27/08/15

Harmoniser les politiques du secteur minier

Generic Mine
Crédit image: Flickr/Jbdodane

Lecture rapide

  • Une directive, adoptée depuis 2009, fait ses preuves en Afrique de l’Ouest
  • Elle renforce les capacités de négociation des Etats face aux compagnies minières
  • Elle garantit une meilleure prise en compte des intérêts des communautés locales

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Un atelier sur les processus de révision des codes miniers du Burkina Faso et du Sénégal s’est ouvert ce mercredi 26 août 2015, à Dakar.
 
C’était l’occasion pour l’ONG Oxfam, organisatrice de l’atelier, de saluer l’adoption par la CEDEAO (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest), depuis 2009, d’une directive portant harmonisation des principes directeurs et des politiques dans le secteur minier.
 
L’un des objectifs de cette directive, consignés dans son article 2, est de "promouvoir les droits de l’homme, la transparence et l’équité sociale et de garantir la protection des communautés locales et de l’environnement dans les zones minières de la sous-région".
 
"L’idée, c’est d’harmoniser le contexte légal et d’avoir des pays qui ont une législation commune ou au moins un cadre normatif qui soit commun aux Etats de la sous-région", explique Nadine Koné, coordinatrice régionale des politiques des industries extractives chez Oxfam, à Dakar.
 
"Ainsi, la directive donne les grands principes de gouvernance du secteur, que les pays membres doivent adopter et faire refléter dans leurs législations nationales", précise-t-elle
 
A partir de ce moment, poursuit-elle, "les compagnies minières ne peuvent plus s’appuyer sur la concurrence entre les pays pour imposer leurs conditions et elles ne peuvent plus non plus forcer la main à certains pays qui seraient dans une situation de faiblesse dans le processus de négociation."

“Si tous les pays sont au même niveau en termes de standards, de normes et de législations, les compagnies se trouveraient dans l’obligation de respecter ces normes, quel que soit le pays où elles opèrent.”

Nadine Koné
Coordinatrice régionale des politiques des industries extractives chez Oxfam, à Dakar

"Donc, si tous les pays sont au même niveau en termes de standards, de normes et de législations, les compagnies se trouveraient dans l’obligation de respecter ces normes-là, quel que soit le pays où elles opèrent. Et les pays eux-mêmes se trouveraient en position de force et pourraient négocier ensemble face à ces compagnies", conclut Nadine Koné.
 
Un cas pratique ici est le Burkina Faso qui est cité en exemple au cours de cet atelier, pour avoir réussi le processus de révision de son code minier, en y mettant en exergue des aspects relatifs au développement local.
 
Selon les participants à cet atelier, ce code prévoit par exemple que dans le cadre du fonds de développement local, les compagnies minières reversent chaque année 1% de leur chiffre d’affaires directement aux communautés au sein desquelles elles opèrent.
 
"Si vous prenez un pays comme le Burkina Faso, il y a au moins 11 compagnies minières d’origine canadienne en plus de celles qui sont originaires d’autres pays. Si chacune des compagnies réalise un chiffre d’affaires de 100 milliards de FCFA et reverse un milliard aux communautés, cela vaut beaucoup mieux que rien", illustre Demba Seydi, associé de programme Industries extractives chez Oxfam, en réponse à ceux qui estimeraient que le pourcentage de 1% est résiduel.

 

Développement local

 
Quoi qu’il en soit, le cadre normatif de la CEDEAO fait son bonhomme de chemin ; puisque comme le Sénégal, le Mali aussi est en voie de réviser son code minier, avec une participation active de tous les acteurs, et en particulier de la société civile.
 
"Au Mali, le code de 2012 parle de développement local, de la responsabilité sociale des entreprises qui doit être exercée au niveau des sites miniers", témoigne Tiémoko Souleymane Sangaré, directeur exécutif de la Fondation pour le développement au sahel (FDS).
 
Et il poursuit : "actuellement, dans la politique au Mali, il y a la patente qui est une taxe locale entièrement reversée aux communautés ; la commune ayant 60% de cette taxe. Dans ce cas, vous avez une petite commune qui peut recueillir le milliard par an".
 
Pourtant, malgré ces avantages, la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC) n’est pas jusqu’ici parvenue à mettre en place un tel cadre normatif, à la grande déception de la société civile.
 
"La CEEAC a voulu reproduire le modèle de la CEDEAO ; mais, le processus s’est heurté à la résistance des pays membres de la CEMAC (Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale) qui ne se sont pas pour le moment montrés intéressés par le processus. L’initiative est actuellement paralysée et la CEEAC n’en parle plus ; même si la société civile pense toujours qu’une directive régionale devrait encadrer les lois nationales", indique Soumaine Adoum, acteur de la société civile au Tchad.
 
Mais, à Oxfam, on ne perd pas espoir et Nadine Koné fait remarquer que même au niveau de la CEDEAO, le processus n’a pas été facile.
 
"C’est un processus de longue haleine qui a fini par aboutir en 2009 avec l’adoption de la directive ; l’objectif ultime étant d’avoir un code régional ; mais, nous n’y sommes toujours pas. Nous sommes donc toujours dans le processus d’obtention d’un instrument beaucoup plus coercitif", rassure-t-elle.