22/02/11

Le traitement vermifuge pendant la grossesse pose un dilemme moral

Les infections vermineuse et parasitique sont une cause répandue d’anémie en Afrique Crédit image: Flickr/US Army Africa

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[KAMPALA] D’après certains scientifiques ougandais, le traitement des maladies infectieuses dans les pays en développement pourrait entraîner une hausse de la prévalence des allergies, soulevant ainsi des questions morales.

Une étude réalisée en Ouganda suggère un risque accru d’allergies cutanées chez les bébés de femmes ayant reçu, pendant leur grossesse, un traitement contre le ver Schistosoma mansoni, un helminthe capable de causer l’anémie.. Ces conclusions, fondées sur une étude ayant impliqué plus de 2500 femmes, ont été publiées le mois dernier (23 janvier) dans la revue Pediatric Allergy and Immunology.

Pour Harriet Mpairwe, auteure principale de l’étude et responsable médicale de la Cellule ougandaise de recherche sur le SIDA ’il existerait un lien entre une baisse dans la prévalence des maladies infectieuses et une hausse dans celle des allergies’.

Cette ‘hypothèse hygiéniste’, selon laquelle l’exposition aux infections dans la petite enfance protège les enfants contre les allergies plus tard dans la vie, fut élaborée dans le monde développé pour expliquer la hausse de la prévalence des allergies par les progrès de l’hygiène et des normes de soins de santé.

La nécessité de maintenir un équilibre entre traitement des maladies et augmentation du risque d’allergie semble maintenant aussi concerner le monde en développement.

‘Un certain nombre d’études ont montré que la prévalence des allergies est en hausse à la fois dans les pays développés et les pays en développement, mais la cause exacte de cette augmentation reste inconnue dans le monde en développement,’ explique Mpairwe.

Zac Kakyama Serubidde, médecin de famille au Louise Memorial Medical Center en Ouganda estime que les conclusions de cette étude posent une question morale : faut-il procéder au traitement vermifuge des femmes enceintes et faire courir au bébé le risque d’infection cutanée, ou faut-il plutôt renoncer à traiter les infections vermineuses chez la mère et lui faire courir le risque de mourir d’anémie ?

‘On ne peut laisser une mère mourir d’anémie parce qu’on veut protéger l’enfant qu’elle porte contre les infections cutanées comme l’eczéma, qui n’a jamais tué personne’, note-t-il. ‘Je n’hésiterais pas à déparasiter une femme enceinte et je pense que c’est le message qui doit être envoyé aux professionnels de la santé’.

‘En Afrique sub-saharienne, les causes d’anémie les plus répandues au sein de la population sont les infections parasitiques ou vermineuses’, précise-t-il.

Pour Mpaire, ‘il serait nécessaire de reproduire ces résultats dans d’autres contextes et comprendre les mécanismes sous-jacents avant de recommander toute modification de la politique actuelle’.

Lorsque toutes les preuves seront réunies, il sera possible de dire aux professionnels de la santé s’il faut retarder le traitement vermifuge des femmes enceintes jusqu’à la naissance du bébé ou les déparasiter pendant la grossesse, comme c’est la pratique actuelle, conclut-elle.

Lien vers le résumé de l’article dans Pediatric Allergy and Immunology

Références

Pediatric Allergy and Immunology 10.1111/j.1399-3038.2010.01122.x (2011)