10/07/15

Les énergies renouvelables, la nouvelle panacée

Energie eolienne
Crédit image: Flickr/Warrenski

Lecture rapide

  • Le potentiel du continent vaut 18 fois la production d’énergie hydroélectrique
  • Plusieurs pays ont déjà pris des dispositions pour développer l’énergie verte
  • La part des énergies renouvelables en Afrique passera de 17% en 2009 à 50% en 2030

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Au regard de l’orientation générale de la réponse aux problèmes de déficit d’énergie électrique en Afrique, il apparaît que l’écrasante majorité des acteurs privilégient une solution qui passe en bonne partie par les énergies renouvelables.

Au-delà de la lutte contre le réchauffement climatique, cette option peut s’expliquer par le potentiel du continent africain en matière d’énergie renouvelable.

Selon les chiffres de l’Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA), le potentiel de l’Afrique en termes d’énergies renouvelables est ainsi estimé en 2012 à environ 1 844 térawattheures (TWh), soit 18 fois la production d’hydroélectricité du continent en 2009.

Cette évaluation prend en compte l’énergie hydroélectrique, l’énergie géothermique, l’énergie éolienne et l’énergie solaire.

Mais, selon une étude réalisée par Proparco, filiale de l’AFD dédiée au secteur privé, ce potentiel est inégalement réparti sur le continent.
A titre d’exemple, indique cette étude, 87% des ressources éoliennes de haute qualité sont situées dans les zones côtières de l’est et du sud. La ressource y est décrite comme l’une des meilleures au monde.
 

Quant à l’énergie solaire, "elle est abondante et elle est mieux répartie sur l’ensemble du continent", constate ce rapport produit en 2014.

Quoi qu’il en soit, "soutenu par des politiques publiques adéquates et par la réduction continue des coûts de production, le solaire photovoltaïque pourrait jouer un rôle très important dans l’approvisionnement énergétique de l’Afrique d’ici 2030, avec des estimations comprises entre 15 GW et 62 GW", notent les auteurs de cette étude, citant un rapport conjoint EREC/Greenpeace, datant de 2010.

L’ennui c’est que pour l’instant, en dehors de l’énergie hydroélectrique, l’exploitation des autres formes d’énergie renouvelable est essentiellement effectuée par le secteur privé.

"De nombreux projets d’énergie renouvelable sont en cours de développement et ils sont le plus souvent soutenus par des producteurs indépendants. Ainsi, 98 % des capacités solaires (64% hors Afrique du Sud) et plus de 90% des MW éoliens en phase de développement émanent de producteurs privés", confirment Grégor Quiniou, Astrid Jarrousse et Stéphanie Mouen, les auteurs de l’étude de la Proparco.
 
Faibles coûts d’exploitation

Parmi les facteurs qui expliquent cette situation, les différents acteurs pointent du doigt le fait que les énergies renouvelables sont perçues généralement comme étant chères.

En effet, elles se caractérisent par leurs coûts de développement et d’investissement très importants ; mais, qui sont compensés en quelque sorte par des coûts d’exploitation "très faibles".

Pour ne rien arranger, la rentabilité de tels projets n’est souvent retrouvée que sur une période de 15 à 20 ans, alors que dans le même temps, les énergies fossiles bénéficient de mécanismes de subvention qui masquent un coût réel beaucoup plus élevé.

“Un solide réseau de transmission électrique reliant l’est au sud permettrait de transporter de l’électricité propre et à faible coût depuis les régions où elle est produite en abondance vers les régions de forte demande.”

IRENA

Pour autant, une série de cinq études menées par l’IRENA en 2012 "montrent que le coût moyen actualisé de l’électricité est en baisse pour les énergies éolienne, solaire photovoltaïque et thermique à concentration, ainsi que pour certaines technologies à base de biomasse. L’option la moins chère pour générer de l’électricité reste la production d’énergie hydraulique durable sur des sites favorables".
 
Ces études concluent que "de manière générale, les technologies des énergies renouvelables deviennent de plus en plus compétitives face aux combustibles fossiles."
 
On comprend dès lors pourquoi de plus en plus d’Etats du continent prennent des dispositions pour développer la production d’énergie à partir de sources renouvelables.
 
C’est, par exemple, depuis 1997 que le Mozambique a créé un Fonds soutenant les meilleures pratiques d’électrification rurale. Ce fonds a permis de mettre en œuvre des projets éoliens, hydroélectriques et solaires qui fournissent de l’électricité aux localités reculées.
 
En 2008, "le gouvernement tanzanien a adopté une nouvelle loi sur l’électricité, ouvrant le marché jusqu’alors réservé à la compagnie nationale d’électricité et fixant des accords et des tarifs d’achat d’électricité standardisés, afin de réduire les coûts de transaction", indique l’IRENA.
 
Le résultat est que depuis l’entrée en vigueur de cette nouvelle loi, des accords d’achat d’énergie ont été passés avec de petits producteurs d’électricité à partir de l’énergie renouvelable pour 40 MW susceptibles d’alimenter 54 000 foyers.
 

Au Maroc, un nouveau cadre pour le déploiement de l’énergie renouvelable a été mis en place en 2010, avec comme objectif pour cette catégorie un total de 20% de l’énergie produite dans le pays d’ici 2020, soit 2 000 MW.

Djibouti pour sa part a rendu public au mois de juin dernier son projet d’être alimenté à 100% par l’énergie verte dès 2020.
 
Selon le document intitulé "Djibouti Renewables Readiness assesment", l’objectif d’atteindre 100% d’énergie renouvelable en 2020 pourrait être atteint prochainement par Djibouti, avec le développement en cours de son potentiel géothermique, éolien et solaire, ajouté à l’apport de l’énergie hydraulique en provenance de la ligne d’interconnexion électrique avec l’Ethiopie.
 

A l’échelle supranationale, la conférence des chefs d’Etats et de gouvernements de l’Union africaine a décidé en 2009 et en 2010 d’encourager le développement des énergies renouvelables sur le continent.

Projections
 
En 2011, 46 chefs d’Etats et 25 ministres de l’énergie du continent ont même adopté la déclaration d’Abu Dhabi, qui prône une plus grande utilisation des énergies renouvelables.
 
Cet engagement des dirigeants amène l’IRENA à faire une projection sur la place qu’occuperont les énergies renouvelables en Afrique dans les années à venir.
 
"Le scénario estime que la part des énergies renouvelables en Afrique peut passer de 17% en 2009 à 50% en 2030 et à près de 75% d’ici 2050", indique un rapport de cette organisation datant de 2013.
 

Le document ajoute que "la production électrique provenant de ces sources passerait de 28 GW en 2010 à 800 GW d’ici 2050, avec 245 GW générés à partir du solaire photovoltaïque, 242 GW de l’hydroélectricité, 94 GW de l’énergie solaire thermique à concentration, 69 GW de la biomasse et 8 GW de l’énergie géothermique".

Ce scénario s’appuie sur des données disponibles et des initiatives prises dans certains pays ou dans certaines régions.
 
C’est l’exemple du corridor énergétique propre de l’Afrique de l’est et australe : ce programme vise à favoriser la croissance et la sécurité énergétiques grâce à un prix «  ompétitif ». Il concerne l’Ethiopie, le Kenya et la Tanzanie qui ont identifié environ 15 GW de potentiel géothermique et 40 GW de potentiel hydroélectrique, et 8 GW de potentiel éolien, tous à faible coût.
 
"Le prix de cette énergie est intéressant : de 0,03 à 0,08 dollar pour l’hydroélectricité produite à grande échelle, de 0,05 à 0,10 dollar pour l’énergie géothermique et de 0,05 à 0,14 dollar pour l’énergie éolienne, alors que la fourchette de prix de l’électricité est de 0,06 à 0,17 dollars en Afrique de l’Est et de 0,13 à 0,16 dollars dans la plupart des pays de l’Afrique australe", fait valoir l’IRENA.
 
L’institution ajoute qu'un "solide réseau de transmission électrique reliant l’est au sud permettrait de transporter de l’électricité propre et à faible coût depuis les régions où elle est produite en abondance vers les régions de forte demande, ainsi que de réduire la dépendance vis-à-vis des combustibles fossiles".
 

Parmi les autres projets qui sous-tendent ce scénario, il y a la production d’’énergie propre à partir de sous-produits de l’industrie (Île Maurice), la production d’eau chaude à partir de l’énergie solaire (Afrique du Sud), la production du biogaz et des engrais à partir des déchets issus des abattoirs (Nigeria), la production de l’électricité par la combustion du bagasse (Kenya), ou encore des fourneaux améliorés (Niger et Mali) ; mais également des serres à énergie géothermique (Kenya)…

Tout cela en addition aux grands projets hydroélectriques arrêtés dans le Programme de développement des infrastructures en Afrique (PIDA) (voir tableau).

Source : IRENA – GW = gigawatts – MW = mégawatts
Nom du projet  Localisation Capacité
Projets d’énergie hydroélectrique Inga RDC 43,2 GW
Grand barrage de la Renaissance Ethiopie 5,25 GW
Projet des Gorges de Batoka Zambie
Zimbabwe
1,6 GW
Projet Mphanda-Nkuwa Mozambique 1,5 GW
Phase II du projet hydraulique des Hauts plateaux du Lesotho Lesotho 1,2 GW
Projet Ruzizi III Rwanda 145 MW
Kaleta II Guinée 117 MW
Projet Sambangalou Gambie 64 MW
Poursuite du développement des chutes du Rusumo Tanzanie, Rwanda et Burundi 61 MW

Cet article appartient au Dossier spécial sur le déficit énergétique en Afrique.