05/03/19

Burkina : Du haricot Mungo pour combattre l’alcool frelaté

Naaba Tigré
Le chef traditionnel burkinabé, Naaba Tigré, promoteur agricole, a fait de la culture du haricot Mungo son cheval de bataille. Crédit image: Larlé Naaba Tigré.

Lecture rapide

  • La liqueur Mungo a été mise au point pour lutter contre la commercialisation d'alcool frelaté
  • Des tests en laboratoire ont permis à l'inventeur d'obtenir un quitus pour la production
  • Les premières bouteilles sont attendues dans le premier semestre de l’année

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Au Burkina Faso, un chef traditionnel, le Naaba Tigré, convaincu des propriétés nutritives du haricot Mungo, en fait la promotion auprès du monde rural.

De grands espaces sont ainsi emblavés pour cette nouvelle spéculation nutritive à haut rendement. Dans l’ouest du pays, dans la région des Hauts-Bassins, pour ne prendre que cet exemple, le promoteur a annoncé que les premiers producteurs de Haricot Mungo en contre-saison ont emblavé 375 ha, en 2017.

Le Naaba Tigré, avec son association Belwet, produit des biscuits, des gâteaux et du pain de Haricot Mungo.

La grande trouvaille viendra de sa rencontre avec un innovateur, Soungalo Koné, constructeur métallique et dessinateur industriel formé à Nantes, en France dans les années 1970. Il est installé à Banfora, dans l’ouest du pays, une région frontalière avec la Côte d’Ivoire. Il a, à son actif, le bangui stabilisé, cette boisson traditionnelle tirée de la sève du rônier et du whisky de petit mil.

L’innovation, pour lui, c’est la recherche de solutions avec les forces disponibles, dans le contexte africain. Pour cela, il se convainc qu' « il faut faire le maximum avec le minimum  ». 

Soungalo Koné propose ainsi au Naaba Tigré de mettre leurs ressources en commun pour fabriquer de la liqueur à base de haricot Mungo.

Cet innovateur qui se dit polytechnique, âgé de 72 ans, est convaincu d’être un jeune de 27 ans en inversant les chiffres de son âge réel. C'est ainsi qu'il s’est lancé dans la production de liqueur de haricot Mungo.

Pourquoi une liqueur de haricot Mungo ? « Je n’ai jamais connu une spéculation aussi riche et complète du point de vue nutritionnel que le haricot Mungo. Elle peut avoir un impact positif sur la santé publique et l’état nutritionnel de la population et améliorer le quotient intellectuel », affirme avec enthousiasme Soungalo Koné.
 
Du point de vue nutritionnel, le haricot Mungo, selon l’agronome Djieenma Hema, présente de nombreux avantages et peut contribuer à l’équilibre alimentaire des petits, comme des grands.

En effet, poursuit-il, 100g de haricot Mungo représentent presque la moitié des besoins journaliers en protéines, soit autant que 100g de viande.

Cet agronome, qui possède plus de cinq ans d’expérience dans la culture du Haricot Mungo, ne tarit pas d’éloges sur la qualité de cette spéculation.
 
Riche en fibres et en glucides, elle facilite la digestion et limite les risques de diabète et d’excès de cholestérol. Enfin, soutient-il, elle est riche en magnésium, en phosphore et en fer. C’est l’aliment idéal pour les femmes enceintes et allaitantes, mais également pour le renforcement de la mémoire et de l’éveil intellectuel des enfants, commente l’agronome.
 
L’innovateur estime que le haricot Mungo est chargé d’antioxydants qui luttent contre le stress oxydatif, responsable du vieillissement cellulaire et prémunit contre de nombreuses maladies (cancer, trouble cardiovasculaire). Et faire de la liqueur légèrement alcoolisée de cette légumineuse permet de « décrocher », dit-il, au grand maximum tous ces antioxydants qu’elle contient. 

En deux semaines, il a réalisé une première mixture de liqueur de haricot Mungo, qu’il a soumise aux analyses du laboratoire de l’Institut de recherches appliquées et technologies (IRSAT) du Burkina.

Selon le chef du département Technologie alimentaire de l’IRSAT, Leguet Ganou, la liqueur de haricot Mungo a été scientifiquement analysée et des observations ont été faites à l’industriel pour la suite de ses activités.

« La liqueur de haricot Mungo a été certifiée par l’IRSAT avec des observations liées au goût, au taux d’alcool et au parfum. Sinon du point de vue lecture scientifique, ça a été validé », se réjouit Soungalo Koné.

Quant au promoteur de la spéculation, le Larlé Naaba Tigré, agro-businessman, économiste de formation, l’un des ministres de l’Empereur des Mossi, la liqueur de haricot Mungo va permettre de stopper l’importation de l’alcool frelaté au Burkina.

L’innovateur réfléchit actuellement à la logistique à mettre en place et au type d’emballage pour produire, exporter et rentabiliser le produit.
 
Il affirme n’avoir pas peur de la disponibilité de la matières premières.
 
Pour l’agronome Djienma Hema, le stock prévisionnel de la campagne 2018/2019 est estimé entre 6.000 et 15.000 tonnes (il est produit dans toutes les 45 provinces du Burkina).
 
« Nous espérons que dans le premier semestre de 2019, nous serons opérationnels et il n'y a pas de débat, ce produit va marcher, s’exporter hors du Burkina. Nous avons des partenaires asiatiques qui sont déjà intéressés », affirme-t-il.