08/07/22

L’Afrique “doit renforcer la surveillance” pour stopper la variole du singe

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Des représentants communautaires sensibilisant à la santé publique rendent visite à une famille dans la périphérie de Beni en RDC.. Crédit image: World Bank / Vincent Tremeau, CC BY-NC-ND 2.0

Lecture rapide

  • Près de 109 cas de variole du singe ont été confirmés en Afrique subsaharienne
  • La sensibilisation du public sur la transmission de la maladie doit être améliorée, disent les experts
  • Un accent doit être mis sur les mesures de surveillance, de prévention et de contrôle

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Des experts affirment que les gouvernements africains doivent concentrer leurs investissements sur leurs systèmes de surveillance et sur le renforcement de la préparation pour freiner la propagation rapide de maladies infectieuses comme la variole du singe.

Cette maladie se propage rapidement dans des pays du monde entier où il n’a jamais été vu auparavant et s’installe dans des pays africains, dont certains sont aux prises avec elle depuis des décennies.

« Pour une maladie spontanément résolutive qui se transmet par contact direct et étroit, nous devons nous concentrer sur une bonne surveillance avec un laboratoire de diagnostic fiable et efficace, l’isolement des cas confirmés et l’application de mesures efficaces de prévention et de contrôle des infections », déclare Oyewale Tomori, professeur de virologie à l’université Redeemers au Nigéria et membre du conseil de direction du Global Virome Project.

“Sitôt après les inégalités que l’Afrique a connues en ce qui concerne la réponse à la COVID-19, nous ne pouvons nous permettre aucune répétition potentielle et devons être correctement préparés”

Matshidiso Moeti, directrice OMS Afrique

La variole du singe est une maladie virale qui présente des symptômes pseudo-grippaux avant que les patients ne développent une éruption cutanée douloureuse, des lésions et des ganglions lymphatiques enflés.

La période d’incubation entre l’exposition et l’apparition des premiers symptômes varie de cinq à 21 jours, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Selon un communiqué de presse de l’OMS Afrique daté du 30 juin 2022, « à la date du 28 juin, 1 821 cas de variole du singe ont été notifiés par 13 pays sur le continent. Parmi ces cas notifiés, 109 ont été confirmés en laboratoire dans neuf pays. Le nombre de cas confirmés sur le continent représente 2 % des plus de 4 500 cas confirmés dans le monde. »Lors d’une conférence de presse le 16 juin, Matshidiso Moeti, directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique, avait déjà affirmé que « il y a eu 36 cas confirmés au Nigeria, 10 en République démocratique du Congo, huit en République centrafricaine, trois au Bénin et au Cameroun, et deux en République du Congo ».

Le Ghana compte désormais cinq cas de virus, tandis que le Maroc en a un. Ces deux pays étaient exempts de la variole du singe avant la présente épidémie, selon l’OMS. À l’échelle mondiale, la maladie s’est propagée rapidement depuis début mai dans des pays où le virus n’avait pas été vu auparavant.

« C’est clairement une situation inhabituelle qui touche de plus en plus de pays. Sitôt après les inégalités que l’Afrique a connues en ce qui concerne la réponse à la COVID-19, nous ne pouvons nous permettre aucune répétition potentielle et devons être correctement préparés », a déclaré Matshidiso Moeti.

Elle a ajouté que des investissements étaient nécessaires pour renforcer les systèmes de surveillance dans de nombreux pays africains afin de permettre une détection précoce et rapide des maladies infectieuses comme la variole du singe et de déclencher des actions pour prévenir leur propagation rapide.

Incohérence

Le ministère ougandais de la Santé affirme avoir renforcé la surveillance, bien que le pays n’ait pas encore enregistré de cas de cette maladie.

« Le ministère de la Santé travaille en étroite collaboration avec des partenaires pour surveiller l’évolution de la situation de l’épidémie de la variole du singe dans différentes parties du monde », affirme Henry Mwebesa, directeur général des services de santé du pays, dans un communiqué publié le lundi 6 juin.

Ce dernier ajoute que le gouvernement avait renforcé les capacités de test de l’Institut ougandais de recherche sur les virus pour diagnostiquer avec précision la maladie.

Au Nigéria, Dimie Ogoina, professeur de médecine à l’université du Delta du Niger, déclare que des cas ont été signalés de manière inexacte, en particulier dans la sous-région ouest-africaine.

Par exemple, alors que le Nigeria Center for Disease Control signale 21 cas dans le pays depuis janvier, l’OMS évalue le chiffre entre janvier et avril à 36.

Dimie Ogoina attribue cette incohérence au « défi de la surveillance » et à un système de santé profondément fracturé.

« Les défis auxquels nous sommes confrontés dans nos systèmes de santé sont très profonds et de grande envergure. Je ne dirais pas que nous avons relevé tous les défis car, parfois quand on a un gros problème, même si on fait beaucoup d’efforts, tant que le problème est très gros, l’effort ne se voit pas », dit-il.

Il reconnaît au passage certaines améliorations et indique que le gouvernement nigérian a pris des mesures pour résoudre certains des problèmes.

« Un exemple typique, avant la COVID-19, est que nous n’avions que quatre laboratoires qui pouvaient faire un diagnostic de la COVID-19, voire trois. Mais maintenant, en raison de l’investissement résultant de COVID-19, presque tous les États peuvent établir un diagnostic de la COVID-19.

Vaccins

A l’heure actuelle, de nombreux pays africains ne disposent pas d’installations capables de diagnostiquer la variole du singe.

En Ouganda, Henry Mwebesa soutient que le gouvernement a renforcé les capacités de test de l’Institut ougandais de recherche sur les virus pour lui permettre de diagnostiquer avec précision la variole du singe.

Dimie Ogoina indique, pour sa part, que seul le laboratoire national peut diagnostiquer la variole du singe au Nigeria.

« Beaucoup d’investissements sont nécessaires ainsi qu’une sensibilisation du public parce que les gens ne comprennent pas pleinement les maladies infectieuses et comment elles se transmettent », dit-il. « C’est pourquoi nous avons beaucoup de mythes et d’idées fausses lorsque ces maladies apparaissent. »Comparée à la variole, la variole du singe a un taux de mortalité relativement faible, la souche ouest-africaine du virus ayant un taux de mortalité inférieur à 4 %. Mais le vaccin contre la variole est efficace contre le virus de la variole du singe.

Bien que l’OMS dispose d’un stock de vaccins contre la variole auquel les pays ont accès, la première étape ne devrait pas être de « appuyer sur la pédale des vaccins », déclare Oyewale Tomori.

« En ce qui concerne le vaccin, l’un des vaccins antivarioliques les plus récents et les plus sûrs a été approuvé pour la prévention de la variole du singe. Bien que nous ne recommandions pas la vaccination de masse à ce stade, nous devons nous assurer que nous sommes prêts en cas de besoin », indique Matshidiso Moeti.

Oyewale Tomori pense que l’Afrique n’avait pas besoin d’attendre l’OMS, l’Union européenne ou le Royaume-Uni pour prendre des mesures positives « en cas d’épidémie d’une maladie endémique en Afrique ».

« Nous avons la variole du singe depuis 1970, pourquoi attendons-nous jusqu’à maintenant pour nous inquiéter ou prendre les mesures de prévention et de contrôle appropriées ? » s’interroge-t-il.

La version originale de cet article a été produite par l’édition de langue anglaise de SciDev.Net pour l’Afrique subsaharienne.