22/01/20

Nouveau mode de prévention contre Ebola

Ebola Butembo
Des agents de santé transportant un patient à Butembo, en RDC. Crédit image: MSF/John Wessels.

Lecture rapide

  • Du 1er août 2018 au 14 janvier 2020, 2 236 décès ont été enregistrés, soit 66% des cas confirmés
  • Ces chiffres ne prenant pas en compte les zones d’insécurité, la situation réelle pourrait être plus grave
  • Pour la Wildlife Conservation Society, surveiller la mortalité des singes aiderait à prévenir les épidémies

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Dans un point de la situation publié le jeudi, 16 janvier 2020 sur l’épidémie d’Ebola qui se poursuit en République démocratique du Congo (RDC), l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) indique que 3 406 cas (dont 3 288 cas confirmés et 118 cas probables) de maladie ont été répertoriés entre le 1er août 2018, date de la déclaration de l’épidémie, et le 14 janvier 2020.
 
Selon le communiqué de presse publié à cette occasion, 2 236 décès suite à la maladie ont été enregistrés ; ce qui fait un taux de mortalité de l’ordre de 66%.
 
Mais, pour la seule période allant du 25 décembre 2019 au 14 janvier 2020, on a enregistré 40 cas confirmés pour 36 décès. Ce qui représente un taux de mortalité de 90%. 

“La détection précoce du virus Ebola circulant dans la faune sauvage permettrait de prendre des mesures pour empêcher le passage de la maladie de la faune sauvage à la population humaine locale”

Sarah Olson, directrice associée, Wildlife Conservation Society

La situation réelle pourrait cependant être bien plus grave ; car, dit le communiqué, « plusieurs zones de santé sont difficiles à atteindre en raison de l'insécurité, à l’instar de la zone de santé de Mandima, où des rumeurs font état de plusieurs décès dans l’aire de santé de Lwemba ».
 
Pour l’OMS, « la poursuite des efforts de réponse dans les zones de santé actives, y compris dans les régions d'insécurité, et la prévention de la réintroduction de la maladie dans les zones de santé avec des populations denses où la maladie a déjà été éliminée, sont cruciales pour stopper la transmission ».
 
De son côté, la Wildlife Conservation Society (WCS) fait savoir que la surveillance communautaire des carcasses d'animaux sauvages est essentielle pour la prévention de la maladie en Afrique centrale. 

 

Dans une étude publiée en août 2019 dans la revue Philosophical Transactions de la Royal Society B., les chercheurs de cette institution affirment que le gorille des plaines occidentales du Congo voisin est classé en danger critique d'extinction et le chimpanzé en danger d'extinction en partie à cause d'Ebola.
 
Ladite étude est partie d’un postulat selon lequel « la tendance passée des épidémies de virus Ebola au Congo montre qu'elles ont été précédées par de grands événements de mortalité de la faune », à en croire Sarah Olson, directrice associée de la WCS chargée de l'épidémiologie de la faune, et un des auteurs de l’étude.
 

Surveillance

Une étude qui a consisté à mobiliser les membres des communautés (chasseurs-cueilleurs, gardes forestiers du parc, personnel de projet affilié au WCS etc.) pour former un réseau de surveillance afin de signaler aussitôt d’éventuelles carcasses de grands singes et de mammifères à une équipe d'intervention qualifiée qui procède ensuite à des analyses.
 
Le programme qui a atteint plus de 6 600 personnes dans les régions rurales du nord du Congo et qui couvre une superficie d'environ 50 000 km² a rapporté 58 carcasses.
 
« Nous n'avons détecté le virus Ebola dans aucune des carcasses pendant cette période et aucun cas humain d'Ebola n'a été signalé non plus », observe Sarah Olson.
 
Interviewée par SciDev.Net, cette dernière ajoute que « les informations que nous avons en main suggèrent que le Congo est plus disposé à détecter une épidémie de virus Ebola chez les grands singes avec la surveillance des carcasses que sans surveillance ».
 
« La détection précoce du virus Ebola circulant dans la faune sauvage permettrait de prendre des mesures pour empêcher le passage de la maladie de la faune sauvage à la population humaine locale », analyse Sarah Olson. 

Dans le communiqué de presse accompagnant la publication de cette étude, Eeva Kuisma, coordinatrice du programme de santé de la WCS au Congo, affirme d’ailleurs que « la multitude de défis auxquels fait face l'épidémie actuelle d’Ebola en République démocratique du Congo (RDC) met en évidence la valeur de la détection précoce, de la prévention et de l'éducation proactives ».
 

Sensibilisation

Aussi le message de sensibilisation envoyé aux communautés dans ce programme est-il d’éviter de toucher, encore moins de consommer des animaux malades ou trouvés morts en forêts. Car, il se pourrait qu’ils soient infectés.
 
Yap Boum II, professeur et chercheur à la faculté de médecine de l’université de Yaoundé I (Cameroun), qui a participé à plusieurs travaux sur le virus Ebola, appelle en outre à se méfier d’animaux comme la chauve-souris.
 
« Les chauves-souris seraient à l'origine de l'épidémie d'Ebola de 2014 ou le premier cas, un enfant, aurait contracté la maladie en jouant sur un arbre creux ou des chauves-souris avaient leur repaire », indique-t-il.
 
« En effet la consommation de ces chauves-souris ou des fruits avec lesquels ils ont été en contact contribue à la transmission du virus Ebola », dit-il dans un entretien avec SciDev.Net.
 
Au total, bien que toutes les épidémies d'Ebola ne soient pas provoquées par des décès d'espèces sauvages, la WCS estime que ce système d'alerte précoce basé sur la surveillance de la mortalité des animaux sauvages renforce la confiance et la sensibilisation et peut aider à éviter de nouvelles épidémies.