10/11/11

Un oasis souterrain pourrait stimuler le développement de l’Egypte

Est-ce que de nouveaux accès à l’aquifère pourraient transformer certaines parties du désert égyptien en oasis ? Crédit image: Flickr/10 b travelling

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[LE CAIRE] Le gouvernement égyptien vient de commencer à exploiter des puits expérimentaux dans le désert suite à la découverte de nouveaux points d’accès à une immense oasis d’eaux souterraines s’étendant sur le Tchad, l’Égypte, la Lybie et le Soudan.

Cet aquifère souterrain, connu sous le nom de Bassin de Nubie ou Nubian Sandstone Aquifer System (NSAS), contient environ 150 000 km3 d’eau, et la Lybie l’exploite déjà pour subvenir à près de 70 pourcent de ses besoins en eau. Mais l’accès de l’Égypte a jusque-là été limité à seulement trois points d’accès principaux dans des oasis du désert.

Les géologues égyptiens viennent d’annoncer qu’ils avaient trouvé 20 nouveaux points d’accès à cet aquifère au cœur du désert égyptien, ce qui pourrait contribuer à réhabiliter près de 15 000 km² de désert en Égypte, et stimuler ainsi tant l’économie que les moyens de subsistance dans la région.

Mais tous ne sont pas d’accord sur le fait qu’il sera possible d’accéder durablement à l’eau grâce à ces nouveaux points d’accès.

Khaled Abd El-Kader Ouda, Professeur émérite de stratigraphie et de paléontologie à l’Université d’Assiout, a utilisé des images satellites de la Grande mer de sable, une zone qui se situe dans le Désert occidental de l’Égypte et qui comporte d’immenses dunes de sables pouvant atteindre 100 mètres de hauteur, ainsi que les résultats de recherches réalisées sur le terrain, pour conclure qu’il serait peut-être possible d’accéder à l’aquifère.

Les recherches sur le terrain, dirigées par le Professeur Ouda et par une équipe de l’Université d’Assiout et du Desert Research Centre (Centre de recherches sur le désert), ont permis de constater l’existence de dépôts de grès inattendus qui suggèrent la présence de formations géologiques contenant de l’eau.

« Notre équipe a découvert une strate géologique porteuse d’eau qu’il faut étudier pour préciser l’épaisseur de la saturation en eau et de la strate ; cela nous permettra d’étudier la faisabilité économique de l’extraction de cette eau », a déclaré Mohamed Gad, Professeur d’hydrologie au Desert Research Centre, à SciDev.Net.

Ils ont annoncé leurs résultats le mois dernier (18 octobre), lors d’une conférence de presse, et le Ministre des ressources en eau et de l’irrigation a publié une déclaration la semaine dernière (1er novembre) pour soutenir la découverte de l’équipe du Professeur Ouda, et commencer à exploiter deux puits expérimentaux qui seront financés par le gouvernement.

S’il est possible d’accéder à l’eau à ces nouveaux endroits, le Professeur Ouda a déclaré, " il s’agirait du début d’un immense projet de développement en Égypte, dans lequel le gouvernement devrait investir ".

Mais ces résultats ont déclenché un débat en Égypte, ou de nombreux géologues et scientifiques en hydrologie ont déclaré qu’on ne savait pas encore clairement s’il y avait de l’eau à cet endroit et quelle était sa qualité.

Samer El-Mofty, ancien Secrétaire général du Desert Research Center, a déclaré à SciDev.Net :  "Étant donné que, selon toutes les études ayant été réalisées sur le sujet jusque-là, le Bassin de Nubie constitue un système aquifère non renouvelable et que le Désert occidental égyptien n’a reçu aucune eau de pluie au cours des 80 dernières années, nous devons mener des études hydrologiques approfondies en nous appuyant sur cette découverte avant d’investir de l’argent pour réhabiliter les zones concernées ".

Nahed El-Arabi, Directeur de l’Institut national de Recherches sur les Eaux Souterraines (national Research Institute for Groundwater), a déclaré qu’il était nécessaire de mener des recherches supplémentaires "afin de déterminer l’ampleur des extractions pouvant être réalisées en toute sécurité, s’il y a bien de l’eau dans ces endroits, avant de déterminer les zones qui pourront être exploitées dans la région" .

Maghawry Diab, Professeur d’hydrogéologie et ancien Président de l’Université de Menufeya, a déclaré que les puits expérimentaux pourraient apporter les données nécessaires pour estimer mathématiquement la quantité d’eau pouvant être extraite ainsi que les méthodes à suivre pour y parvenir en respectant l’environnement. Il a tout de même ajouté que chaque puits coûterait environ 170 000 dollars américains.

Le fait que le Bassin de Nubie constitue une ressource potentielle en eau pour de futurs programmes de développement, a également été reconnu par le projet nubien AIEA-PNUD-FEM, une initiative de recherches ayant été lancée en 2006 par l’Agence internationale de l’énergie atomique dans le but de combler le manque de connaissances sur l’aquifère et de gérer de manière équitable son développement durable, tout en protégeant la biodiversité et les ressources du terrain concerné.