18/02/18

Les mégadonnées, outil de résilience des entreprises

Sipen 2018
Une vue des panélistes, lors du 8e Salon international des professionnels de l'économie numérique (SIPEN) à Dakar - Crédit image: SDN/Bilal Taïrou

Lecture rapide

  • D'ici à 2020, les mégadonnées généreront 210 milliards de dollars de revenus
  • L'Afrique doit se préparer, sur les plans technologique et juridique, à cette révolution
  • Les experts appellent le continent à investir massivement dans les infrastructures et les compétences

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Des experts réunis lors du Salon international des professionnels de l’économie numérique (SIPEN) [1] à Dakar, appellent les gouvernements africains à créer une masse critique de spécialistes en science des données, pour préparer le contient à faire face à l'une des plus grandes révolutions du XXIe siècle.

En marge de la troisième édition du SIPEN, qui s’est tenue les 13 et 14 février, des experts africains en nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) ont axé leurs discussions sur les mégadonnées (big data) et les opportunités inouïes qu’elles offrent aux entreprises africaines.

L’International data corporation (IDC) estime le chiffre d’affaires que générera le big data en 2020 à 210 milliards de dollars [2] et chaque personne produira par seconde 1,7 méga bytes de données [3].

De façon plus pratique, cela est l’équivalent d’une chanson au format mp3 toutes les deux secondes, par personne.

Par ailleurs, selon une étude récente de Gartner, il existe déjà plus d’objets connectés que d’hommes sur terre, depuis 2017 [4].

Ce débat, qui s’inscrit dans la droite ligne du thème principal du Salon ("transformation digitale, socle de l’émergence des économies africaines") a été le lieu de définir le big data et son environnement et surtout de voir comment les entreprises africaines pourraient en tirer un meilleur parti.

Encore appelé mégadonnées, le big data est une "boîte à outils" qui permet d’aborder les problématiques autour de la donnée sur trois axes principaux que sont la volumétrie, la vélocité et la variété, et surtout d’arriver à créer de la valeur à partir de ces données", estime Sandéné Ndao, responsable mégadonnées à la Société nationale des télécommunications du Sénégal (Sonatel).

Mohamed Moustapha Diouf, docteur en informatique et promoteur de la startup Baamtu, une entreprise de services et d'ingénierie en informatique, indique pour sa part que "le big data est un ensemble de savoir-faire pour collecter, stocker et analyser des données volumineuses, véloces et variées, afin d’en tirer de la valeur."
 
"Toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, peuvent aujourd’hui exploiter les mégadonnées, pour être plus proches de leurs clients et mieux les connaître, afin d’améliorer en permanence l’expérience client", estime Gerlix Bienvenu Adankon, gestionnaire principal à Rightcom, une startup de l’écosystème technologique du Bénin.

Modou Khaya, directeur IT et big data à Expresso Sénégal, renchérit pour sa part en expliquant comment "avec le big data, l’on peut mieux identifier et connaître le client, afin d’entreprendre à son endroit des actions ciblées à l’instar d’un sniper."

Les experts estiment que cette technologie s’impose aujourd’hui à toutes les entreprises, y compris les PME, qui peuvent s’en servir à l’heure où les coûts d’acquisition de nouveaux clients ne cessent de croître, du fait de leurs désirs sans cesse changeants, pour diminuer leur taux d’attrition et ainsi, augmenter leur résilience sur un marché mondial en mutation constante.

Mieux, "le big data est source d’innovations", ajoute Pascal Uriel Elingui, spécialiste en science des données, avant de déplorer que "malheureusement en Afrique, force est de constater que le big data est encore à l’étape embryonnaire, en raison du manque de compétences, d’infrastructures et d’intérêts de la part des entreprises."

Faut-il le rappeler, le big data est à l’origine de la plupart des technologies qui révolutionnent le monde de nos jours, telles que le cloud computing, l’intelligence artificielle, le machine learning, la blockchain, le NLP (Natural Language Processing ou Traitement automatique du langage naturel, en français) et qui gravitent toutes autour de lui.

Règlementation

En dépit des nombreuses opportunités qu’offre le big data, certains intervenants ont soulevé des obstacles juridiques et sécuritaires.

Abdoullah Cissé, professeur de droit à l'université Cheikh Anta Diop de Dakar, remarque en effet que "le big data s’est développé et a pris une ampleur extraordinaire.

Les États africains n’étaient pas préparés à cela et s’étaient contentés de légiférer sur le strict minimum, à savoir ce qui relève du commerce électronique, de la protection des données personnelles et de la lutte contre la cybercriminalité."

"Aujourd’hui, le big data a pris des proportions tellement importantes, que le vide juridique commence à se faire ressentir et c’est comme si l’on naviguait dans une sorte de paradis pénal", poursuit-il.

L’intéressé appelle donc à utiliser le big data avec intelligence, en ayant une vision prospective à très long terme autour de l’économie de la donnée et de son positionnement au centre du système éducatif et scientifique, et exprime surtout le besoin de "réguler les données publiques numériques et la question des algorithmes qui leur sont appliqués et de mettre à jour les textes de droit pénal sur la cybercriminalité et sur la protection des données".

"Bien utiliser le big data, c'est le faire avec intelligence, c'est savoir ce qu'on veut et où on va avec […] Nous subissons aujourd'hui les politiques des autres et c'est ce que j'appelle l'antichambre de la cyber-colonisation", conclut l'orateur.