22/02/12

Les Philippines voient de l’or dans une plante nuisible

Un défilé de mode prouve la polyvalence des vêtements confectionnés à partir de tissus à base de plantes Crédit image: Henry de Leon/STII/DOST

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[MANILLE] Aux Philippines, des scientifiques ont développé une ingénieuse méthode d’utilisation productive de la jacinthe d’eau, qui obstrue les voies navigables du pays. Il s’agit de traiter les fibres de cette plante de manière à les rendre suffisamment souples et flexibles pour les utiliser dans des vêtements haut de gamme.

Comme l’ananas et la banane ainsi que des espèces locales comme l’abaca, le saluyot et le maguey, la jacinthe d’eau est l’une des nombreuses plantes répandues à partir desquelles des chercheurs de l’Institut philippin de recherche sur le textile (Philippine Textile Research Institute ou PTRI) du ministère de la Science et de la technologie ont développé des teintures et des tissus naturels.

Ils espèrent non seulement trouver une méthode d’utilisation des déchets de ces plantes, mais aussi donner un coup d’accélérateur aux industries locales de l’habillement et de la mode, qui traversent une période difficile, et créer une source de revenus pour les communautés rurales.

À l’occasion d’un défilé de mode organisé par cet institut de recherche à Manille le 8 février, on a fait la démonstration de la polyvalence des fibres dérivées de ces plantes sur des vêtements allant des uniformes de bureau et des tenues décontractées aux robes de mariage et de cocktail.

Nora Mangalidan, chef de la division recherche et développement du PTRI, a déclaré que ce défilé de mode avait pour but de montrer aux fabricants que le tissu conçu à partir de plantes tropicales peut tenir la concurrence, en matière de confort et de style, avec des matériaux plus conventionnels.

« Ces tissus sont traités avec des enzymes et sont donc confortables à porter. Ils ne piquent pas à la différence des premières versions, ne sont plus rigides, et peuvent de ce fait s’adapter aux différents styles », explique Mangalindan.

Selon Anthony Cruz Legarda, styliste basé à New York et directeur du défilé de mode du PTRI, l’intérêt du tissu tropical philippin (PTF) réside dans son originalité.

« Les concepts à la mode sont l’éco-compatible, le durable, le local et la faible empreinte carbone » poursuit-il. « Pourquoi donc ne pas surfer sur cette vague ? »

Le plus gros obstacle actuel tient au manque de tissus, pour l’heure produits par peu de fabricants. Dans le cadre d’une initiative visant à stimuler la demande et doper la production, le gouvernement envisage d’équiper plus d’un million de fonctionnaires avec les uniformes présentés lors du défilé de mode.

Les chercheurs espèrent que la demande pour ces nouveaux tissus va permettre la mise en place d’une industrie génératrice de revenus à partir de la jacinthe d’eau. Celle-ci pose pour le moment un problème de taille à plusieurs localités car elle obstrue les cours d’eau, ce qui entraîne souvent des inondations.

Le PTRI a également engagé des pourparlers avec deux gros producteurs d’ananas, Dole Philippines et Del Monte, qui ont tous les deux manifesté leur intérêt pour cette idée de transformation en tissu des feuilles d’ananas, utilisées pour l’instant comme déchets agricoles.

Ces entreprises examinent comment les familles de leurs ouvriers agricoles pourraient, dans le cadre de leurs coopératives, s’impliquer dans la production et la transformation du PTF.