16/03/15

L’approche pluridisciplinaire plus efficace contre le paludisme

Africa men
Crédit image: Flickr/EU Humanitarian Aid and Civil Protection

Lecture rapide

  • Des chercheurs se sont réunis la semaine dernière à Cotonou au Bénin
  • On peut mieux communiquer avec les communautés pour contrôler la maladie
  • Le paludisme touche 207 millions d’individus dans le monde, dont 80% en Afrique.

Envoyer à un ami

Les coordonnées que vous indiquez sur cette page ne seront pas utilisées pour vous envoyer des emails non- sollicités et ne seront pas vendues à un tiers. Voir politique de confidentialité.

L’intégration de plusieurs disciplines dans les programmes de lutte contre les maladies parasitaires, porte de plus en plus de fruits en Afrique subsaharienne, disent des chercheurs.

Tous impliqués dans les programmes de recherche et de lutte contre les maladies transmissibles, ils se sont retrouvés du 12 au 14 mars dernier à Cotonou au Bénin, à l’occasion d’un symposium international sur la lutte contre les maladies parasitaires en Afrique subsaharienne.

Les échanges leur ont permis de faire le point sur l’état des recherches et de confronter les résultats obtenus dans la lutte contre ces maladies, et en particulier le paludisme.

Les participants sont unanimes à reconnaître que la collaboration entre les chercheurs de diverses disciplines a  déjà permis d’obtenir des acquis dans la lutte contre le paludisme.

A l’ouverture de la rencontre, le ministre béninois de la Santé, Dorothée Akoko Kindé-Gazard, s’est d’ailleurs réjouie de ce que l’intégration des chercheurs permet de mieux coordonner et mettre en œuvre les activités de recherche sur le paludisme et d’obtenir des résultats encourageants.

Elle fait remarquer que si par le passé, les chercheurs travaillaient de manière éparse, sans une mise en commun du fruit de leurs trouvailles, les choses ont changé aujourd’hui et plusieurs acteurs réfléchissent et mettent en œuvre ensemble, du début jusqu’à la fin, des programmes de recherche et de lutte contre le paludisme.

"Cette démarche est cruciale pour assurer l’efficacité des programmes de lutte antipaludique", a déclaré Martine Audibert, économiste de la santé et professeur à l’université d’Auvergne (France).

Pour cette dernière, les praticiens de la santé ne doivent pas être les seuls à être impliqués dans la lutte contre les maladies parasitaires.

“Il est connu maintenant que la maladie n’est pas seulement une réalité biomédicale. Ne pas être en bonne santé peut être l’absence de bien-être moral et psychique.”

Sylvain Landry Faye, anthropologue sénégalais

" Bien sûr, ce sont les médecins et les épidémiologistes qui savent quels sont les moyens de lutte contre ces maladies ; mais on doit aussi associer les autres disciplines des sciences humaines et sociales", martèle-t-elle.

Pour Sylvain Landry Faye, anthropologue à l’Université Cheik Anta Diop de Dakar au Sénégal, "il est connu maintenant que la maladie n’est pas seulement une réalité biomédicale. Ne pas être en bonne santé peut être l’absence de bien-être moral et psychique".

Ce qui implique dès lors une collaboration entre les anthropologues, les sociologues, les psychologues et les médecins pour arriver à contrôler, éliminer ou lutter contre les maladies.

Déjà, dans beaucoup de pays, anthropologues et spécialistes de diverses autres disciplines travaillent avec les médecins pour permettre que les mesures de lutte contre les maladies puissent tenir compte des besoins et des comportements des populations.

Selon Achille Massougbodji, Directeur du Centre d’étude et de recherche sur le paludisme associé à la grossesse et à l’enfance (CERPAGE) au Bénin, ces actions ont permis "la mise en place de nouveaux médicaments et de nouvelles stratégies pour utiliser les anciens médicaments de façon à leur garder une certaine efficacité".

La conjugaison des actions des chercheurs a permis d’avoir aussi de nouveaux outils de lutte anti-vectorielle, de nouveaux insecticides pour répondre à la résistance du parasite contre le médicament et contre les insecticides.

A titre d’illustration, "l’on sait par exemple que nous partageons un certain nombre d’insecticides avec le monde agricole, notamment dans les zones de culture de coton. Les études qui sont aujourd’hui faites, montrent qu’il y a nécessité d’une utilisation différente de ces insecticides ; sinon une résistance accrue des moustiques représente un danger pour l’avenir", rapporte Achille Massougbodji.

En effet, "l’innovation thérapeutique que proposent les médecins ne peut être valable que si elle est acceptée, reçue et intégrée par les communautés. Si on comprend mieux comment les gens reçoivent les outils, on peut mieux les adapter ; on peut aussi mieux communiquer avec les communautés pour arriver à contrôler la maladie", indique Sylvain Landry Faye.

Hamma Maiga, doctorant en parasitologie entomologie médicale à la "Malaria Research and Training Center" de Bamako (Mali), raconte à ce titre l’expérience de l’échec d’une campagne de distribution de moustiquaires aux habitants d’un village de la région de Sikasso (Mali) pour qui la moustiquaire est associée à la mort et ne peut être utilisée par une personne vivante.

Touchant 207 millions de personnes sur la planète chaque année, le paludisme est la première maladie parasitaire au monde avec 80 % de cas en Afrique.