20/09/16

La recherche, victime collatérale de la crise postélectorale au Gabon

Iphametra
Institut de Pharmacopée et de médecine traditionnelle du Gabon (Iphametra)

Lecture rapide

  • Les documents détruits représentent “un siècle et demi de recherche”
  • Le directeur du centre appelle à respecter la neutralité des scientifiques
  • Il appelle également à l’aide la communauté internationale

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Cent mille échantillons de plantes, 3500 espèces de plantes décrites, ainsi que des centaines de documents issus de la recherche ont été détruits par des émeutiers, après le saccage des locaux de l’Institut de la pharmacopée et de la médecine traditionnelle (Iphametra).
 
Des équipements scientifiques ont été détruits, le matériel informatique a été pillé et le bâtiment a été entièrement endommagé, a déclaré Henri Bourobou, directeur de l’Iphametra, dans un entretien avec SciDev.Net.
 
L’évaluation des dégâts se poursuit, mais selon Henri Bourobou, le Gabon a perdu l’équivalent d’un siècle et demi de recherche.
                               
Dans un vibrant plaidoyer, le chercheur invite les Africains au respect de la recherche, en particulier dans un domaine aussi sensible que celui de la médecine traditionnelle, du fait que ce type de recherche requiert en amont un énorme travail de transmission de la connaissance par voie orale.

“La médecine traditionnelle est une science de la parole et du dialogue. Il est impossible de réveiller tous les anciens qui nous ont transmis ce précieux savoir, ils sont morts.”

Henri Bourobou
Directeur de l'Iphametra

 
La médecine traditionnelle est une science de la parole et du dialogue. Il est impossible de réveiller tous les anciens qui nous ont transmis ce précieux savoir, ils sont morts, a-t-il expliqué.
 
Il s’ensuit que les connaissances qu’ils nous ont transmises risquent de disparaître avec ce drame. J’ai pleuré cinq jours durant, devant tant d’ignorance, parce que je sais ce que cela requiert de restaurer tout ce qui a disparu.
 
La recherche n’a pas de parti pris, a-t-il poursuivi.
Elle sert aussi bien le pouvoir que l’opposition et a vocation à servir le développement.
 
Lancé il y a 40 ans, l'Iphametra s’est doté en 2012 d'un hôpital dénommé hôpital village, qui se partage traditionnellement les malades avec le Centre Hospitalier Universitaire de Libreville.

Anicet Edom N'zé, ancien pensionnaire de l'hôpital, déplore les dégâts occasionnés:

C'était un complément indispensable du CHU; je ne sais combien de temps cela va prendre pour le restaurer, mais entre-temps, que de gens souffriront de ce gâchis!, a-t-il déclaré par téléphone à SciDev.Net.
 
L'Iphametra a pour vocation, entre autres, d’aider à établir un lien entre la médecine moderne et la médecine traditionnelle et est par conséquent reconnu d'utilité publique.
 
Précisément, dans le but de redonner ses lettres de noblesse à l’établissement, son directeur en appelle à la communauté internationale.
 
Je demande à toutes les bonnes volontés de m’aider à reconstruire ces infrastructures, pour que nous puissions traiter pas seulement les Africains, mais le monde entier, parce que la médecine traditionnelle n’a pas de couleur, elle soigne tous les êtres humains.
 
Le Gabon est entré dans une période d’incertitude consécutive au contentieux électoral né de la présidentielle du 27 août 2016, officiellement remportée par le président sortant Ali Bongo Ondimba.
 
Mais le candidat de l’opposition, Jean Ping, qui conteste les résultats annoncés par la Commission électorale nationale autonome et permanente (Cenap), a déposé un recours devant la Cour Constitutionnelle.
 
Celle-ci devrait rendre son verdict au plus tard le 23 septembre.
 
Entre-temps, les émeutes qui ont suivi l’annonce des résultats provisoires, ont fait plusieurs morts et d’importants dégâts matériels.