21/12/15

Forte résistance à un antipaludéen pour femmes enceintes

Coartem Disposable medication
Crédit image: Frederic Courbet Panos

Lecture rapide

  • L’utilisation de médicaments pour gérer le paludisme pendant la grossesse pourrait réduire la mortalité maternelle
  • Une étude menée en Tanzanie découvre une forte résistance des parasites du paludisme à un médicament courant
  • Des experts recommandent d'envisager l'utilisation de médicaments efficaces

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Selon une étude, la résistance rapide et généralisée à l'antipaludéen appelé sulfadoxine-pyriméthamine (SP) en Tanzanie pourrait saper l'amélioration observée en matière de traitement du paludisme pendant la grossesse.

L'étude, menée en Tanzanie, a établi que la prévalence des parasites du paludisme résistant à la sulfadoxine-pyriméthamine reste élevée, exposant ainsi les femmes enceintes et les nouveau-nés à un risque de santé considérable.

Selon les chercheurs, en provenance de la Belgique et de la Tanzanie, leur but était de déterminer l'état de la résistance à ce médicament six ans après son abandon en tant que médicament de première intention pour le traitement du paludisme simple dans le pays.
 

“Les autorités devraient trouver des interventions appropriées dans les régions endémiques de manière à réduire la charge parasitaire.”

Abdoulaye Djimde

Université des Sciences, des Techniques et des Technologies de Bamako

Mali

Ce médicament est plutôt utilisé pour le traitement préventif intermittent du paludisme, au cours duquel les femmes enceintes le reçoivent lors des visites prénatales de routine, qu'elles soient ou non infectées par le paludisme.

Par le biais d’un échantillonnage transversal, ils ont sélectionné 264 patients qui étaient âgés d'au moins six mois, vivaient sur l'un des trois sites régionaux – Muheza, Muleba et Nachingwea – en Tanzanie continentale et se rendaient dans des établissements de santé pour le traitement du paludisme, de mai à août 2013.

Les chercheurs ont analysé les échantillons sanguins des patients pour rechercher des quantités élevées de gènes doubles mutants PfdhfrPfdhps, qui indiquent une résistance aux médicaments.

"La prévalence des Pfdhps, K540 E à Muheza était sensiblement plus élevée (95,4 pour cent) par rapport aux autres sites", notent les auteurs dans la revue Malaria Journal publiée le mois dernier (05 novembre).

Les chercheurs ajoutent que l'OMS recommande que la sulfadoxine-pyriméthamine ne soit pas utilisée pour la prévention intermittente du paludisme pendant la grossesse si la prévalence de ce gène est supérieure à 95 pour cent.

Vito Baraka, un co-auteur de l'étude et chercheur à l'Institut national de recherche médicale (NIMR), basé en Tanzanie, déclare à SciDev.Net qu’"en raison de la [nature] changeante de l'épidémiologie du paludisme en Tanzanie, nous avons  voulu connaître la dynamique de la transmission de la résistance à la sulfadoxine-pyriméthamine dans ce pays".

Selon Baraka, le traitement préventif intermittent du paludisme contribue à réduire les épisodes de paludisme associé à la grossesse, le risque d'anémie, le faible poids à la naissance, la mortalité néonatale et d'autres conséquences associées.

Mais, Baraka laisse entendre que les résultats semblent indiquer un besoin urgent de mener des études sur l'efficacité et l’innocuité en vue de déterminer les médicaments de substitution pour le traitement préventif intermittent du paludisme pendant la grossesse.

"En outre, nous devons accroître les efforts de lutte [tels que] le dépistage précoce par des tests de diagnostic rapides, la couverture en moustiquaires et la lutte antivectorielle dans ces localités où la résistance se trouve à des niveaux alarmants", déclare Baraka à SciDev.Net.

Il ajoute: "Actuellement, il y a des essais cliniques en cours visant à évaluer les alternatives au traitement préventif intermittent du paludisme pendant la grossesse avec la sulfadoxine-pyriméthamine au Ghana, au Kenya, au Mali et en Zambie qui incitent à l’optimisme que nous pouvons remplacer cette sulfadoxine-pyriméthamine  par des médicaments plus efficaces tels que le co-trimoxazole, la dihydroartémisinine-pipéraquine et l’artéméther-luméfantrine, si cela est prouvé".

Abdoulaye Djimde, chef de l’Unité d'épidémiologie moléculaire et de résistance aux médicaments de l'Université des sciences, des techniques et des technologies de Bamako, au Mali, convient que les femmes enceintes ne tirent pas profit de la sulfadoxine-pyriméthamine, et qu’il est nécessaire de changer maintenant ce traitement  en combinaisons thérapeutiques base d'artémisinine (CTA) utilisées comme médicament de première intention pour le traitement du paludisme.

"Toutefois, les autorités devraient trouver des interventions appropriées dans les régions endémiques de manière à réduire la charge parasitaire", affirme Djimde, soulignant la nécessité d'une éducation du public sur la façon d’empêcher les piqûres de moustiques à travers la destruction de leurs sites de reproduction, et l’encouragement des femmes enceintes à se rendre dans des cliniques, au besoin.