12/03/12

L’avenir d’un prix scientifique de l’UNESCO toujours incertain

La controverse est liée à la réputation du régime d’Obiang en matière d’atteintes aux droits de l’homme Crédit image: Flickr/Jaume d'Urgell

Envoyer à un ami

Les coordonnées que vous indiquez sur cette page ne seront pas utilisées pour vous envoyer des emails non- sollicités et ne seront pas vendues à un tiers. Voir politique de confidentialité.

Un prix controversé pour la recherche, doté d’une enveloppe de 3 millions de dollars et considéré par de nombreux africains comme le premier prix scientifique ‘décerné par des Africains à des Africains’, a été formellement adopté par l’UNESCO après une bataille de plusieurs années, mais il n’est toujours pas certain que ce prix sera décerné dans un avenir proche.

Le prix international UNESCO-Obiang Guema Mbasogo pour la recherche en sciences de la vie a été en principe instauré en 2008 par les Etats membres pour récompenser les "projets et activités scientifiques […] contribuant à l’amélioration de la qualité de la vie des êtres humains". Il porte le nom du Président équato-guinéen, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, qui donna son accord pour le financer.

Mais, en réponse aux inquiétudes émises par des intellectuels africains et des pays de l’Union européenne quant aux violations des droits de l’homme commises par le Président de Guinée équatoriale, le prix a été suspendu en janvier 2010, quelques semaines seulement avant d’être décerné pour la première fois, puis mis en veille par l’UNESCO en octobre 2010, une décision reconduite un an plus tard.

Le conseil exécutif de l’UNESCO vient de décider du maintien de ce prix à l’issue d’un vote par 33 voix contre 18, à la suite d’une proposition de la Guinée équatoriale modifiant le nom du prix. Celui-ci devrait désormais s’appeler le "prix international UNESCO-Guinée équatoriale pour la recherche en sciences de la vie" et s’accompagner de la garantie qu’il sera financé par le Trésor public équato-guinéen en lieu et place de la Fondation Obiang Nguema Mbasogo.

Ce vote a eu lieu le 9 mars dernier avec le soutien des 14 pays africains siégeant au Conseil exécutif de l’UNESCO.

Il a également bénéficié du soutien de pays arabes, du Brésil, de Cuba, de l’Equateur, de l’Inde, de la Russie et du Venezuela. L’Union européenne et les Etats-Unis s’y sont opposé.

Un délégué africain a déclaré à SciDev.Net que ce prix serait ‘une source de fierté’ pour l’Afrique en ajoutant que les pays africains se sont entendus à l’unanimité pour adopter une résolution soutenant le prix lors d’un sommet de l’Union africaine en juin 2011.

Plusieurs délégués africains ont déclaré en privé qu’ils ne souhaitaient pas que les pays occidentaux leur disent "ce qu’ils devaient faire", et insisté pour que l’UNESCO procède maintenant à la remise du prix.

La saga est loin d’être terminée. Des sources internes à l’UNESCO affirment qu’il y a eu pendant le weekend des désaccords sur le sens réel du vote de vendredi.

"Nous avons seulement accepté de changer le nom du prix, sans nous entendre sur un nom précis", a confié à SciDev.Net une source qui a requis l’anonymat.

Le fait que ce prix doive être doté d’un nouveau jury n’est pas non plus établi de manière claire. Et un avis juridique, préparé à l’intention de la directrice générale de l’UNESCO en prélude à la réunion, laisse penser qu’il reste à résoudre la question de l’origine des fonds finançant le prix.

"Le problème tient à l’origine du financement", affirme cette source.

Irina Bokova, la directrice générale, a déclaré devant le Conseil exécutif réuni le 8 mars dernier que même doté d’un nouveau nom, le prix risquait encore d’entacher la réputation de l’UNESCO.

Et bien que l’UNESCO soit tenu d’appliquer les décisions de son Conseil exécutif, une source diplomatique a confié à SciDev.Net que la directrice générale avait demandé à l’office des affaires juridiques de l’UNESCO son avis sur ce changement de nom.

Tito Alicante, directeur général de l’organisation non gouvernementale EG Justice estime que "quel que soit le nom qu’on lui donne, ce prix est financé par de l’argent sale".

Le Brésil et plusieurs autres pays africains contestent ce qu’ils considèrent comme des "tentatives de l’UNESCO pour gagner du temps et semer le doute" sur le nom de ce prix, tandis que les délégués arabes estiment qu’un examen aussi rigoureux des prix ne se justifie pas.

Related links