04/03/09

Pour une réflexion nouvelle sur les infrastructures d’aide à l’innovation

Des approches plus innovantes dépendront des expériences et compétences acquises dans l’enseignement supérieur Crédit image: Flickr/UTPL VIA Comunicaciones

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Pour Amoldo Ventura, l’enseignement supérieur dans les pays en développement a besoin d’infrastructures d’innovation pour pouvoir stimuler le développement.

Les mutations technologiques rapides et les sociétés plus sophistiquées génèrent des besoins de changement dans les pays en développement. Les vieilles méthodes, les technologies obsolètes et les choix dépassés ne sont pas à la hauteur de la situation.

Des approches plus innovantes sont nécessaires pour s’attaquer aux énigmes sociales et tracer la voie du progrès. Les ingrédients de ces approches doivent être l’information, les expériences et les compétences qui s’acquièrent dans l’enseignement supérieur.

Contre-performance

De nombreux pays en développement ont des universités anciennes et de bonne réputation et des établissements d’enseignement technique bénéficiant d’un appui financier local et étranger. L’université des Antilles, par exemple, existe depuis 1949. Mais ces universités n’ont pas suffisamment contribue à stimuler le développement socio-économique local ou à préserver l’environnement naturel.

L’Amérique latine et les Caraïbes ont en moyenne plus de 700 chercheurs et ingénieurs pour un million d’habitants, mais leur contribution à l’innovation et au développement reste faible. La circonstance que les universités de cette région ne contribuent pas autant qu’on l’espérait développement local est une source constante de lamentation des hommes politiques locaux et autres acteurs de la société.

La récession économique mondiale a fait perdre a nombreux pays en développement des marchés pour leurs produits, obligeant leurs dirigeants à lancer des appels a la formation de plus de diplômés en sciences, en technologie et en ingénierie afin d’améliorer la productivité et diversifier les produits, de manière à se libérer des malheurs économiques. L’augmentation, par le passé, du nombre d’étudiants n’a pas changé grand-chose sur le plan de l’innovation, laissant penser que l’enseignement supérieur souffre de problèmes plus fondamentaux.

L’absence de collaboration entre les universitaires et l’industrie constitue l’un des problèmes clés. Les compétences, les connaissances, les conceptions et les énergies des gens sont développées et orientées vers des projets isolés conçus par des agences spécialisées pour des missions n’ayant aucun rapport entre elles. Il n y a dès lors pas de synergie d’accumulation d’effets bénéfiques. Beaucoup de résultas ou retombées de projets ne sont pas finances à l’issue du travail de recherche, et peuvent ne pas être complementaires d’autres initiatives dans des secteurs ou même des départements voisins.

Et un accent peu judicieux sur l’enseignement supérieur est en train de compliquer davantage la situation. Ainsi, en Jamaïque, où l’accent a été mis sur des programmes scientifiques et technologiques plus orientés vers le domaine intellectuel au prix de beaucoup d’efforts au detriment des détails techniques pratiques, on assiste au ralentissement de l’application des connaissances aux produits et services commandés De plus, l’interprétation erronée des demandes du marché a conduit à une formation excessive en gestion, en affaires et en comptabilité, ce qui encourage la circulation plutôt que la création de richesses.

Des programmes d’enseignement supérieur bien établis dans des facultés indépendantes sont souvent destinés à aiguiser des compétences spécialisées. Ils réfléchissent rarement à la façon dont ces compétences peuvent être harmonisées pour permettre de faire face aux problèmes multidisciplinaires et multisectoriels de développement dans le domaine, par exemple, du stockage et de la commercialisation de la production agricole et agro-industrielle.

Et des projets destinés simplement à combler des besoins de compétences ne répondront pas aux aspirations au développement, à moins qu’ils n’évaluent la capacité de déploiement de ces compétences.

La nécessité de changement

Aider l’enseignement supérieur à faire face aux objectifs de développement signifie réevaluer totalement le processus d’innovation qui, à son tour ,dépend des visions qui sont intimement liées, de la collaboration, des échanges, de la réciprocité et de la coopération. Les progrès passeront par une plus grande volonté d’évaluation et une plus grande prise de risques. Et cela passe aussi par un changement d’attitudes, en particulier par une’ plus grande tolérance pour l’échec.

Nous devons modifier les programmes scientifiques, technologiques et d’ingénierie pour les rendre plus interdisciplinaires, pratiques et adapté à l’apprentissage collectif. Le Mona School of Business de l’université des Antilles, en Jamaïque, a un programme de gestion technologique qui connaît beaucoup de succès, qui est adapté aux cadres supérieurs et aux cadres intermédiaires qui veulent moderniser leurs vieilles méthodes de production. D’autres devraient faire de même en centrant les enseignements non pas uniquement sur le renforcement des capacités mais également sur la façon dont lces capacités peuvent être utilisées pour générer de nouvelles idées, de nouvelles formes, de nouveaux procédés et de nouveaux produits.

D’autres intervenants doivent également jouer leur rôle. Les entreprises doivent apprendre à utiliser les nouvelles capacités scientifiques et techniques avec plus d’assurance. (Les économies émergentes asiatiques telles que la Chine, l’Inde et Singapour le font déjà). Les gouvernements doivent concevoir et mettre en œuvre des mesures incitatives d’appui et des politiques de financement de manière plus efficace. La communauté scientifique et technique devra abandonner l’individualisme excessif et la folie des grandeurs. La communauté scientifique et technique devra travailler de manière collective et changer un système dans lequel les chercheurs ont soif de promotion et de reconnaissance individuelles. La société doit se montrer patiente et disposée à supporter les frais d’installation des systèmes d’innovation.

En résumé, nous devons créer des sociétés plus humaines et plus enclines à apprendre.

Le rôle des bailleurs de fonds

Les partenaires étrangers peuvent apporter une aide en fournissant le financement et l’expertise qui permettrait de créer et de stimuler les entreprises d’innovation. Ils devraient soutenir les essais de commercialisation des résultats de la recherche par le biais d’incubateurs de technologies, de centres de conception, de groupes d’entreprenariat, de parcs scientifiques, d’usines-pilotes, et de bureaux de transfert et de prévision dans les établissements d’enseignement supérieur.

Ainsi, le Mona Institute of Appplied Sciences, à l’université des Antilles, est un parc scientifique recent qui a commencé à travailler sur le problème de la traduction des résultats des recherches en applications commerciales et de la fourniture des cours de niveau supérieur afin de coller aux exigences des secteurs du commerce et de l’industrie. On trouve d’autres initiatives semblables dans des établissements techniques et des universités en République dominicaine et à Cuba. L’aide apportée à ces projets présentera l’avantage de stimuler les emplois et les affaires.

Pour tirer le meilleur de ces initiatives, il faut des liens entre l’enseignement et la formation et les besoins socio-économiques, démocratiques et environnementaux locaux.

Certains pays en développement, comme le Brésil et Singapour rassemblent des équipes interconnectées qui construisent des systèmes d’innovations en encourageant la pensée non conventionnelle et le partage. Les agences de financement devraient collaborer beaucoup plus étroitement avec ces initiatives.

C’est la qualité et la longévité des rapports – entre les fournisseurs et les clients ; les sources locales et étrangères de technologies ; les bailleurs de fonds, les fournisseurs et les utilisateurs de S&T ; et entre les universités et d’autres institutions et établissements de formation – qui méritent en réalité un appui sérieux.

Arnoldo Ventura, un ancien spécialiste des sciences fondamentales, est conseiller spécial pour la science et le technologie du premier ministre jamaïcain.