16/10/12

Les organismes de recherche scientifique ‘trop peu engagés avec le public’

L’étude affirme que l’implication avec le public est un aspect essentiel du travail des chercheurs Crédit image: Flickr/CIFOR

Envoyer à un ami

Les coordonnées que vous indiquez sur cette page ne seront pas utilisées pour vous envoyer des emails non- sollicités et ne seront pas vendues à un tiers. Voir politique de confidentialité.

Il est moins probable que, dans le monde en développement, les organismes de recherche scientifique contribuent à promouvoir la participation du public à la science autant que leurs homologues du monde développé, indique une étude.

Dans l’article qu’ils ont publié le 24 août dans la revue Public Understanding of Science, Sarah Palmer et Renato Schibeci passent en revue les exigences des organismes de financement de la recherche en Afrique, dans les Amériques, en Asie, en Europe et en Océanie au cours de la période 2004-2011.

Ils constatent que la majorité des pays mettent l’accent sur la sensibilisation du public au lieu de travailler avec lui. Plus précisément, il est peu probable que, dans les pays en développement, les organismes de financement encouragent la participation du grand public.

Les chercheurs ont identifié divers types de communication scientifique, allant du ‘modèle du déficit des connaissances’ – principale forme de communication scientifique depuis 1985, dans laquelle les chercheurs sensibilisent le public à leurs découvertes – à une approche dite ‘délibérative’, dans laquelle le public détermine le programme de recherche et s’implique d’un bout à l’autre de sa mise en pratique.

Ils ont ensuite analysé les politiques de promotion de la collaboration avec le public prônées par les organismes de financement en consultant leurs directives et leurs sites Internet et en obtenant sur des sites Internet externes des informations supplémentaires sur l’état de l’implication auprès du public et sur les activités des organismes nationaux.

Les auteurs concluent que le ‘modèle du déficit’ reste la forme de communication la plus répandue.

Dans les pays en développement, toutefois, on s’est progressivement rendu compte que le public recelait aussi de précieuses connaissances à partager, et qu’il faudrait mettre davantage l’accent sur sa participation.

Les organismes qui prennent cette donne particulièrement bien en compte sont notamment le Wellcome Trust, au Royaume-Uni, le 7ème PC (programme cadre) de la Commission européenne et le Conseil national australien de la santé et de la recherche médicale.

Les pays en développement semblent suivre le modèle du déficit davantage que les pays développés, affirme, dans un entretien avec SciDev.Net, Schibeci, maître de conférences en sciences de l’éducation à l’Université Murdoch, en Australie.

En Chine et en Amérique latine, le leitmotiv semble être la ‘sensibilisation du public’, ce qui se limite souvent à la transmission des connaissances. C’est pourtant le public qui subit les conséquences des décisions scientifiques.

Pour Schibeci, les chercheurs hésitent souvent à s’investir auprès du public parce qu’ils n’ont pas le temps et qu’ils manquent des compétences et de la motivation nécessaires, comme la reconnaissance par leurs pairs et la facilité à obtenir des financements pour d’autres projets. Toutefois, poursuit-il, ils doivent comprendre que le fait de communiquer sur leur travail n’est pas la cerise sur le gâteau, mais une partie du gâteau.

Cependant les organismes internationaux de financement opèrent actuellement de profonds changements. Il s’agit par exemple de la Fondation internationale pour la science (FIS), qui exige des candidats aux subventions qu’ils expliquent de quelle manière leur recherche trouvera sa place « dans les réalités environnementales et socioéconomiques de la région » et comment ils comptent « mettre les résultats à la disposition des intervenants locaux, comme l’industrie et les agriculteurs locaux ».

Graham Haylor, directeur de l’IFS, révèle que l’engagement avec le public dans les pays en développement va non seulement renforcer leurs capacités en tant que scientifiques, mais aussi améliorer leurs capacités de négociation à travers une collaboration vaste et sur un pied d’égalité, avec les agriculteurs, les entrepreneurs et les décideurs politiques [et non en qualité de supérieurs, comme l’implique le modèle du déficit].

Ruth Ladenheim, secrétaire chargée de la planification et de la politique en matière d’innovation scientifique, technologique et productive au ministère argentin de la Science, de la technologie et de l’innovation productive (MINCYT), estime que l’engagement auprès du public est un concept novateur dans de nombreux pays en développement, mais que « cela ne signifie pas que leur… engagement est insuffisant comparé aux pays développés.

Elle souligne que l’Argentine fait participer le public à la recherche avec une « conviction » sans précédent et cite comme exemples d’initiatives TECNOPOLIS, un parc d’exposition public sur la science, la technologie et l’innovation,TEC TV, la première chaîne de télévision dédiée à la science et à la technologie en Amérique latine  et un concours annuel de l’innovation auquel même les non-scientifiques peuvent participer.