27/06/08

Il est temps de passer de la parole aux actes dans la recherche en matière de santé

Un médecin éthiopien effectuant une recherche Crédit image: WHO/TDR/Crump

Envoyer à un ami

Les coordonnées que vous indiquez sur cette page ne seront pas utilisées pour vous envoyer des emails non- sollicités et ne seront pas vendues à un tiers. Voir politique de confidentialité.

Les ministres africains se sont engagés à un ensemble de mesures concrètes pour stimuler la recherche en santé dans leurs pays. Il s’agit maintenant de les mettre en place. 

C’était très encourageant d’entendre des ministres de la recherche scientifique et de la santé venus de toute l’Afrique s’engager à développer la recherche pour la santé, à la réunion de cette semaine (23-26 juin) en Algérie. Lors de cette réunion, les ministres de 17 pays africains ont annoncé un engagement collectif à donner une plus grande priorité à la recherche en santé, au niveau national et régional, et sur l’ensemble du continent. 

L’amélioration de la santé dans le monde en développement est l’un des principaux Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD). Parmi les OMD il y a, par exemple, celui de réduire de deux tiers le taux de mortalité chez les enfants de moins de cinq ans, et de trois quarts la mortalité maternelle, et d’être plus efficace dans la lutte contre le paludisme et autres maladies tropicales. Aucun de ces objectifs ne sera atteint sans une vaste recherche sur de nouvelles méthodes de diagnostic et de traitement. 

La réunion d’Alger a été organisée comme une réunion préparatoire pour le Forum ministériel mondial sur la recherche pour la santé qui est prévu à Bamako, au Mali, en novembre 2008. 

Son principal résultat a été la «Déclaration d’Alger», une liste méritoire de 22 mesures que les ministres ont convenu de mettre en œuvre avant fin 2009, et qui ont pour objectif d’assurer la recherche en santé nécessaire à la réalisation des OMD. 

Ces mesures comprennent notamment un financement accru de la recherche en santé et le renforcement des capacités de recherche par les gouvernements africains, et l’amorce de mécanismes de supervision scientifique et éthique de toutes ces activités. Les ministres ont également convenu de «promouvoir la traduction des résultats de la recherche en politiques et en actions en créant des mécanismes et des structures appropriés, y compris la promotion de réseaux de chercheurs, de décideurs et de politiques pour une action de santé publique basée sur les savoirs fiables». 

Les défis de la Communication

Pour autant que ces engagements soient respectés, la santé en Afrique recevra un important coup de pouce. Mais il est apparu clairement, au cours des discussions à Alger, que plusieurs questions clés doivent être abordées d’urgence pour que cela devienne réalité.

L’une d’elle est la nécessité d’une meilleure information sur les priorités du continent en matière de santé – et une idée plus claire parmi les pays africains eux-mêmes sur la meilleure manière d’aborder ces priorités-là par la recherche. 

Les agences donatrices du monde développé – qui fournissent une bonne partie du financement pour ces activités de recherche – sont souvent critiquées par les acteurs africains pour avoir cherché à imposer un ordre du jour qui reflète les propres priorités des bailleurs de fonds. Mais plusieurs de ces agences insistent sur le fait qu’elles seraient ravies d’engager un dialogue substantiel, à deux sens, sur ce que devraient être leurs priorités de recherche. 

Cela signifie que les pays africains doivent développer leurs capacités propres à établir leurs priorités en matière de recherche. Cela nécessite deux composantes essentielles: des informations adéquates sur l’état des efforts de recherche et le développement de compétences professionnelles chez les administrateurs de recherche et des représentants du gouvernement – cela s’inscrit dans le besoin plus large de développer une solide infrastructure de recherche. 

Une autre exigence est le renforcement des réseaux pour faire en sorte que les chercheurs africains et des hommes politiques – y compris certains ministres – communiquent les uns avec les autres de manière plus efficace. Trop souvent, il y a un fossé entre la compréhension qu’ont les scientifiques de ce qui est nécessaire pour que la recherche en santé soit mise en application, et la volonté des décideurs de prendre les mesures adéquates pour rendre cette recherche possible. 

Les considérations éthiques 

Une autre nécessité est le renforcement des capacités nationales à prendre en charge les dimensions éthiques de la recherche en santé – en particulier au moment où les activités des chercheurs du monde développé, y compris les responsables de la conduite d’essais cliniques à grande échelle pour l’industrie pharmaceutique, sont sous les projecteurs. 

Une enquête sur les capacités à mener des examens éthiques dans 634 instituts de recherche dans 43 pays a été présentée à la réunion d’Alger par une équipe de l’OMS. Ils ont constaté que la moitié de ceux qui ont une "haute activité de recherche" n’ont pas de politiques écrites exigeant des chercheurs qu’ils obtiennent le consentement éclairé des participants aux essais. 

Il y a encore beaucoup à débattre sur la façon dont la situation pourrait être améliorée. Néanmoins, il est clair que la recherche en santé en Afrique doit être menée d’une façon plus éthique que par le passé. Et renforcer les capacités à atteindre cet objectif doit faire partie intégrante des plans futurs.  

Une collaboration plus étroite 

Une troisième priorité qui est ressortie de la réunion a été la nécessité d’encourager une plus grande collaboration en matière de recherche. La déclaration finale en appelle à la promotion d’une coopération équitable, et du transfert et de la collaboration technologique, soulignant que cela devait avoir une double dimension Nord-Sud et Sud-Sud. 

Mais il est apparu clairement lors de la réunion que les délégués – pour la plupart des ministres africains et des chercheurs – éprouvaient un plus grand intérêt pour la seconde. Ils étaient plus intéressés par la façon dont les pays africains pourraient s’échanger des connaissances entre eux qu’à recevoir des connaissances des institutions du Nord, un sentiment partagé par Elias Zerhouni, directeur des National Institutes of Health aux Etats-Unis.

Enfin, il y a eu un accord général parmi les délégués d’Alger qu’aucun de ces objectifs ne pouvait être atteint sans un financement adéquat. 

Les participants ont largement convenu que non seulement les pays africains devraient chercher à augmenter leurs dépenses de recherche et développement jusqu’à au moins un pour cent de leur produit intérieur brut – un objectif approuvé par le sommet de l’Union africaine de l’an dernier – mais qu’au moins dix pour cent des dépenses de recherche devraient être consacrées à la recherche en santé. 

Mais, comme les ministres de la science le savent bien, il y a un grand pas entre mettre en avant une liste de souhaits et s’assurer que ceux qui contrôlent les cordons de la bourse soient prêts à écouter et à agir.

La Déclaration d’Alger fourni un cadre d’action. Ce qu’il faut maintenant, c’est l’engagement politique dans chaque pays africain de transformer ces paroles en actes. 

David Dickson, directeur, SciDev.Net

Link to the full Algiers Declaration [25kB]