30/11/15

Madagascar pourrait perdre deux-tiers de ses forêts d’ici 2100

Madgascar Forest
Crédit image: SciDev.Net/Rivonala Razafison

Lecture rapide

  • Le couvert forestier de Madagascar ne serait plus que de 3 millions d’ha en 2100
  • Le pays a connu un taux annuel de déboisement estimé à 73 000 ha entre 1990 et 2000
  • En cause : une démographie galopante et les effets du changement climatique

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[ANTANANARIVO] Selon des chercheurs au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad), Madagascar n’aura plus que le tiers de son couvert forestier actuel, estimé à un peu plus de 9 millions d’hectares, vers la fin du siècle.
 
Les chercheurs prévoient que les forêts de la Grande Ile sont vouées à la disparition, même celles qui se situent à l’intérieur du système de réseaux d’aires protégées, couvrant actuellement plus de 6 millions d’hectares, à l’exception de la région Nord-Est.
 
"Pour 2050, nous avons une carte indiquant qu’il restera probablement des forêts uniquement à l’intérieur des aires protégées", a expliqué Miguel Pedrono, lors de la conférence-débat sur "La recherche à Madagascar face au changement climatique", à Antananarivo, le 25 novembre dernier.
 
La discussion, organisée dans le cadre du sommet mondial sur le climat qui s’ouvre ce jour à Paris (COP21), était une occasion pour ce chercheur de rendre publics les résultats préliminaires du projet BioSceneMada.
 
Démarré en 2014, celui-ci a pour objectif d’anticiper les conséquences du changement climatique et de la déforestation sur la biodiversité pour définir un plan de conservation.
 
Il s’agit d’adapter le réseau d’aires protégées national en sélectionnant les sites naturels les plus efficaces dans le contexte de la hausse moyenne des températures mondiales.
 
"Parler du changement climatique sans prendre en compte la déforestation n’aurait vraiment pas de sens. Les deux concepts sont étroitement liés dans la problématique de la conservation de la biodiversité à Madagascar", estime le biologiste de conservation.
 
La méthodologie utilisée comprend la modélisation de la déforestation à partir des sources cartographiques produites entre 1973 et 2012, pour évaluer son intensité, la détermination des facteurs spatiaux du problème et la projection de la déforestation dans le futur, avec des modèles de projection d’enveloppe climatique des espèces.
 
Dans l’ensemble, le taux annuel de déboisement à Madagascar sur la période 1990-2010, soit vingt ans, était de 73 000 ha.

Le Sud de l’île où, en moyenne, 8 000 ha de forêt disparaissent chaque année, a le taux de déforestation parmi les plus élevés au monde.
 
La situation est des plus inquiétantes dans la mesure où le pays tout en représentant seulement à peu près 0,4 % de la surface terrestre du globe, abrite environ 5 % de la biodiversité mondiale.
 
La mégadiversité malgache est avant tout forestière, avec plus de 50 % des espèces décrites vivant dans les forêts.
 
Le fait que 10 à 15 % de la couverture forestière était détruite depuis les années 1950 amène les scientifiques à estimer qu’à peu près 10 % des espèces malgaches ont disparu en 50 ans, entre 1950 et 2000.
 
De plus, la déforestation contribue à 25 % des émissions des gaz à effet de serre, tout en constituant une menace à la résilience des communautés malgaches face au changement climatique.
 
A en croire Jeannin Ranaivonasy, enseignant-chercheur à l’Ecole supérieure des sciences agronomiques (ESSA), les évaluations de la déforestation à Madagascar n’ont jamais été réalisées avec précision en raison des contraintes scientifiques et techniques.
 
"La plus ancienne estimation datant de 1934 suggère que l’île possédait encore environ 20 millions d’hectares de forêts au 19e siècle, soit 30 % du territoire. Puis, il y a eu une série d’estimations jusqu’en 2010", explique-t-il.
 
Toutefois, Lolona Ramamonjisoa, enseignante à l’ESSA et figure bien connue de la foresterie malgache, relativise la situation.
 
"Les prévisions concernant le déboisement à Madagascar sont négatives et pessimistes si nous restons les bras croisés. Il existe quand même des actions prometteuses à même de freiner le rythme", dit-elle à SciDev.Net.
 
En effet, gérer de manière durable et responsable le capital forestier malgache pour contribuer au développement économique de Madagascar est la finalité de la nouvelle politique forestière du pays présentée le 11 novembre dernier.
 
Des experts étrangers avertissent toutefois que le risque pour Madagascar, tout comme d’autres pays, est la monétarisation et la marchandisation des ressources naturelles.