18/11/08

Les désaccords entre chercheurs et décideurs politiques ‘entravent la recherche’

Fournir de la névarapine aux femmes enceintes pour empêcher la transmission du VIH à leurs enfants : un exemple de bonne collaboration entre chercheurs et décideurs. Crédit image: Flickr/SteveMcN

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[BAMAKO] Les relations tendues entre chercheurs et décideurs politiques entravent les tentatives d’améliorer la santé en Afrique, a-t-on rapporté lors du Forum ministériel mondial sur la Recherche pour la Santé.

Les deux groupes se perçoivent comme ayant des visions du monde différentes et des délais d’action différents – et les décideurs accusent les scientifiques de leur fournir des informations excessivement techniques et inaccessibles.

Telles sont les résultats d’une enquête auprès de scientifiques et de décideurs politiques, réalisée par le Conseil de la Recherche médicale au service du Développement (COHRED), la Direction suisse pour le Développement et la Coopération et l’Institut tropical suisse.

Ces résultats ont été présentés hier (17 novembre) au forum qui s’est tenu à Bamako, au Mali.

L’équipe a envoyé un questionnaire à remplir sur Internet à des chercheurs africains et occidentaux et à des décideurs africains concernant leurs expérience d’interaction des uns avec les autres. Des entretiens semi-structurées ont également été réalisés.

Selon Julie Murugi, une chargée de recherches au COHRED, qui a présenté les résultats, quatre-vingt-quinze pour cent des personnes interrogées estiment qu’une bonne interaction entre chercheurs et décideurs est indispensable pour accroître l’impact de la recherche.

Les personnes interrogées ont prône la mise en place de nouveaux mécanismes destinés à favoriser l’interaction entre les chercheurs et les décideurs. Certains ont suggéré la création de moyens d’encouragement pour inciter chacun des groupes à s’impliquer dans les activités de l’autre ; ainsi, des institutions pourraient encourager les chercheurs à communiquer ailleurs que dans leur domaine habituel des journaux scientifiques. La rédaction de dossiers destinés à un public plus large favoriserait la prise, à l’échelle nationale, de décisions politiquesfondées sur la science.  

Or, les chercheurs ne sont pas nécessairement les personnes les mieux placées pour rédiger de tels dossiers. C’est ce qu’a affirmé Fiona Godley, la rédactrice en chef du British Medical Journal, au forum. Au contraire, elle suggère le recours à des ‘intermédiaires qualifiés’.

Nelson Sewankambo, le doyen de la faculté de médicine de l’Université de Makarere, en Ouganda, a exhorté les chercheurs à ne pas abandonner leurs travaux de recherche après leur publication. Les scientifiques devraient plutôt, selon lui défendre leurs dossiers, en poursuivant le dialogue avec les décideurs politiques. Ceci pourrait finir par conduire chercheurs et décideurs à collaborer sur la mise sur pied d’une stratégie de vulgarisation.

Sewankambo a cité un exemple montrant à quel point les deux communautés pouvaient bien travailler ensemble si les bonnes conditions sont réunies – la mise sur pied d’une politique pour fournir de la névarapine aux femmes enceintes dans le but d’éviter la transmission du VIH de la mère à l’enfant. Cette pratique a été introduite deux années seulement après la publication des résultats d’une étude.

‘La recherche a apporté une solution à une question brûlante à cette époque-là. Le VIH préoccupait les décideurs, ils étaient angoissés et avaient le regard tourné vers la recherche’ , a-t-il soutenu.