29/07/15

Le Kenya met au point sa première variété de maïs transgénique

Kenya Maize
Crédit image: Flickr/Erfan A. Setiawan

Lecture rapide

  • La prouesse est le fruit d'une coopération entre des chercheurs locaux et des partenaires extérieurs
  • Elle devrait permettre aux agriculteurs kenyans de mettre fin aux nombreuses pertes liées aux dégâts occasionnés par les insectes nuisibles
  • Le maïs Bt kenyan doit maintenant attendre l'avis de l'autorité de régulation avant toute distribution

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Des chercheurs de la Kenya Agricultural Livestock and Research Organisation (KALRO) et leurs partenaires se veulent optimistes quant à la possibilité d'obtenir l'aval de l'Autorité nationale de biosécurité (NBA) pour la distribution de la première variété de maïs génétiquement modifié du pays.
 
Cette variété de maïs, qui possède la propriété de résister aux insectes nuisibles, est mondialement connue sous le nom de maïs Bt – Bacillus thuringiensis.
 
Son génome est artificiellement modifié par le biais d'un gène nommé cry1Ab, qui sécrète une protéine toxique pour les insectes nuisibles.  
 
Le maïs produit ainsi un "insecticide" naturel et devient résistant face à l'organisme ciblé, en l'occurrence, les insectes nuisibles.

Lourdes pertes
 
Dans un communiqué de presse, la Fondation Africaine pour les Technologies Agricoles (AATF), partenaire à l'initiative, estime que la nouvelle variété de maïs transgénique pourrait "aider les agriculteurs à augmenter leur rendement, en réduisant les dommages causés par les insectes nuisibles, contribuant ainsi à l'amélioration de leurs moyens de subsistance."
 
"Avec le maïs Bt, les agriculteurs pourraient aussi améliorer leurs rendements, tout en réduisant le recours aux insecticides, ce qui contribuerait à la protection de l'environnement", poursuit le communiqué.
 
Le dossier d'agrément, déposé vendredi, a fait l'objet d'une publication par la National Biosafety Authority (NBA), l'organisme kenyan chargé de statuer sur la sécurité des produits issus de la biotechnologie, qui a par ailleurs invité le public à lui faire parvenir ses observations.
 
Le maïs est l'aliment de base des Kenyans, mais le pays est régulièrement en proie à l'insécurité alimentaire, en raison d'un certain nombre d'aléas, notamment liés aux dégâts occasionnés par un lépidoptère, la  foreuse des tiges, connu pour réduire la production de maïs de 13 % en moyenne, soit l'équivalent de 400.000 tonnes métriques, ce qui équivaut à la quantité annuelle de maïs importée par le pays, pour un montant de 7,2 milliards de KES – environ 42 milliards de Francs CFA.
 
Sécurité alimentaire 
 
Lors d'une conférence de presse à Nairobi, le directeur général de la KALRO, Eliud Kireger, a déclaré que l'adoption de la nouvelle variété de maïs, développée grâce à la biotechnologie, contribuerait directement aux aspirations et aux objectifs d'amélioration du secteur agricole, grâce à l'application de technologies innovantes pour relever les défis nationaux en matière de sécurité alimentaire.
 

De son côté, Denis Kyetere, directeur exécutif de l'AATF, l'un des partenaires de la KALRO, a souligné que l'agrément du maïs Bt kenyan renforcerait le secteur agricole, grâce à la technologie, pour atténuer les défis rencontrés par les petits exploitants du Kenya. 
 
"Avec cette demande d'agrément, la KALRO va devenir la tête de pont du Kenya dans le groupe des 25 pays qui bénéficient de la technologie Bt dans le monde", a-t-il ajouté.
 
L'adoption de la technologie Bt a porté ses fruits dans d'autres pays, notamment en Afrique du Sud où les agriculteurs bénéficient déjà de la technologie avec un doublement des rendements chaque année.
 
Principe de précaution
 
Mais si ces technologies OGM sont populaires en Afrique de l'Est, en revanche, en Afrique occidentale, c'est le principe de précaution qui prime.

Selon Ndjido Kane, chercheur en biologie moléculaire à l'Institut Sénégalais de Recherches Agricoles (ISRA), "le Sénégal s’est doté d’une loi sur la biosécurité en 2009 et elle repose sur le principe de précaution décrit dans le cadre du Protocole de Carthagène".
 
Ce protocole dispose qu'en "cas de risque de dommages graves ou irréversibles, l'absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l'adoption de mesures effectives visant à prévenir la dégradation de l'environnement."
 
Pour Ndjido Kane, "cela signifie que le Sénégal peut décider par précaution de ne pas autoriser l’importation d’un OGM, même s’il n’existe pas suffisamment de preuves scientifiques des effets nocifs potentiels de son utilisation. Les OGM (riz doré, maïs Bt, coton Bt, niébé Bt, etc.) sont régis par cette législation."
 
Par ailleurs, il est à noter que le trait Bt est incorporé dans le maïs résistant à la sécheresse en cours d'élaboration par le projet Wema – Water Efficient Maize for Africa, Maïs économe en eau pour l'Afrique  –  pour aider les agriculteurs à réduire les dégâts occasionnés par les insectes nuisibles. 
 
Pendant la sécheresse, le maïs est particulièrement sensible aux parasites et les agriculteurs peuvent subir des pertes portant sur l'intégralité de leurs plantations.
 
Ce projet vise à développer et faire profiter aux agriculteurs des variétés de maïs résistant à la sécheresse et protégées contre les insectes nuisibles, en utilisant un éventail d'approches, y compris la sélection végétale classique et la modification génétique. 
 
Ces variétés permettront d'améliorer les rendements par temps de sécheresse modérée et de protéger le maïs contre les dommages occasionnés par les insectes nuisibles.
 
Le projet WEMA est un partenariat public-privé coordonné par l'African Agricultural Technology Foundation (AATF) et rassemble sept partenaires, dont les systèmes nationaux de recherche agricole du Kenya, du Mozambique, de l'Afrique du Sud, de la Tanzanie et de l'Ouganda, le Centre international d'amélioration du maïs et du blé (CIMMYT, de son acronyme espagnol) et la fondation Bill & Melinda Gates.