13/12/19

Le cactus pour contrer l’effet du changement climatique

Cactus Madagascar
Des cactus plantés pour la stabilisation des dunes dans la localité d'Anjapaly à Madagascar. Crédit image: CTAS

Lecture rapide

  • Le cactus peut se substituer au bois pour la cuisson dans les ménages et réduire la déforestation
  • Plantée en bandes, il représente aussi un obstacle pour l’érosion éolienne et l’érosion hydrique
  • L’Etat malgache soutient désormais tout projet de valorisation de cette plante par ailleurs comestible

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[ANTANANARIVO] Le cactus qui pousse en abondance dans le sud de Madagascar est désormais appelé à jouer un rôle primordial pour lutter contre le changement climatique, l’érosion du sol et la désertification, en plus de son importance pour la sécurité alimentaire et l’économie rurale.
 
En effet, les expérimentations en cours prouvent l’efficacité de l’utilisation du cactus dans l’atténuation des conditions extrêmes exacerbées par le réchauffement mondial.
 
« Le cactus se fermente rapidement pour produire du gaz à usage individuel nécessaire à la cuisson, empêchant de défricher les forêts » pour avoir du bois, explique José Carlos B. Dubeux, enseignant à l’université de Floride, Etats-Unis.
 
Coordinateur aussi du Groupe fourrage du réseau FAO-Cactusnet[1], il intervient depuis quelques années dans le sud malgache dans le cadre de la valorisation du cactus pour le développement.

“Les bandes de cactus dans les parcelles agricoles servent de brise-vents contre l’érosion éolienne et d’antiérosifs contre l’érosion hydrique”

Stéphanie Andoniaina, ingénieur agronome – CTAS

Abondant dans le même sens, Bertrand Reverdy, promoteur d’écosystèmes durable et innovant dans le secteur de l’agribusiness et des énergies vertes, rend compte de la situation de la ville de Toliara, dans le sud-ouest de l’Île.
 
« Elle consomme 100 tonnes de charbon de bois par jour et pour produire une telle quantité, il faut un millier de tonnes de bois. La décomposition rapide de la matière organique du cactus offre une solution alternative pour la production du biogaz », observe-t-il.
 
Selon les explications de Bertrand Reverdy, le rendement élevé en biogaz brut de cette plante est le double de celui des principales cultures énergétiques cultivées ou des flux de déchets et, en respectant des pratiques agronomiques appropriées, un hectare de cactus donne 400 tonnes de biomasse.
 
Bertrand Reverdy est d’ailleurs en ce moment associé à un projet d’agronomie, de bioénergie et de cosmétique en cours de développement visant à planter, dans les prochaines années, du cactus sur un millier d’hectares dans le sud malgache.
 
Par ailleurs, en matière de stabilisation des dunes pour également combattre la désertification dans le sud de Madagascar, le projet "Havelo, Fararano Plus", exécuté sur 246 hectares au profit de 2 400 ménages dans la localité d’Anjapaly Tsihombe en 2017-2019 est un cas d’école.
 
Les activités ont consisté à valoriser le cactus inerme grâce à une collaboration avec l’Agence américaine de développement international (USAID) et le Catholic Relief Services, une association à caractère humanitaire.
 

 Brise-vents

« Alterné avec du sisal ou d’autres plantes, le cactus est un moyen efficace pour stopper l’avancée des dunes. Les bandes de cactus dans les parcelles agricoles servent de brise-vents contre l’érosion éolienne et d’antiérosifs contre l’érosion hydrique », soutient Stéphanie Andoniaina, ingénieur agronome et responsable du suivi et de l’évaluation auprès du Centre technique agroécologique du sud (CTAS) à Ambovombe Androy.
 
Avec un climat aride, le grand sud de Madagascar, peuplé de 1,8 million d’habitants (8 % de la population du pays), subit de plein fouet les effets néfastes du réchauffement planétaire.
 
A la merci de la sécheresse et des vents forts, la région connaît constamment le phénomène de désertification doublé de l’avancée continuelle des dunes détruisant plantations, végétations, pâturages, sources d’eau, sites sacrés…
 
Raison pour laquelle le cactus occupe une position particulière dans la Stratégie de développement intégré du grand sud (SIDGS). Un programme dont l’un des axes prioritaires est la préservation de l’environnement, la réduction des impacts du changement climatique et le renforcement de la résilience aux risques de catastrophes.
 
Mais, au-delà de l’aspect environnemental, le CTAS envisage de renforcer la culture à grande échelle du cactus inerme sur des terres non cultivées et d’intégrer la culture du cactus dans le système de culture des exploitations pour assurer aussi l’alimentation du bétail et des hommes.
 
En effet, soutient Tahiana Rakotoarivonona, doctorante à l’université d’Antananarivo, le cactus rouge peut remplacer, jusqu’à 50 %, les fourrages conventionnels des animaux sans nuire à leur santé.
 

 Transformation

Lors de la journée consacrée au cactus ce 11 décembre à Antananarivo, la GIZ (Agence de coopération technique allemande) a fait part de son projet d’importer du cactus du sud de Madagascar à Boeny (nord-ouest) en vue de réhabiliter et de protéger 39 000 hectares (ha) de terres, dont 7 000 ha à vocation agricole pour la sécurité alimentaire et 32 000 ha de pâturage.
 
Entre temps, de petites unités de transformation, travaillant essentiellement avec les femmes, un groupe particulièrement vulnérable au changement climatique dans le sud malgache, contribuent déjà au renforcement de la résilience locale.
 
Tel est le cas de la coopérative Raketamena Bio à Ambovombe et de la société Tatsimo Agroalimentaire à Taolagnaro et qui produisent toutes de la confiture à base de cactus.
 
Quant au gouvernement, il affirme par la voix de Ruphin Fortunat Zafisambo, son secrétaire général adjoint, que « le cactus peut effectivement contribuer au développement du sud. Il est à intégrer dans les différentes interventions à venir et nous soutenons toute initiative dans ce sens ».
 
Ainsi, à travers l’Office national de nutrition (ONN) et ses partenaires, Madagascar entend désormais valoriser la filière cactus au profit du développement et du changement climatique.

Références

[1] Fao-Cactusnet est un réseau de recherche et de développement créé sous les auspices de la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) en 1993 qui a pour objectif de promouvoir la culture et l’utilisation de la figue de Barbarie ou cactus.