based in Cape Town, South Africa, specialises in African science policy, education and development. She was the founding editor of Research Africa and writes for SciDev.Net, The Guardian, Nature and others.