17/02/10

Aider les agriculteurs à réduire les pertes de récoltes

Les charançons du maïs peuvent ravager jusqu'à 40 pour cent des récoltes stockées Crédit image: USDA

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Pour Dennis Rangi de CAB International, la réduction des pertes de récoltes en luttant contre les parasites exotiques et en renforçant les connaissances dans le domaine de la santé des plantes, serait vital pour la sécurité alimentaire.

Avec la hausse des prix alimentaires et la croissance de la population mondiale, la sécurité alimentaire dans le monde est aujourd'hui au centre de toutes les préoccupations. Selon les estimations, la demande alimentaire connaîtra une hausse de 50 pour cent d'ici 2030. La satisfaction de cette demande est devenue une question cruciale à la fois pour les pays développés et les pays en développement.

On compte environ 525 millions d'exploitations agricoles dans le monde, constituant le moyen de subsistance d'environ 40 pour cent de la population mondiale. La plupart d'entre elles mesurent moins de deux hectares. L'amélioration de la productivité de ces petites exploitations, en particulier, est donc vitale si on veut assurer la sécurité alimentaire dans le monde. 

Aider les agriculteurs à améliorer leurs rendements n'est pas une réponse suffisante. Il est tout aussi important de les aider à protéger leurs récoltes et réduire leurs pertes.

Ceci est particulièrement vrai en Afrique, où la mauvaise santé des plantes est l'une des principales causes de la faible productivité. Dans de nombreux pays, près de la moitié des cultures est ravagée par les parasites et les maladies. Le charançon du maïs, capable de détruire jusqu'à 40 pour cent des récoltes stockées, est un parasite d'origine locale que l'on retrouve dans la plupart des pays africains.

Ces pertes entraînent un gaspillage d'énergie, d'eau, d'intrants et de main-d'oeuvre. Selon l'Institut international d'Agriculture tropicale, rien qu'en Ouganda, les pertes annuelles dues aux maladies des cultures s'élèvent au montant colossal de US$ 200 millions.

Tenir les parasites exotiques à distance

L'une des solutions les plus faciles pour l'Afrique consisterait à utiliser les technologies actuelles pour améliorer la quarantaine, afin de maintenir à distance les espèces exotiques envahissantes.

Les déplacements fréquents et le développement des échanges commerciaux aggravent le risque de voir les importations contenir des espèces clandestines malvenues capables de ravager les ressources naturelles locales. En Afrique, le gros perceur de céréales, un insecte arrivé d'Amérique centrale dans les dons de céréales à la fin des années 70 et au début des années 80, se fraie sans cesse un chemin dans les stocks de maïs du continent, et fait désormais plus de dégâts que les charançons du maïs.

Ce parasite cause à la Tanzanie des pertes de maïs évaluées à US$ 91 millions chaque année. Il peut également détruire jusqu'à 70 pour cent des stocks de manioc séché, et fait subir à l'Afrique de l'Ouest des pertes annuelles atteignant US$ 800 millions.

Au delà de ces dégâts matériels, la lutte contre le gros perceur de graines engloutit des ressources considérables. En 2006, en Afrique orientale, le coût des produits chimiques de lutte contre ce parasite a été estimé à US$ 18,7 par hectare, un coût prohibitif pour la plupart des petits agriculteurs.

Il existe d'autres exemples de maladies et de parasites dévastateurs et envahisseurs. Ainsi, la baisse des rendements dus à la rouille du blé s'élève jusqu'à 80 pour cent au Kenya et en Ouganda.

Les pays africains doivent améliorer la quarantaine, en appliquant et en évaluant systématiquement les données scientifiques, techniques et économiques dans la prise des décisions.

Les pays doivent également améliorer les pratiques de stockage. Une étude réalisée par mon organisation, le CABI, a établi que les parasites attaquant les récoltes stockées causent au Kenya, au Malawi et la Tanzanie des pertes évaluées entre US$ 150 et US$ 300 millions chaque année. Certaines de ces pertes peuvent être évitées au moyen de solutions simples telles que la culture de variétés moins vulnérables ou la mise en œuvre de techniques de séchage.

Le défi du renforcement des connaissances locales

La réduction des pertes agricoles en Afrique ne passe pas uniquement par le déploiement des technologies. Il faut également renforcer les connaissances des agriculteurs en matière de gestion de la santé des plantes. Il s'agit notamment de les aider à rapidement identifier, diagnostiquer et gérer les parasites et les maladies qui attaquent leurs cultures. 

Mais, l'élaboration de solutions efficaces et abordables sera un énorme défi compte tenu du risque croissant d'introductions non intentionnelles de parasites exotiques, et de l'évolution des conditions climatiques, susceptible de favoriser l'émergence rapide de nouveaux parasites et de nouvelles maladies.

Conséquence de plusieurs décennies de diminution de l'appui accordé au secteur agricole, la faiblesse des services de vulgarisation ne sont souvent pas en mesure de répondre aux besoins des agriculteurs. Il nous faut des mécanismes d'identification des problèmes et des solutions en tout temps et en tout lieu, et exploiter au mieux les capacités locales.

La Clinique mondiale des Plantes (Global Plant Clinic, ou GPC), une initiative de CAB International, constitue un exemple d'approche fondé sur les connaissances, et susceptible d'améliorer la santé des plantes et la sécurité alimentaire.

Réseau mobile de cliniques des plantes, où les agronomes locaux et les agents de vulgarisation aident les agriculteurs à diagnostiquer les maladies des plantes et à détecter sur place les parasites emergeants, le GPC leur recommande des méthodes de traitement appropriées et abordables (voir A new vision of plant health services for world's poor).

Au cours de la dernière décennie, l'initiative GPC a mis sur pied un réseau de plus de 80 cliniques indépendantes, et formé plus de 500 docteurs des plantes, en Afrique, Asie et Amérique latine. A Butembo, en République démocratique du Congo, des centaines d'agriculteurs se rendent dans ces cliniques chaque semaine.

En renforçant les connaissances des agriculteurs, les cliniques des plantes les aident à traiter plus efficacement les maladies frappant leurs cultures, et améliorent ainsi la sécurité alimentaire en stimulant la productivité et en augmentant les revenus des agriculteurs.

Aider les agriculteurs à réduire les pertes de récoltes dues aux parasites et aux maladies, que ce soit grâce à une quarantaine rigoureuse, un stockage amélioré ou une meilleure gestion de la santé des plantes, est tout aussi vital à l'amélioration de la sécurité alimentaire que des mesures comme la sélection des plantes et le développement de nouvelles semences permettant aux agriculteurs d'accroître leur production.

Dennis Rangi est le Directeur exécutif chargé du développement international auprès de CAB International, une organisation oeuvrant dans les secteurs de l'agriculture et de l'environnement.

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