11/12/08

Il faut des données géospatiales fiables pour le développement de l’Afrique

Carte de la couverture terrestre pour l'Afrique Crédit image: NASA-GISS

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Selon Derek Clarke, chef de l’Agence nationale sud-africaine de la cartographie, l’Afrique doit faciliter l’accès et l’échange des données géospatiales.

Le développement s’effectue en relation avec le lieu et l’espace – c’est-à-dire qu’il s’opère dans un contexte spatial. Ainsi, le développement requiert des données appropriées – et plus précisément, des données géospatiales, sans lesquelles l’utilisation des outils de planification et de prise de décisions et des technologies, telles que les Systèmes d’Information Géographique (SIG), se révèle impossible, tout comme l’analyse des besoins, la planification des projets ou le contrôle des résultatsA ce jour, pourtant, les pays africains n’utilisent les données géospatiales que de manière sporadique pour appuyer le développement.

Voir les choses différemment

Le SIG est un moyen informatisé de capture, de manipulation, de stockage, de traitement, d’analyse, de modelage et d’affichage de données géospatiales. Il réunit différents types de données géospatiales, notamment des données sur les fleuves, la topographie, les routes, les villes, les sols, les précipitations ou la couverture terrestre. Sa force réside dans l’utilisation des rapports spatiaux entre ces éléments pour créer de nouvelles données qui, sans le SIG, passeraient inaperçues. 

Depuis les soins de santé primaires jusqu’à la planification de la sécurité alimentaire en passant par les secours aux sinistrés et la gestion de l’eau, les données géospatiales et les technologies des SIG peuvent contribuer au succès des projets de développement.

Ainsi, elles ont permis de faire face aux niveaux élevés de nutriants dans le Lac Victoria qui favorisent le développement de la jacinthe d’eau, affectent la qualité de l’eau et tuent les poissons. En utilisant les SIG, il a été possible d’évaluer l’ampleur du problème et de remonter jusqu’à son origine – à savoir les mauvaises pratiques agricoles utilisées dans le bassin hydrographique du lac. Les agriculteurs reçoivent désormais aide et conseils, afin d’optimiser leur recours aux engrais et d’améliorer leurs pratiques de labourage.

En Afrique du Sud, les conseillers agricoles et les agriculteurs utilisent eux-mêmes un SIG qui réunit des données telles que les précipitations saisonnières, la disponibilité de l’irrigation, le type et la profondeur du sol, la hauteur et la pente du sol, pour planifier l’agriculture. L’analyse au moyen du SIG permet aux agriculteurs de choisir où planter quelle culture ou où élever quel animal.

Des données sous-utilisées et sous-financées

Pourtant, en dépit de l’importance des données et des technologies géospatiales, peu de gouvernements africains y ont recours. Pourquoi le SIG n’est-il utilisé que d’une manière ad hoc dans des applications au développement, et principalement par les agences de développement ?

La cause réside probablement dans l’absence d’informations fiables et de capacité technique sur le continent. L’Afrique est mal cartographiée – comme l’a confirmé une récente étude de données géospatiales. Là où les données géospatiales existent, elles sont en majeure partie soit dépassées soit fausses. 

Une telle situation pourrait s’expliquer du fait qu’il manque aux pays africains (et aux régions du continent) une approche pragmatique de collecte et de conservation des données géospatiales. De nombreuses agences africaines de cartographie manquent de personnel et de moyens, compliquant la collecte ou l’actualisation des données géospatiales.

Les sociétés privées, d’ordinaire, ne collectent que des données ayant une valeur commerciale. Par ailleurs, si les organisations internationales et les bailleurs de fonds collectent des données géospatiales pour des projets spécifiques, ces informations ne sont ni gardées ni cédées dans le but de contribuer à la constitution de données géospatiales en tant que patrimoine national.

Trouver la bonne information

Savoir quelle information existe et pouvoir y accéder  : deux des plus gros obstacles à l’utilisation des données géospatiales existantes en Afrique. Toute personne détenant des données géospatiales devrait faire plus d’efforts pour enregistrer et échanger leurs avoirs. C’est précisément ce genre de métadonnées (des données portant sur des données) qui permettent aux gens de trouver ce dont ils ont besoin. En évitant la collecte de données redondantes, on épargnerait ainsi bien du temps et des efforts, ressources qui pourraient être mieux consacrés à la collecte de nouvelles données ou au renforcement de données existantes mais incomplètes.

Pour ce faire, il faudra des personnes qualifiées travaillant dans des organisations d’appui. Pourtant, dans de nombreux pays africains, les contraintes budgétaires obligent la fonction publique à geler le recrutement aux postes de cartographie et la création de nouveaux postes. Et peu de pays africains proposent des programmes universitaires préparant à un diplôme en sciences d’information géospatiale. Ainsi, la masse critique de professionnels en géographie spatiale dont l’Afrique a besoin ne se constituera pas rapidement.

L’Afrique a besoin de politiques claires, de ressources appropriées et de dirigeants visionnaires déterminés à faciliter l’accès et l’échange de données géospatiales.

Les gouvernements africains doivent reconnaître que les données géospatiales sont un acquis national qui viennent soutenir le développement. Ces données doivent être transformées en connaissances, grâce aux SIG et à d’autres technologies géospatiales, pour le mieux-être de l’Afrique.

Derek Clarke est le Chef de l’Agence nationale sud-africaine de la Cartographie (Chief Directorate: Surveys and Mapping, South Africa) et président du Groupe de travail sur la cartographie de l’Afrique pour l’Afrique (Working Group on Mapping Africa for Africa). Les opinions exprimées ici sont personnelles et ne reflètent pas nécessairement celles des organisations pour lesquelles il travaille.