15/01/21

Créer un stock de vaccins anti-Ebola va se heurter à des soucis d’approvisionnement

Beni vaccination ebola Main
Un agent de santé fait vacciner un homme qui a été en contact avec une personne touchée par Ebola à Beni, dans l'est de la RDC. L'alliance du vaccin Gavi et ses partenaires ont annoncé la constitution d'un stock mondial de vaccins contre Ebola. Crédit image: World Bank / Vincent Tremeau, (CC BY-NC-ND 2.0). Cette image a été rognée.

Lecture rapide

  • Gavi et ses partenaires annoncent un stock mondial de vaccin contre Ebola
  • Mais, seules 6 890 doses sont disponibles en raison des «goulots d'étranglement de l'approvisionnement»
  • L'atteinte de cet objectif pourrait prendre jusqu'à trois ans en raison de problèmes d'approvisionnement

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Selon des chercheurs, les retards dans la chaîne d’approvisionnement doivent être corrigés afin d’accélérer la création d’un stock de vaccins contre la maladie mortelle qu’est Ebola.

Gavi, l’Alliance du vaccin, et ses partenaires, ont annoncé mardi dernier qu’une fois que ce sera pleinement opérationnel, les pays à revenu faible et intermédiaire de la tranche inférieure pourront accéder gratuitement à un stock de 500 000 doses ainsi qu’à un soutien pour les coûts opérationnels relatifs au déploiement des programmes de vaccination.

Cependant, les organisations internationales ont averti que l’atteinte de ces objectifs pourrait prendre jusqu’à trois ans.

“En créant un stock de 500 000 doses de vaccin contre Ebola, disponibles pour tous les pays, nous pouvons aider à prévenir les pertes en vies humaines et à mettre fin rapidement aux épidémies d’Ebola à l’avenir”

Seth Berkley, directeur général de Gavi

Le nouveau vaccin anti-Ebola a été utilisé pour lutter contre une épidémie de deux ans dans l’est de la République démocratique du Congo, qui a été déclarée terminée en juin dernier, après que 300 000 personnes ont été vaccinées.

Le vaccin injectable Ervebo (rVSV-ZEBOV-GP), fabriqué par Merck, Sharp & Dohme (MSD) Corp., est efficace contre la souche zaïre, la plus courante du virus. Il a été approuvé par huit pays africains à la suite d’un processus de présélection accéléré par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), certifiant son innocuité et son efficacité.

Le stock comprendra des doses autorisées d’Ervebo, qui a également été approuvé par les régulateurs européens et américains, a déclaré Gavi ; ainsi que d’autres candidats vaccins en cours de développement, une fois qu’ils seront autorisés.

Le stock sera hébergé à Bâle, en Suisse, et géré par une organisation internationale de coordination, comprenant les agences des Nations Unies comme l’OMS et l’UNICEF, et les agences d’aide telles que Médecins sans frontières (MSF) et la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR).

À la demande d’un pays, les vaccins peuvent être mis à disposition par le fabricant avec un emballage ultra-froid reproduisant la chaîne du froid, pour un envoi d’urgence, fait savoir l’OMS.

Goulots d’étranglement

Cependant, MSF a averti qu’il n’y avait actuellement que 6 890 doses disponibles en raison des « goulots d’étranglement de l’approvisionnement » et a déclaré qu’il faudrait jusqu’à trois ans pour atteindre l’objectif de 500 000 doses. L’OMS a également déclaré que cela pourrait prendre de deux à trois ans.

David Heymann, de la London School of Hygiene and Tropical Medicine, déclare que « le défi pour le stock de vaccin contre Ebola est d’avoir suffisamment de vaccins immédiatement prêts à être déployés – espérons qu’il y aura plus de vaccins à ajouter à la réserve à l’avenir. »

Il souligne que le vaccin n’était homologué que pour la souche Ebola Zaïre et pourrait ne pas fonctionner efficacement pour d’autres souches.

Les premières livraisons de doses dans le stock sont financées grâce à une contribution de 20 millions de dollars de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID).

Les flambées d’Ebola étant relativement rares et imprévisibles, il n’y a pas de marché naturel pour le vaccin, explique l’OMS.

Gavi déclare avoir créé « de fortes incitations » pour les fabricants de vaccins par le biais d’un engagement d’achat anticipé afin de se procurer des doses une fois qu’elles ont été préqualifiées par l’OMS.

Le développement du vaccin Ebola a été accéléré à la suite de l’épidémie de 2013-2016 en Afrique de l’Ouest, qui a fait plus de 11 300 morts en Guinée, au Libéria et en Sierra Leone.

Guyguy Manangama, responsable de l’intervention contre Ebola chez Médecins Sans Frontières (MSF) qui a travaillé sur la dernière épidémie d’Ebola en RDC, déclare que la vaccination est l’un des moyens les plus efficaces de lutte contre les épidémies d’Ebola et que le stock permettrait un déploiement rapide dans les zones d’endémie. Mais, il ajoute que « cela ne doit pas limiter les efforts pour le développement des autres candidats vaccins ».

« Il faudra veiller à ce qu’il y ait un bon système de réapprovisionnement de ce stock pour ne pas faire face à des ruptures sur le terrain à les moments critiques d’épidémies, et continuer la recherche pour améliorer et adapter la chaine de froid selon les contextes, afin d’avoir un vaccin plus stable ne nécessitant pas une chaine de froid complexe », dit-il.

COVID-19

Le directeur général de Gavi, Seth Berkley, soutient que le vaccin contre Ebola a « créé un précédent pour l’accélération du développement et de la production de vaccins contre la COVID-19 ».

Gavi dirige également conjointement le programme COVAX avec l’OMS, visant à acheter et à assurer une distribution équitable des vaccins contre la COVID-19.

« En créant un stock de 500 000 doses de vaccin contre Ebola, disponibles pour tous les pays, nous pouvons aider à prévenir les pertes en vies humaines et à mettre fin rapidement aux épidémies d’Ebola à l’avenir », ajoute Seth Berkley.

Marianne Comparet, directrice de l’International Society for Neglected Tropical Diseases, basée à Londres, est optimiste, malgré le temps qu’il faudra pour constituer ce stock.

« Le fait que ces grandes organisations se soient associées à ce sujet garantira un examen accéléré, au plus haut niveau et sur le terrain, des goulots d’étranglement de la chaîne d’approvisionnement », déclare-t-elle.

Un porte-parole de MSD affirme que la société travaille en étroite collaboration avec l’OMS sur le réapprovisionnement et la fourniture du vaccin.

« Nous procédons rapidement à la fabrication de doses autorisées d’Ervebo, et cela peut prendre du temps. Dans l’intervalle, nous nous sommes engagés à continuer de fournir des doses expérimentales pour la riposte à l’épidémie », indique-t-il.