18/09/12

Associer la science et les droits de l’homme : faits et chiffres

Les outils comme les TIC peuvent contribuer à la mise en œuvre du droit à l’accès aux connaissances scientifiques. Crédit image: Flickr/IntelFreePress

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Le professeur de théorie politique S. Romi Mukherjee présente les approches de la science, de la technologie et du développement basées sur les droits de l’homme et leurs conséquences sur l’élaboration des politiques et sur la pratique.

Une approche de la science, de la technologie et du développement fondée sur les droits humains place le respect des droits de l’homme au cœur des stratégies mises en œuvre par la communauté internationale pour relever les défis mondiaux. Le concept des droits de l’homme est entré dans le lexique des Nations Unies en 1997, avec l’appel lancé par Kofi Annan pour les intégrer dans les missions, la gestion, et les méthodologies de développement et de coopération internationale employées par cette organisation.

Le Programme des Nations Unies pour le développement définit cette approche comme celle « menant à des résultats meilleurs et plus durables à travers l’analyse et la correction des inégalités, des pratiques discriminatoires et des relations de pouvoir injustes, qui constituent souvent le nœud des problèmes de développement. Elle place au cœur du débat national sur le développement les droits humains des peuples (les ‘détenteurs de droits’) et leurs revendications en la matière, ainsi que les obligations correspondantes de l’Etat (le ‘débiteur d’obligations’), et elle clarifie l’objectif poursuivi par le renforcement des capacités ». [1] Il n’existe cependant pas de définition universellement acceptée de l’approche fondée sur les droits humains. [2]

Ceci n’implique pas forcément qu’il s’agisse d’un concept diffus ou manquant de contenu. Au contraire, il sert de cadre pour résoudre les problèmes de portée mondiale, notamment la lutte contre les préjugés sexistes, la sécurité de l’accès aux aliments et à l’eau, le dévoiement de la science et de la technologie, et il s’appuie sur un ensemble de principes élaborés grâce à un consensus international (voir encadré 1), qui clarifie les liens entre les ‘détenteurs de droits’ et les ‘débiteurs d’obligations’. [3]  

Dryland farmer

La parité des sexes et la sécurité alimentaire sont au nombre des questions dont traitent les principes des droits de l’homme.

Flickr/USAID

De nombreux spécialistes internationaux des politiques de développement soutiennent que les approches fondées sur les droits humains aident à éloigner de la philanthropie professionnalisée les ONG et le système des Nations Unies pour leur permettre de s’atteler au renforcement des capacités. Elles permettent également des interventions durables en réduisant la dépendance à l’égard de l’aide. Enfin, elles contribuent à redéfinir les responsabilités des autorités gouvernementales, des acteurs locaux, des ONG et du système des Nations Unies. [4]

S’agissant de la science et de la technologie, cette approche impose aux scientifiques de dépasser la compréhension des relations existant entre leurs activités et les droits de l’homme, et elle implique un effort de leur part pour protéger et défendre les droits de l’homme par le biais du savoir qu’ils produisent. En créant potentiellement un cadre éthique orientant la recherche à mesure qu’elle évolue, une approche de la virologie fondée sur les droits de l’homme repousserait non seulement les frontières de la médecine en recherchant les avantages médicaux, mais permettrait aussi de se prémunir activement contre le risque de développement de nouvelles armes biologiques. Ici se pose la question de savoir si cette responsabilité échoit aux virologues (par le biais, par exemple, de contributions aux débats autour du problème du double usage) ou à la communauté scientifique en général.

Une approche fondée sur les droits de l’homme affirme également que l’accès à l’information scientifique fait partie des droits humains (article 27(1) de la Déclaration universelle des droits de l’homme, voir encadré 1). [5] Les bienfaits du progrès scientifique doivent donc être partagés ouvertement, sans être soumis à des restrictions de la part de groupes sociaux, d’entreprises ou d’Etats. Avant tout, une approche de la science fondée sur les droits humains vise à instaurer les conditions d’une participation équitable à la communauté scientifique mondiale et un accès équitable à l’information scientifique et aux bienfaits de la science.

En règle générale, une approche fondée sur les droits humains reconnaît que la science est une activité humaine socialement organisée, dotée de connotations axiologiques, et qu’elle est modelée par des structures et des procédures organisationnelles. Elle recherche des stratégies susceptibles de permettre aux gouvernements et autres parties prenantes d’élaborer et de mettre en œuvre des politiques pour garantir la sécurité, la santé et les moyens de subsistance, de tenir compte des besoins et des priorités des populations dans les stratégies de développement et dans celles de protection de l’environnement et enfin d’assurer leur participation à la prise de décisions affectant leurs vies et leurs ressources.

Encadré 1: Textes incluant une approche de la science, du développement et de la technologie fondée sur les droits humains et axés sur leurs principes clefs :

Déclaration universelle des droits de l’homme et des peuples (article 27) : elle proclame le droit de toute personne à prendre part au progrès scientifique et à être protégé contre les dévoiements de la science.

Le droit de jouir des bienfaits de la science est évoqué sous le volet consacré à la vie culturelle et de ce fait, il est souvent examiné sous l’angle des droits culturels., C’est pourtant la Commission mondiale d’éthique des connaissances scientifiques et des technologies (COMEST), organe consultatif indépendant mis en place par l’UNESCO, qui se charge d’évaluer les implications de l’article 27 relatives à l’éthique de la science et de la technologie. [5, 6]

Recommandation de l’UNESCO sur le statut des chercheurs scientifiques – 1974 (article 4) : elle proclame que tous les progrès scientifiques et technologiques doivent être mis au seul service de l’amélioration du bien-être culturel et matériel des citoyens du monde entier. Elle en appelle aux Etats membres pour se doter des mécanismes et des politiques nécessaires au suivi et à la garantie de la réalisation de cet objectif. [7]

Les pays sont exhortés à prouver que la science et la technologie sont partie intégrante de politiques visant à construire une société plus juste et plus humaine. Le suivi de cet objectif est assuré par les Etats membres de l’UNESCO et à travers les réunions semestrielles du Conseil exécutif de l’organisation. En cette année 2012, les Etats membres réévaluent la mise en œuvre de l’article 4 pour une mise à jour de son champ d’application et de son suivi. [8] 

Déclaration de l’UNESCO sur l’utilisation du savoir scientifique – 1999 (article 33) : elle proclame [9], qu’ « [a]ujourd’hui, plus que jamais, la science et ses applications sont nécessaires au développement., A tous les niveaux, les gouvernements et le secteur privé devraient, par le biais de programmes d'éducation et de recherche appropriés, soutenir plus activement la mise en place d'une capacité scientifique et technologique adéquate et équitablement répartie, base indispensable à un développement économique, social, culturel qui soit également respectueux de l'environnement. Cette mesure revêt une urgence particulière pour les pays en développement. » 

Cette Déclaration aborde des questions aussi variées que la production non polluante, l’utilisation rationnelle des ressources, la protection de la biodiversité et la fuite des cerveaux. La Recommandation de 1974 sur le statut de la recherche scientifique est en passe d’être réévaluée de manière plus large afin d’inclure le suivi de cette déclaration. Au nombre des organismes publics et des intervenants qui se chargent de ce suivi et de la mise en œuvre de la Déclaration, l’on compte notamment la COMEST, la Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) et le Conseil international pour la science (ICSU).

Autres instruments pertinents pour les approches de la science, de la technologie et du développement fondées sur les droits humains :

  • Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels (1966) [10]
  • Déclaration sur le progrès et le développement dans le domaine social (1969) [11]
  • Déclaration sur l’utilisation du progrès de la science et de la technique dans l’intérêt de la paix et au profit de l’humanité (1975) [12]
  • Déclaration universelle sur la bioéthique et les droits de l’homme (2005) [13]
  • Déclaration de Dakar (2007) [14]
  • Déclaration du Caire (2006) [15]

 Choc de cultures

L’approche fondée sur les droits humains a ses détracteurs. L’une des critiques les plus acerbes émane des théoriciens du développement et des décideurs politiques du monde en développement, qui attirent l’attention sur les origines eurocentriques et occidentales du concept des droits de l’homme. Une caractéristique qui le place en contradiction directe avec les conceptions religieuses et sociales non européennes du monde. Les autres systèmes de pensée, qui favorisent souvent le holisme et la communauté au détriment de l’individu, remettent en question cette approche. Ils, considérent en effet les appels au respect des droits de l’homme comme une stratégie de plus pour dominer les habitants du monde en développement en imposant des ‘droits’ ‘humains’ et individuels à des cultures qui ont du mal à s’y reconnaître.

Cela étant, devons-nous soutenir une approche qui est remise en question par certains des membres des communautés mêmes auxquelles elle est censée profiter ? Le concept des droits de l’homme découle sans nul doute des réalités sociales politiques très spécifiques de l’Europe du 18ème siècle. Il ne faudrait pas pour autant le balayer d’un revers de la main. Ce serait une erreur d’affirmer par exemple que les campagnes de promotion des droits de l’homme ont eu un impact négligeable dans les zones de conflit, ou de soutenir que les origines eurocentriques des droits humains les privent de toute capacité à induire des changements sociaux positifs.

Au contraire, le défi à relever consiste à explorer en quoi cette approche peut contribuer à la promotion des savoirs locaux et autochtones, comment elle peut permettre le dialogue entre ces convictions concurrentes prétendant chacune à l’universalité, et de quelle manière elle peut aider à jeter des ponts entre les formes traditionnelles de la science et de la technologie et leurs formes novatrices.

 
Kenyan rainmakers

L’on espère que les approches fondées sur les droits humains peuvent établir des liens entre l’innovation scientifique et les connaissances autochtones.

Flickr/DFID – UK Department for International Development

Une approche bidirectionnelle

Il existe une forte corrélation entre la bonne science et le respect des droits de l’homme. Par exemple, les scientifiques s’appuient sur les droits humains pour protéger leur propre liberté scientifique. Et celle-ci, à son tour, leur permet de promouvoir le bien-être et les droits humains à travers leurs activités. [16]

Ajoutons que la science et la technologie peuvent porter gravement préjudice aux systèmes sociaux et écologiques dont la vie est tributaire. Les technologies militaires peuvent ainsi servir à restreindre les libertés et la justice et les nouvelles technologies, comme les nanotechnologies ou la géoingénierie, peuvent même remettre en question la définition de l’humain. Les approches fondées sur les droits de l’homme peuvent mettre en évidence les implications éthiques des nouvelles technologies et permettre à la politique de s’adapter à l’évolution rapide de la science.

D’un autre côté, la science et la technologie contribuent également au développement, voire au respect des droits de l’homme (encadré 2). Cela vaut aussi pour les technologies de l’information et de la communication (TIC) en leur qualité d’outils susceptibles de faciliter l’accès aux connaissances scientifiques. C’est ainsi que les TIC font évoluer rapidement la pratique de la démocratie grâce à la gouvernance électronique et aux réseaux sociaux. [17]. Mais leur utilisation peut aussi être restreinte par la censure et le sous-développement, entraînant des fossés numériques qui engendrent de nouvelles formes d’exclusion. Ce qui montre comment les approches fondées sur les droits humains peuvent sous-tendre les appels à une utilisation équitable et efficace des technologies comme les TIC.

 

Encadré 2 : Questions émergentes : Les technologies géospatiales

L’autre relation qu’entretiennent la science, la technologie et les questions des droits de l’homme tient à l’utilisation des technologies telles que les technologies géospatiales, les images satellitaires et les systèmes de positionnement géographique pour répertorier et suivre les violations des droits de l’homme. Elles permettent l’accès à des régions reculées du monde, fournissant à la fois de nouvelles informations et un puissant moyen de les communiquer pour nourrir la défense des droits de l’homme, les débats de politique ou documenter le règlement des contentieux en la matière.

Amnesty International a ainsi lancé un projet baptisé Science for Human Rights Project (la Science pour les droits de l’homme), dans lequel les technologies géospatiales sont activement mises à contribution pour accéder aux zones de conflit et rassembler des preuves visuelles grâce à de nouvelles méthodes. [18] Le travail accompli récemment par Amnesty en Syrie, rassemblé sous le nom de « Eyes on Syria » [19] (Des Yeux en Syrie), témoigne de la portée de ces technologies, qui permettent de répertorier avec une grande précision les cas d’exécution extrajudiciaire, de torture, et de destruction des biens.

Cette nouvelle approche pourrait avoir un impact considérable sur le traitement juridique des violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire. Mais il reste à examiner le statut des données géospatiales devant les juridictions nationales et internationales des droits de l’homme, ainsi que les questions relatives à qui les recueille et les utilise et dans quel but,. Selon les chefs de projet à l’Association américaine pour l’avancement de la science (AAAS) qui met aussi l’accent sur l’importance des technologies géospatiales, les spécialistes, les organisations et les défenseurs des droits de l’homme doivent s’associer avec la communauté de la technologie pour étudier les implications de ces outils géospatiaux et identifier les domaines où ils pourraient s’avérer utiles. [20]

Liens avec l’éthique

Le droit à la science et à ses bienfaits n’est pas encore une question centrale de l’éthique du développement -discipline qui s’intéresse aux implications éthiques et sociales du développement. Cela s’explique partiellement par le fait que les éthiciens du développement préfèrent un langage de principes, qu’ils jugent approprié au renforcement des capacités, à un discours sur les droits humains fondé sur des préoccupations d’ordre juridique. [21]

Mais le plus difficile est de savoir si, et comment, une approche fondée sur les droits humains doit éclairer l’éthique du développement. Quelles sont les personnes dont les droits sont ainsi évoqués ? L’accent mis sur l’individu peut-il être adapté aux réalités des activités de développement menées au niveau communautaire ?

Les mêmes questions s’appliquent à l’éthique de la science et de la technologie, pour laquelle une approche normalisée fondée sur les droits humains n’a pas encore été formulée. La déclaration de l’UNESCO sur la bioéthique et les droits de l’homme constitue toutefois un pas important dans les efforts pour faire peser les approches axées sur les droits humains sur les implications éthiques du développement technologique rapide. Elle invoque explicitement la Déclaration universelle des droits de l’homme, qui reconnaît que les questions éthiques doivent être examinées sous l’angle des droits, tout en relevant « que la santé [au sens large du bien-être et de la satisfaction des besoins] ne dépend pas uniquement de l’évolution de la recherche scientifique et technologique mais aussi des facteurs psychologiques et culturels ».[14]

Principes généraux

Les approches de la politique fondées sur les droits humains peuvent avoir un impact dans plusieurs domaines de la science, de la technologie et du développement, notamment le logement, la production énergétique, l’adaptation aux changements climatiques, la déforestation, l’accès à l’eau potable, la surveillance des armes biologiques, la santé publique, et les questions d’égalité entre hommes et femmes. Elles sont aussi au cœur du débat autour du développement d’une économie mondiale verte. [Encadré 3]

Dans ce contexte, l’un des principes fondamentaux devant guider l’élaboration des politiques devrait être de mettre l’accent sur la protection des droits humains, et de préciser quelles mesures sont attendues à la fois des détenteurs de droits et des débiteurs d’obligations pour y parvenir. Concrètement, il faut pour cela que les décideurs politiques et les intervenants restent vigilants quant à l’effet des politiques qu’ils élaborent -lorsqu’elles amoindrissent les vulnérabilités et les inégalités par exemple- tout en œuvrant activement à la mise en place de mécanismes pour faire échec aux violations des droits humains.

Au niveau national et géopolitique, une approche basée sur les droits de l’homme pourrait doter des groupes vulnérables d’une plus grande autorité dans le cadre de discussions sur les politiques mondiales. Elle forcerait les décideurs à prendre en compte ces aspects de l’économie planétaire et du pouvoir politique qui créent les conditions propices aux violations des droits humains.

 

Encadré 3 : Sociétés vertes ou économies vertes ?

Les approches de la science, de la technologie et du développement fondées sur les droits humains sont intimement liées à la quête incessante d’une plus grande durabilité mondiale. Le message de l’UNESCO lors du sommet Rio+20 et intitulé « Des économies vertes aux sociétés vertes » visait à réorienter la pensée conventionnelle sur l’avenir de la durabilité. Il soutenait ainsi que dans la mesure où les économies sont enracinées dans la société, la transition vers le développement durable nécessite plus que de simples technologies à faible empreinte carbone et des investissements verts. Il appelle à l’élaboration de politiques fondées sur les droits de l’homme et tenant compte non seulement des considérations économiques, mais aussi des questions scientifiques, sociales et éducatives. [22]

Les bonnes pratiques

Pour améliorer l’efficacité des politiques et des savoirs, il faut de bonnes pratiques dont l’impact et les conséquences sur les objectifs des politiques doit être évalué. La clé, en l’occurrence, consiste à traduire dans les faits, à mobiliser, et à évaluer la contribution qu’apportent les approches fondées sur les droits humains.

L’approche des programmes de coopération au développement, d’assistance technique et politique fondée sur les droits humains qu’ont adoptée les Nations Unies comporte trois volets. Elle met l’accent sur les objectifs (réalisation des droits), sur les processus (normes et principes) et enfin sur les résultats escomptés (capacité accrue à remplir les obligations et à revendiquer des droits). [23]

La Boîte à outils de planification du développement, basée sur les droits de l’homme, et élaborée avec la contribution de divers organismes des Nations Unies, est une référence en matière la planification du développement. Elle énonce les priorités à prendre absolument en compte dans les activités de développement s’insérant dans les projets de développement au sens large, et elle contribue à analyse les progrès accomplis dans la mise en œuvre des approches fondées sur les droits humains. L’un des ces outils est un tableau qui montre dans le détail comment des gens et des groupes peuvent être affectés ou laissés de côté par un projet de développement. (figure 1).  

Figure 1. Actor analysis — a decision making tool for a human rights-based approach to development planning. [24] (click for full image)

Figure 1. Actor analysis — a decision making tool for a human rights-based approach to development planning. [24]

Figure 1. Analyse des intervenants — Outil de décision pour une approche de la planification du développement fondée sur les droits de l’homme. [24]

Cette boîte à outils est une tentative d’éloigner définitivement des règles abstraites l’approche fondée sur les droits humains pour l’ancrer dans un cadre analytique permettant d’évaluer les progrès. Il s’insère dans une approche de la planification du développement (figure 2) qui propose une série de directives basées sur des principes qui se prêtent volontiers aux projets de développement, de la conception à la réalisation, tout en montrant clairement comment les instruments internationaux analysés ci-dessus (dans l’encadré 1) peuvent être exploités pour mettre en œuvre une approche fondée sur les droits humains.

Figure 2. Exemple d’approche du développement fondée sur les droits de l’homme. [25]

(Cliquez ici pour agrandir l’image)

Figure 2. A human rights-based approach to development planning. [25]

 

Le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) a mené en République démocratique populaire lao et en partenariat avec l’Agence australienne de développement international (AusAID), avec l’organisation humanitaire de développement Oxfam et avec l’Agence de développement et de secours adventistes (ADRA) une étude sur l’amélioration du droit à l’eau, à l’assainissement, aux infrastructures hydrauliques et à l’utilisation de l’eau. Cette étude illustre l’application pratique de cette approche [26]. Les chercheurs ont utilisé diverses techniques pour évaluer la politique de distribution et d’utilisation de l’eau au Laos, car elle correspond aux approches fondées sur les droits humains, avec notamment le suivi et l’évaluation participatifs, les échanges communautaires entre les responsables de provinces et de district d’une part et les villages d’autre part. On peut également citer la transparence des processus d’appel d’offres pour les projets d’approvisionnement en eau et les groupes d’utilisateurs communautaires (qui œuvrent pour le consensus entre les villages sur les taux de contribution et la maintenance des installations d’approvisionnement en eau).

Water cisterns

Les chercheurs se sont appuyés sur des techniques basées sur les droits humains pour étudier l’utilisation de l’eau au Laos.

Flickr/E>mar

Ces techniques, cependant, ne se fondent pas exclusivement sur les droits humains. En effet, l’un des principaux obstacles à l’élaboration de bonnes pratiques en matière d’approche fondée sur les droits humains tient au fait que cette dernière englobe tout, créant ainsi le risque de ne renvoyer à rien de concret. En outre, la concertation et le dialogue ne garantissent pas forcément le consensus, et encore moins une mise en œuvre rigoureuse.

 

Un avenir ancré sur les droits de l’homme

Il est certain que la science, la technologie et le développement se trouvent au cœur des révolutions industrielle et postindustrielle du XXIème siècle. Et en dépit de leurs faiblesses, les droits humains sont au cœur du débat sur la contribution que la science, la technologie et le développement peuvent apporter à la promotion du bien-être de l’humanité. Les droits humains incluent aussi les droits à la durabilité, qui protègent les pauvres et les personnes vulnérables contre les excès de la science et de la technologie soumises aux forces du marché. A défaut d’une approche de la science, de la technologie et du développement fondée sur les droits humains, la distribution inégale des biens –services, ressources naturelles et ressources intangibles comme la dignité et l’autonomie de l’homme– ne ferait que s’accentuer, conduisant à une dégradation supplémentaire de l’environnement et, surtout, à une vulnérabilité accrue.

En d’autres termes, il ne faudrait pas traiter les approches fondées sur les droits humains comme de simples dimensions morales décoratives de la politique ou de l’innovation scientifique et technologique. Elles peuvent être la clé d’un avenir durable.

S. Romi Mukherjee est professeur de théorie politique et d’histoire des religions à l’Institut d’études politiques et professeur invité au Centre de l’Université de Chicago à Paris en France

Cet article fait partie d’un dossier spécial sur les relations entre les droits de l’homme, la science et le développement.

Références

[1] UNDP. Belize Human Rights Based Approach (2011)
[2] UNFPA.
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[3] UNFPA.
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[4]
Bruno-van Vijfeijken, T et al. Setting Higher Goals: Rights and Development. Trade Offs and Challenges in Implementing a Rights Based Approach to Development. Monday Developments, 27 (12), 19-20. (2009)
[5] UN.
The Universal Declaration of Human Rights. (1948)
[6] UNESCO. World Commission on the Ethics of Scientific Knowledge and Technology (COMEST) (1998)
[7] UNESCO.
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[8] UNESCO.
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[9] UNESCO.
Declaration on Science and the Use of Scientific Knowledge UNESCO World Conference on Science (Budapest, 1999)
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International Covenant on Economic, Social and Cultural Rights.(Adopted 1966, entry into force 1976)
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[12] UN OHCHR.
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[13] UNESCO.
Universal Declaration on Bioethics and Human Rights (2005)
[14] The African Science Academy Development Initiative
Declaration of Dakar 2007 Third Annual International Conference of the African Science Academy Development Initiative, Senegal, November 2007 (ASADI III). Published on www.kmafrica.com (2007)
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Cairo Declaration [43kB]. Extraordinary Conference of the African Ministerial Council on Science and Technology (Cairo 2006)
[16] Claude, R. Science in Service of Human Rights, Philadelphia: University of Pennsylvania (2002), pp. 14–17.
[17] Selian, A.N.
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[18] Amnesty International USA.
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[24] Socorro Diokno, M. Chapter 5.
Human Rights Based Approach to Assessment. In Human Rights Based Approach Development Toolkit www.hrbatoolkit.org (2012)
[25] Socorro Diokno, M.
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[26] Berman, G. Undertaking a Human Rights-Based Approach: Lessons for Policy, Planning and Programming — Documenting Lessons Learned for the Human Rights-Based Approach to Programming: An Asia-Pacific Perspective — Implications for Policy, Planning and Programming. pp. 506 (UNESCO Bangkok, 2008)