04/02/11

La lutte contre le paludisme néglige une sous-espèce de moustiques

Lʹutilisation de moustiquaires pourrait inciter les moustiques à piquer davantage les êtres humains en dehors des maisons Crédit image: Flickr/Georgina Goodwin/Vestergaard Frandsen

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Selon un article publié aujourdʹhui (4 février) dans Science, des scientifiques ont découvert une sous-espèce de moustique qui pourrait devenir un important vecteur du paludisme à lʹextérieur, en échappant ainsi aux mesures de lutte contre les moustiques à lʹintérieur des maisons.

Les taux de paludisme ont diminué dans plusieurs pays africains à la suite de la diffusion de lʹutilisation de moustiquaires imprégnées dʹinsecticides et de pulvérisations de pesticides à lʹintérieur des maisons. Toutefois, des recherches menées au Burkina Faso suggèrent que presque la moitié des moustiques pourraient ne jamais entrer dans les maisons et échapper ainsi aux contrôles réalisés à lʹaide de moustiquaires ou de pulvérisateurs.

Ces résultats sont publiés alors que dʹautres chercheurs viennent dʹexprimer des inquiétudes sur le fait quʹune utilisation accrue des moustiquaires pourrait inciter les moustiques qui sévissent à lʹintérieur des maisons, à adopter un comportement différent en piquant dans la nature.

Pour ce qui est des recherches menées au Burkina Faso, les scientifiques ont pris des larves de moustiques dans des bassins situés à proximité dʹhabitations et ont utilisé lʹanalyse génétique pour identifier une importante sous-espèce génétique dʹAnopheles gambiae qui a récemment évolué, à savoir lʹagent vecteur du paludisme qui sévit le plus en Afrique. Ce groupe nʹavait encore jamais été détecté, ni en intérieur, ni à lʹextérieur.

Ils ont constaté que les adultes de ce sous-groupe, qui se sont développés dans le laboratoire, étaient fortement susceptibles dʹêtre infectés par le parasite du paludisme.

Michelle Riehle, coauteur de lʹarticle et chercheuse à lʹUniversité du Minnesota, aux États-Unis, a indiqué à SciDev.Net que son groupe ignore encore si ces moustiques piquent les êtres humains : "Nous essayons dʹen capturer à lʹextérieur pour déterminer sʹils peuvent aller jusquʹà sʹalimenter sur les hommes".

Ces recherches viennent sʹajouter à une littérature croissante qui suggère que les mesures actuelles de lutte contre les moustiques pourraient être inadaptées. Par exemple, George Christophides, lecteur travaillant sur les infections et lʹimmunité à lʹImperial College de Londres, au Royaume-Uni, a récemment cosigné deux articles dans Science, qui suggéraient que la souche dʹA. gambiae qui sévit en intérieur, se divisait en deux espèces séparées.

Il a déclaré à SciDev.Net : "les moustiques qui transmettent le paludisme évoluent rapidement… peut-être en raison de la pression que lʹhomme leur met. Nous savons que cela est le cas avec les insecticides, et cela lʹest peut-être également avec les moustiquaires. Plus nous installons de moustiquaires en Afrique, plus nous risquons de pousser les moustiques à piquer en dehors des maisons".

Selon Steve Lindsay, Professeur dʹentomologie de la santé publique à la London School of Hygiene and Tropical Medicine, au Royaume-Uni : "Nous disposons de moyens de contrôle efficaces contre les espèces dʹA. gambiae, mais ils sʹadressent tous aux moustiques qui viennent à lʹintérieur des maisons. Nous ne parvenons pas vraiment à lutter contre les piqures faites à lʹextérieur… La conformité avec les répulsifs pose problème".

Selon G. Christophides, "il est hautement probable que nous aurons besoin dʹun ensemble de méthodes qui dépendront du type de moustiques que nous trouvons selon lʹendroit. Il est possible que les moustiquaires fonctionnent dans un endroit mais pas dans un autre".

Toutefois, les interventions bloquant la transmission [lesquelles interrompent le cycle de vie du parasite, qui passe du moustique à lʹhomme et qui revient à nouveau] pourraient être "une solution universelle pour stopper la transmission du paludisme", a-t-il déclaré.

Les vaccins ou les médicaments bloquant la transmission seraient donnés à la population pour sʹassurer quʹun moustique ayant piqué une personne vaccinée ne pourrait plus être en mesure de transmettre la maladie.

Lien vers lʹarticle complet publié dans Science (en anglais)