11/01/12

Des ‘salaires de niveau international’ promis aux scientifiques ougandais

Museveni : 'Le gouvernement paie suivant le protocole, pas le rendement' Crédit image: Flickr/Dispatch_UK

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[KAMPALA] Le président ougandais, Yoweri Museveni, a de nouveau promis de porter les salaires des scientifiques à un niveau proche des normes internationales, lors d’un discours prononcé à l’Université de Makerere en fin d’année dernière (24 novembre).

Museveni a déclaré que la science et la technologie étaient essentielles pour sortir l’Afrique de la pauvreté et a vivement conseillé aux scientifiques ougandais de ne pas se laisser attirer par l’Europe et l’Amérique du Nord. "Les scientifiques ougandais devraient recevoir des salaires proches du niveau international. Et cela sera fait."

Toutefois, Museveni a affirmé qu’il existait une certaine résistance de la part de son gouvernement, qui voulait que ces salaires soient basés sur le "protocole" plutôt que sur la profession et la contribution économique. A l’heure actuelle, les députés ougandais ont un salaire approximativement dix fois supérieur à celui des scientifiques.

Museveni avait pris un engagement similaire en 2010, débouchant en juillet de cette année sur une hausse de salaire de 30 pour cent, financée avec US$ 8 millions issus du budget 2010-2011. Les scientifiques ont accueilli favorablement cette hausse, tout en maintenant qu’ils pourraient gagner six à dix fois plus à l’étranger.

Un responsable du ministère des finances, de la planification et du développement économique contacté la semaine dernière par SciDev.Net, a confirmé qu’il y aurait une augmentation de salaire au cours du prochain exercice, mais qu’elle serait "insignifiante". Le responsable en question a déclaré que cette hausse refléterait la contribution individuelle des scientifiques à la croissance économique.

Un économiste principal au sein du même département ministériel a déclaré les scientifiques devraient être rémunérés suivant leur productivité. Mais "qu’est-ce que les scientifiques ougandais ont produit ? Il n’y a pas d’innovations", a-t-il affirmé.

Pour Keith Muhakanizi, sous-secrétaire par intérim au trésor au ministère des finances, l’assiette fiscale de l’Ouganda est petite et tirerait profit d’innovations scientifiques à valeur économique.

Il explique que les scientifiques sont soutenus par des initiatives comme le Centre d’incubation des technologies alimentaires et des entreprises (Food Technology and Business Incubation Centre, en anglais) de l’Université de Makerere, créé en 2009 avec un financement du gouvernement de 4485 milliards de shillings ougandais  (US$ 1,8 million). Le budget 2010-2011 a alloué une somme supplémentaire de US$ 540 000 à l’Institut ougandais de recherche industrielle pour une recherche et innovation de quasi-marché.

Or des responsables du ministère des finances soutiennent que la seule innovation issue de ces investissements serait un vaccin pour les volailles, lancé l’année dernière.

Paul Nampala, directeur exécutif de l’Académie nationale des sciences de l’Ouganda, rejette les accusations selon lesquelles les scientifiques n’apportent pas une contribution à l’économie. Pour lui, le rôle des scientifiques est d’innover ; la commercialisation incombant aux entrepreneurs.

Charles Mugoya, gestionnaire de programme au sein de l’Association pour le renforcement de la recherche agricole en Afrique orientale et centrale, affirme que Museveni a besoin d’une masse critique de partisans dans son gouvernement pour réaliser une substantielle augmentation de salaire. "La meilleure pratique dans le monde entier est l’indexation des salaires sur la profession et la contribution à l’économie, pas sur un protocole," explique-t-il dit.

Eriabu Lugujjo, chef du département de génie électrique à l’Université de Makerere, s’est réjoui de la perspective d’une éventuelle hausse de salaire. "On renonce à un beaucoup de choses au cours de notre formation scientifique, et pour gagner trois fois rien," a-t-il regretté.

Museveni a pour la première fois promis d’augmenter les salaires des scientifiques après son arrivée au pouvoir en 1986.