23/06/09

Comment les medias créent une atmosphère propice au changement

Les médias ont contribué à amener l'opinion publique à soutenir la prise de mesures contre les changements climatiques Crédit image: Greenpeace

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R. K. Pachauri, le président du GIEC, exhorte les journalistes à continuer, dans le traitement de la question des changements climatiques, à mettre l’accent sur l’importance du fondement scientifique pour toute action.

Au cours de ces deux dernières années, les médias ont joué un rôle essentiel dans la sensibilisation à grande échelle sur les changements climatiques. Je trouve cela particulièrement satisfaisant : quand j’ai été élu vice-président du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) en 1997, j’ai souligné l’importance de la communication et de la diffusion des rapports du GIEC, des riches sources de connaissances scientifiques sur les changements climatiques.

J’ai eu le sentiment que le GIEC qui a pour mission de réaliser des évaluations de tous les aspects des changements climatiques, doit faire plus d’efforts pour nouer des liens avec les décideurs politiques et le grand public, et ce partout dans le monde.

Robert Watson, qui présidait le GIEC à l’époque, m’a demandé de mettre sur pied un groupe opérationnel sur la stratégie d’information et de communication. Ce n’était qu’un effort préliminaire le GIEC créant rapidement son propre site Internet, qui reste régulièrement mis à jour depuis son lancement.

Autour de la même période, le GIEC a commencé à inviter les médias à interagir avec ses membres lors de chaque évènement important, et dès que l’opportunité se présentait. Cette approche a été intensifiée en 2002, quand j’ai été élu président du GIEC ; peu après nous avons recruté un responsable permanent pour soutenir nos efforts de sensibilisation.

Un impact considérable

Avec la publication de la première partie du Quatrième rapport d’évaluation du GIEC, intitulé Les Bases scientifiques physiques, à Paris en 2007, la grande salle du siège de l’UNESCO, où le point de presse s’est tenu, était bondée de représentants des médias. Près de 300 journalistes et 50 caméras de télévision étaient présents.

Les conclusions du rapport et les rapports ultérieurs du groupe de travail publiés à Bruxelles et à Bangkok ont atteint un public impressionnant et diversifié. En Inde, où la couverture des changements climatiques avait été modeste, plusieurs quotidiens nationaux ont commencé à publier des articles détaillés sur les conclusions scientifiques du GIEC, et un petit groupe de journalistes s’est taillé un rôle de premier plan, en mettant l’accent sur les changements climatiques. Le même phénomène s’est produit à la télévision indienne, où les changements climatiques sont subitement devenus un sujet d’information.

D’autres pays ont connu des expériences similaires, et l’impact sur l’opinion publique et les décideurs politiques a été spectaculaire. Le résultat le plus important des efforts de sensibilisation a été l’attribution du Prix Nobel de la Paix 2007 au GIEC et au militant écologiste Al Gore, une attribution qui était essentiellement le résultat de la large diffusion des connaissances sur les changements climatiques par la communauté scientifique au nom du GIEC.

Un climat d’intention

Lorsque le rapport final de synthèse de la Quatrième évaluation a été publié à Valence, en Espagne, en novembre 2007, les médias avaient déjà développé un appétit pour les changements climatiques.
Les conclusions de ce rapport ont fait les gros titres de plusieurs quotidiens nationaux et internationaux, certains le qualifiant de rapport le plus solide du GIEC depuis sa création.

La couverture médiatique a contribué à la création d’un climat propice à l’action, avec la 13ème Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (UNFCCC) à Bali, en Indonésie, en décembre 2007. Même aux Etats-Unis — pays qui n’a pas ratifié le Protocole de Kyoto – l’opinion publique, les jeunes en particulier, a commencé à prendre fortement position pour la prise de mesures pour lutter contre les changements climatiques. Et l’engagement de Barak Obama sur les questions liées aux changements climatiques a probablement été un facteur qui a contribué à son élection comme président.

Affirmer que les médias ont ainsi contribué à amener l’opinion publique à soutenir la prise de mesures contre les changements climatiques est donc approprié. Et cet esprit a gagné les négociations qui ont débuté avec la conférence de Bali en 2007 et se sont poursuivies à Poznan, en Pologne, à la fin de l’année dernière.

En route pour Copenhague

Il y a également toutes les raisons de penser que la façon dont les médias vont s’engager sur cette question dans les six prochains mois aura un grand impact sur l’issue des discussions de l’UNFCCC à Copenhague en fin d’année, lorsque les négociateurs internationaux sur le climat concluront un nouvel accord mondial sur le climat pour faire suite au Protocole de Kyoto.

Le fait que de nombreux journalistes ont fait preuve de connaissances remarquables et d’un penchant pour une analyse en profondeur dans leurs interventions, servant des analyses objectives et impartiales des conclusions du GIEC, est source d’espoir.

La préoccupation persiste, néanmoins, que l’impasse actuelle dans les négociations ne mène certains éléments des médias à se concentrer sur les aspects politiques des discussions, et se focaliser sur les différentes positions des pays. Cette couverture médiatique se fait aux dépens des informations sur la justification scientifique des mesures à prendre, or c’est ce thème qui doit rester le moteur des négociations.

La route menant à Copenhague doit être fondée sur une prise de conscience de la base scientifique des changements climatiques – et pour cela, les médias doivent rester engagés de manière active et responsable.

R. K. Pachauri est le président du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (IPCC) et directeur général de L’Institut de l’énergie et des ressources, en Inde.