29/09/14

Les défis nationaux de la statistique en Afrique

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Crédit image: Flickr/ Marc Smith

Lecture rapide

  • Le rapport conclut que seulement 12 pays africains ont un institut national de statistiques indépendant
  • La trop forte dépendance à l’égard du financement des bailleurs de fonds entraîne une négligence des besoins locaux, poursuit-il
  • Un expert préconise d’investir dans la production de données de meilleure qualité fiables en Afrique

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[NAIROBI] Selon un nouveau rapport, la majorité des pays africains n’ont pas d’instituts nationaux de statistiques indépendants (INS), et beaucoup produisent des données peu fiables, inexactes et souvent manipulées.

Le rapport affirme que l’absence d’INS indépendants constitue un écueil à une prise de décisions fondée sur des preuves ainsi qu’à la mise en œuvre du programme de développement des Nations Unies pour l’apès-2015 qui appelle à une révolution des données.

Sur 54 africains, seulement 12 disposent d’un INS indépendant et même dans les pays où ils existent, leur financement est insuffisant, relève ce rapport intitulé « Révolutionner la collecte des données en Afrique subsaharienne » qui cite l’Angola, le Burkina Faso, la Cap-Vert, la Tchad, l’Egypte, l’Ethiopie, le libérai, l’Île Maurice, le Mozambique, le Rwanda, la Tanzanie et l’Ouganda.

Ce rapport produit conjointement par le Centre pour la Recherche sur la Population et la Santé en Afrique (APHRC) basé au Kenya et le Centre for Global Development basé aux Etats-Unis, a été lancé le mois dernier (9 juillet) à Nairobi au Kenya.

Il observe que les systèmes statistiques nationaux dépendent souvent du financement des bailleurs, et c’est pourquoi, dans la production des données, ils accordent la priorité aux besoins de ces bailleurs plutôt qu’aux besoins nationaux.

"Je suis convaincu que les gouvernements comprennent l’utilité de données exactes et à jour dans la prise de décisions, mais l’allocation des crédits budgétaires obéit à de multiples facteurs et à des priorités conflictuelles", explique Alex Ezeh, Directeur exécutif de l’APHCR et co-président du groupe de travail auteur du rapport.

"Les priorités et les consignes des bailleurs de fonds quant à l’utilisation de leurs fonds ne permettent pas toujours de produire les statistiques les plus utiles au niveau national", ajoute-t-il.

Parmi les obstacles au déclenchement d’une révolution des données, les auteurs citent les difficultés d’accès aux statistiques produites en Afrique.

Ils observent que plusieurs INS hésitent à publier leurs données, ne disposent pas des capacités nécessaires pour leur publication et leur gestion conformément aux  meilleures pratiques internationales, ou alors ne comprennent pas les besoins des utilisateurs ou n’ont pas  la stratégie nécessaire pour les mettre à leur disposition apporter.

Parmi les écueils cités figurent les « priorités conflictuelles » qui font que les mesures d’amélioration de la disponibilité et de la qualité des données entraînent des conséquences involontaires avec un impact négatif sur la qualité des données.

Dans un entretien accordé à SciDev.Net, Ezeh explique cet état de choses ainsi qu’il suit : « Par exemple, la décision d’un bailleur de fonds de n’autoriser que certaines activités, comme la collecte des données de terrain, peut empêcher le personnel hautement qualifié de l’INS de remplir les tâches hautement techniques de bureau. Avec comme conséquence involontaire la priorité accordée aux activités de collecte de données au détriment du traitement et de l’analyse des données, et de la rédaction de rapports ».

Jason Braganza, statisticien principal à l’organisation internationale de réflexion sur les politiques de développement, Development Initiatives (DI), Pôle Afrique, basé à Nairobi, en convient, tout en précisant que l’insuffisance du personnel et l’incapacité à mettre les statistiques à la disposition de citoyens ordinaires constituent un autre écueil à la production de données.

« Investir dans la production de statistiques de meilleure qualité et fiables jouera un rôle encore plus capital maintenant que de nombreux pays africains s’apprêtent à mettre en valeur des ressources précédemment inexploitées, comme le pétrole et le gaz », relève Braganza.

Parmi les projets de renforcement des capacités statistiques  des pays africains figurent l’Initiative « Autoroutes de l’information en Afrique »,  le Portail de données statistiques et la Plateforme ouvertes de données pour l’Afrique, tous financés par la Banque africaine de Développement qui, depuis 2013, consacre plus de 60 millions de dollars EU chaque année à l’appui au développement statistique, rappelle Ezeh.

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Cet article est une production de la rédaction Afrique subsaharienne de SciDev.Net.