24/02/20

Coronavirus : à l’épreuve des cas sans symptômes

Coronavirus - MAIN2
Crédit image: Gerd Altmann from Pixabay

Lecture rapide

  • La plus grande crainte du directeur général de l’OMS est que l'épidémie atteigne un pays comme la RDC
  • Les appareils nécessaires pour le test de diagnostic coûtent 45 000 dollars chacun
  • Certaines personnes infectées « ne semblent pas malades »

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À mesure que les preuves s'accumulent selon lesquelles des gens peuvent être porteurs du coronavirus sans présenter de symptômes, l’on redoute que la maladie soit impossible à contrôler dans certaines régions.
 
Plus de 74 000 personnes dans 25 pays ont été infectées et plus de 2 000 personnes sont mortes depuis que le virus, officiellement connu sous le nom de COVID-19, est apparu en Chine en décembre 2019.
 
Selon une nouvelle étude publiée dans The Lancet, contrôler la propagation de ce coronavirus en Afrique -y compris en Égypte, où au moins un cas a été confirmé- « dépendra fortement des capacités de santé d'un pays ». 

Lorsque vous effectuez un dépistage sur des personnes, vous ne pouvez pas vous fier uniquement aux symptômes qu’elles présentent, vous devez faire un test

Anthony S. Fauci, directeur du NIAID, États-Unis

La revue scientifique révèle que les pays africains à risque élevé et moyen de transmission à partir de la Chine sont « mal préparés pour détecter les cas et limiter la transmission ».
 
Une analyse de BMJ Global Health montre que les diagnostics sont fondamentaux pour la lutte contre les épidémies. Mais que le développement de tests pour identifier les maladies est techniquement difficile et prend du temps ; tandis que de nombreux tests ne sont pas disponibles d'une manière à être facilement déployés sur le terrain.
 
Les travailleurs médicaux chinois dans les provinces touchées par le virus ont déclaré à l'Organisation mondiale de la santé (OMS) qu'ils n'avaient pas la capacité de diagnostiquer immédiatement les cas sur le terrain.
 
« Notre plus grande crainte demeure les dommages que ce coronavirus pourrait causer dans un pays comme la République démocratique du Congo », a déclaré le directeur général de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus.
 

Dépistage basé sur les symptômes

Des chercheurs allemands ont découvert que des personnes peuvent être infectées sans paraître malades, après que le dépistage basé sur les symptômes a ignoré deux cas de coronavirus dans un groupe de personnes évacuées de Chine.
 
L'unité des maladies infectieuses de l'hôpital universitaire de Francfort a indiqué que plusieurs tests, dont un prélèvement de gorge, ont par la suite confirmé que les deux personnes avaient le virus.
 
« Nous avons découvert que l'excrétion de virus potentiellement infectieux peut se produire chez les personnes qui n'ont pas de fièvre et aucun signe ou seulement des signes mineurs d'infection », disent les chercheurs. « Il n'est pas clair si les personnes qui ne présentent aucun signe ou symptôme d'infection respiratoire éliminent le virus », ajoutent-ils.
 
Des preuves anecdotiques suggèrent que des personnes ne présentant aucun symptôme du virus sont capables de le transmettre à d'autres, explique Anthony S. Fauci, directeur de l'Institut national des allergies et des maladies infectieuses (NIAID)1 aux Etats-Unis.
 
« Je pense que cela va devenir un véritable phénomène », dit-il. « La question qui reste sans réponse est de savoir quelle est l'étendue de cette transmission asymptomatique? S'agit-il d'un élément mineur de l'épidémie ou d'un élément substantiel ? »
 
« S'il s'agit d'une composante substantielle, cela devient alors problématique, car cela signifierait que lorsque vous effectuez un dépistage sur des personnes, vous ne pouvez pas simplement vous fier aux symptômes qu’elles présentent ou non, vous devrez faire un test. »
 
Seulement, les tests de diagnostic, en particulier ceux qui sont nouveaux, peuvent donner de faux résultats, explique Michael J. Ryan, directeur exécutif du Programme de gestion des urgences sanitaires à l’OMS. Il dit que la suspicion clinique est importante, en particulier dans les pays où les cas apparaissent pour la première fois.
 
Et le diagnostic basé sur les symptômes peut être la seule option pour de nombreux pays manquant d'équipements et de formation nécessaires pour les tests de laboratoire.
 
Au Brésil, des chercheurs ont testé une technique de diagnostic en temps réel (utilisée pour détecter la rougeole, le virus Zika et la leishmaniose) pour rechercher la présence de COVID-19. Mais l'utilisation de cette technique dans les pays à faible revenu sera probablement limitée, car elle nécessite un équipement sophistiqué et coûteux que de nombreux systèmes ne possèdent pas. Au Brésil, chaque machine coûte environ 45 000 dollars.
 

Renforcer les systèmes de santé

Francioli Koro, microbiologiste moléculaire et épidémiologiste à l'université de Douala au Cameroun estime que de nombreux pays africains pourront être aux prises avec une épidémie de COVID-19. « Si le coronavirus apparaît ici en Afrique et que les règles de base ne sont pas respectées, ce serait une catastrophe que nous pourrions ne pas pouvoir gérer », a-t-il déclaré à SciDev.Net.
 
Il explique que les systèmes de santé en Afrique n’ont pas la capacité d’effectuer la recherche des contacts (un facteur incontournable de la lutte contre les maladies infectieuses dans des pays comme le Royaume-Uni). « En Afrique, nous ne pouvons pas retracer pour savoir qui a emprunté le même bus, le même taxi, la même moto », dit-il.
 
Tedros Adhanom Ghebreyesus affirme que cette épidémie de coronavirus souligne pourquoi il est essentiel de renforcer les systèmes de santé dans les pays du Sud.
 
Mais Francioli Koro dit que les crises de maladies infectieuses sont souvent dues à des défaillances des politiques aux niveaux national et mondial.
 
« Le problème est de savoir comment les politiciens voient les informations qui leur sont données », dit-il. « Pour que l'OMS, par exemple, considère une situation comme critique, un certain nombre de conditions doivent être remplies. Pendant ce temps, la maladie se propage. »

Références

1 National Institute of Allergy and Infectious Diseases.