11/02/16

Une nouvelle espèce de poisson découverte au Gabon

Poisson caché Gabon
Crédit image: Cenarest

Lecture rapide

  • Trois nouveaux spécimens de la famille des mormyres ont été découverts en 13 ans
  • La suite des recherches permettra de renforcer la connaissance de la biodiversité
  • Un chercheur souligne les retombées possibles pour les populations locales

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Une équipe de chercheurs viennent de confirmer l’existence dans des rivières du Gabon d’une espèce de poissons non encore répertoriée qu’ils ont baptisée Cryptomyrus (poisson caché).
 
Selon le journal scientifique Zookeys qui a révélé l’information le 8 février 2016, ce poisson-éléphant (parce qu’il possède un organe en forme de trompe) appartient à la famille des mormyriadae.
 
Les recherches qui ont conduit à cette découverte ont été menées par John P. Sullivan et Carl D. Hopkins de l’Université de Cornell aux Etats-Unis, et Sébastien Lavoué de l’Institut d’océanographie de l’Université nationale de Taipei à Taiwan, en collaboration avec des chercheurs du Centre national de la recherche scientifique et technologique du Gabon (CENAREST) et de Nature Conservancy

“Lorsqu’on fait de telles découvertes, le pays en tire des bénéfices. Par exemple, si des équipes de chercheurs doivent poursuivre les recherches sur cette espèce, il y a des revenus que cette activité draine en termes de taxes”

Judicaël Essono
Chercheur, CENAREST – Gabon

D’après John Sullivan, auteur principal de la découverte, les recherches ont été ardues et n’ont pas permis de récolter une quantité importante de poissons au vu du temps et des ressources consacrés à ce travail.
 
Du coup, assure-t-il, "le fait de ne pas en avoir davantage a rendu les descriptions difficiles ; mais il était important d’annoncer cette découverte sans plus tarder".

C’est en septembre 2014, racontent les chercheurs, que les recherches ont été fructueuses un soir sur le fleuve Ogooué, près des chutes de Doume, situées dans la province de l’Ogooué-Lolo, dans le sud-est du pays. C’est là qu’a été capturé le dernier des trois spécimens du poisson caché.
 
De retour au Museum of Vertebrates de l’université de Cornell pour l’examen de l’acide désoxyribonucléique (ADN) de ce poisson, John D. Sullivan a fait deux constats : d’une part, Sébastien Lavoué de l’université de Taipei, avait trouvé 13 ans auparavant sur le fleuve Nyanga (sud du Gabon) une espèce unique, ressemblant trait pour trait à sa trouvaille.
 
D’autre part, Yves Fermon, autre chercheur, avait réalisé en 2012 une découverte similaire dans la rivière Mabounié.
 
L’ADN des trois poissons, indiquent les chercheurs cités par le journal scientifique, montre qu’ils sont fortement apparentés et n’appartiennent à aucun genre de mormyre connu.
 
"Nous n’avions pas d’autre choix que de les décrire comme appartenant à un nouveau genre, et le nom Cryptomyrus, qui signifie "poisson caché", nous a semblé approprié pour des poissons si difficiles à trouver", précise John D. Sullivan.
 

Plus-value

Pour les chercheurs locaux, cette nouvelle est une plus-value scientifique et même économique. "L’espèce n’avait pas encore été enregistrée dans la taxinomie et avec ces résultats, elle a désormais une définition et un nom scientifiques", explique Ludovic Ngok Banak, chercheur à l’Institut des recherches écologiques tropicales de Libreville.
 
En effet, l’un des poissons a été baptisé Cryptomyrus Ona, en hommage à un défenseur de l’environnement gabonais, Marc Ona Essangui, de l’ONG Brainforest, et lauréat du Prix Goldman pour l’environnement en 2009.
 
"Lorsqu’on fait de telles découvertes, le pays en tire des bénéfices. Par exemple, si des équipes de chercheurs doivent poursuivre les recherches sur cette espèce, il y a des revenus que cette activité draine en termes de taxes", indique pour sa part Judicaël Essono, chercheur au CENAREST.
 
Par ailleurs, poursuit-il, "la convention des Nations unies sur la biodiversité prévoit dans ses dispositions qu’en contrepartie de l’exploitation d’une nouvelle espèce découverte, une partie des revenus soit reversée aux populations en vue de financer des projets de développement et de protéger la faune aquatique".
 
A l’ONG Nature Conservancy, la directrice du Programme Gabon, Marie-Claire Paiz, indique que cette découverte va contribuer à outiller les décideurs gabonais sur le mode d’emploi de l’utilisation rationnelle des ressources hydrauliques.
 
"Il est important de chercher à minimiser les dommages sur les ressources nécessaires aux populations riveraines lors de la prise de décisions pour les emplacements de nouvelles infrastructures. C’est ainsi que ce type d’expédition et le travail de ces chercheurs peuvent contribuer à façonner le cours de l’histoire du pays".