29/05/18

Le SRI, une garantie pour l’autosuffisance en riz

SRI Farmer
Un agriculteur devant des plants de riz dans un champ d'expérimentation des méthodes de production du Système de riziculture intensive (SRI). - Crédit image: iAGRI

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L'évaluation du projet de riziculture intensive en Afrique de l'Ouest a permis de constater que 50.000 agriculteurs ont été formés en deux ans aux techniques de SRI (système de riziculture Intensive).

Dans un contexte marqué par des difficultés en matière de souveraineté alimentaire en riz (59% en 2010 et 54% en 2016/2017) [1] -, le SRI se distingue comme une arme efficace pour contribuer à relever le défi de l'autosuffisance alimentaire dans la région.

Mis au point à Madagascar dans les années 1980 par le prêtre agronome français Henri de Laulanié de Sainte Croix et pratiqué avec succès dans plus de cinquante pays, "le SRI est une pratique agroécologique, qui s’inscrit dans la dynamique de l’agriculture intelligente face au climat (AIC)" [2], explique Gaoussou Traoré, coordinateur du Centre national de spécialisation sur le riz (CNS – Riz), au Mali.

"Il permet au riziculteur d’augmenter son rendement en utilisant moins de semences, d’eau et d’engrais".

"Cette méthode comprend des principes de base et des pratiques qui doivent s’adapter de manière rationnelle à la grande diversité des systèmes agro-socio-économiques", poursuit-il.

“L’ensablement des sols – dû au déboisement et à l’érosion – et la salinité constituent les défis majeurs qu’il faut relever.”

Baba Bodian – Consultant en développement communautaire

De manière concrète, le SRI consiste à repiquer de jeunes plants de riz en maintenant entre eux un certain écart – ce qui élimine la gêne que les plants se causent entre eux –, tout en gardant les sols humides mais non inondés et en les enrichissant avec des matières organiques.

Ce faisant, il permet d’obtenir une augmentation des rendements de plus de 50%, tandis qu’il requiert jusqu’à 90% de semences en moins et 30 à 50% d’eau en moins, comparativement aux méthodes conventionnelles de riziculture.


Le RSI en diapo : Brève présentation des résultats du projet – Source: WAAPP/PPAAO. Synthèse réalisée par SciDev.Net.

De janvier 2014 à décembre 2016, le système a été déployé à grande échelle dans treize pays d’Afrique de l’ouest : le Bénin, le Burkina-Faso, la Côte d’Ivoire, la Gambie, le Ghana, la Guinée, le Libéria, le Mali, le Niger, le Nigéria, le Sénégal, la Sierra Leone et le Togo.

Sous le pilotage du CNS-Riz, ce déploiement a été effectué à travers un projet régional dénommé "Amélioration et mise à l’échelle du Système de riziculture intensive en Afrique de l’Ouest (SRI-PPAAO)", sous l’initiative et la supervision du Conseil ouest et centre africain pour la recherche et le développement agricoles (CORAF), dans le cadre du Programme de productivité agricole en Afrique de l’Ouest (PPAAO).

"En trois ans de mise en œuvre, le SRI-PPAAO a atteint directement 50.048 riziculteurs – dont 33% de femmes -, tandis que plus de 750.000 personnes ont été exposées aux activités du projet", explique Gaoussou Traoré.

L’intéressé précise également que "comparés à la pratique conventionnelle, les rendements ont augmenté en moyenne de 56% pour le système irrigué et 86% dans le système pluvial bas-fonds."


Résultats comparatifs des 13 pays d'Afrique de l'Ouest concernés par le projet (2014-2016)

Ces résultats probants lui permettent d’affirmer qu'il n’est pas "utopique de dire qu’avec le SRI, l’Afrique de l’Ouest peut devenir exportatrice de riz".

Mieux, "le SRI peut aider à contenir l’insécurité alimentaire, dans un contexte où la population mondiale est sans cesse croissante", conclut-il.
Maïmouna Barkiré, rizicultrice dans la région de Tillaberi, au Niger, explique que "le SRI lui a permis de faire face à ses charges familiales et même à scolariser ses enfants, ce qui lui était difficile auparavant".

"Grâce à cette méthode, je peux récolter jusqu’à 9 tonnes de riz avec seulement 20kg de semences, alors que je ne récoltais qu’environ 6 tonnes avec 100 kg de graines auparavant", se réjouit-elle.

Pour sa part, Baba Bodian, consultant expert en développement communautaire spécialisé en intensification des processus naturels dans les bas-fonds de riziculture, estime qu’il y a des préalables au succès du SRI.

Dans un entretien avec SciDev.Net, il explique que "l’ensablement des sols – dû au déboisement et à l’érosion – et la salinité constituent les défis majeurs qu’il faut relever."

"Si l’on ne prend pas des précautions pour maîtriser ces deux paramètres, le succès du SRI risque d’être compromis", avertit-il.

Et d'expliquer que l’ensablement a tendance à modifier les propriétés agronomiques des sols des bas-fonds qui sont en général des sols hydromorphes, en colmatant ces bas-fonds et par conséquent, en supprimant l’inondation temporaire, ce qui provoque un déséquilibre de l’alimentation minérale du lit.

"Par ailleurs, dans une région comme la Casamance, au Sénégal, l’intrusion des eaux marines dans les bas-fonds provoque une forte salinisation des sols, surtout pendant la saison sèche", poursuit Baba Bodian.

Il faut donc, soutient-il, qu’il y ait un bon dessalement, faute de quoi il est difficile de profiter du potentiel du SRI dans de pareilles régions.

Toutefois, Gaoussou Traoré reste convaincu que "l’autosuffisance en riz sera une réalité en Afrique de l’Ouest si tous les cultivateurs adoptent le SRI" ; pour une implémentation à l’échelle du continent, il lance un appel à des actions concrètes telles que le renforcement de la communication sur le SRI, le ciblage des jeunes et des femmes dans les activités à mener, la formation d’une coalition financière et technique pour un accompagnement du processus dans la durée, l’implication de la recherche agricole pour l’adaptation du SRI aux diversités socio-agro-économiques.

Références

[1] 50,000 farmers in 13 countries: Results from scaling up the System of Rice Intensification in West Africa 
[2] Selon l’Organisation des nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l’agriculture intelligente face au climat (AIC) est une approche qui permet de définir les mesures nécessaires pour transformer et réorienter les systèmes agricoles dans le but de soutenir efficacement le développement de l’agriculture et d’assurer la sécurité alimentaire face au changement climatique.