19/02/13

L’absence de technologie, frein à la détection des médicaments hors normes

Malaria Medication
Crédit image: Flickr/World Bank Photo Collection

Lecture rapide

  • Les coûts élevés, une formation et des infrastructures inadéquates sont un obstacle pour le contrôle des médicaments dans les pays pauvres
  • Un autre rapport révèle que les antituberculeux non conformes aux normes inondent les marchés de ces pays
  • Les origines des médicaments non conformes et la définition d'une meilleure stratégie pour résoudre ce problème, sont au centre d'un débat houleux.

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[NEW DELHI] Les médicaments contrefaits et ceux qui ne répondent pas aux normes sont une menace pour la santé publique, leur fabrication et leur commercialisation sont des infractions faciles et parmi les moins détectées dans le monde — si l'on en croit un rapport qui préconise un meilleur accès aux nouvelles technologies pour résoudre ce problème.

Selon le rapport annuel de l'Institute of Medicine (IOM) des Etats-Unis rendu public la semaine dernière (13 février), cette situation s'est aggravée en raison des insuffisances dans le contrôle de la qualité des médicaments dans les pays pauvres et les pays à revenus intermédiaires, où la mauvaise formation des chimistes et l'inadéquation des infrastructures sont des obstacles fréquents.

Les coûts de développement des nouvelles technologies de détection sont un autre obstacle pour la mise à disposition de technologies solides, durables, facilement utilisables et peu onéreuses, conclut le rapport.

Il suggère quelques mesures pour améliorer la capacité des gouvernements à détecter les produits contrefaits ou ne répondant pas aux normes. Il s'agit notamment de rendre les technologies de détection plus accessibles dans les pays pauvres et les pays à revenus intermédiaires, et garantir des technologies et techniques de terrain abordables, durables, faciles à utiliser et à entretenir.

Il recommande au National Institute of Standards and Technology [Institut national des normes et des technologies] des Etats-Unis de « financer la mise en place d'un répertoire central pour les technologies innovantes de détection, d'échantillonnage et d'analyse, notamment les technologies de contrôle rapide, les technologies de terrain et les évaluations sophistiquées en laboratoire, pour la détention des médicaments ne répondant pas aux normes ou des médicaments contrefaits ».

Il préconise en outre la conclusion d'un accord international sur un projet de code de bonnes pratiques élaboré par l'OMS, le Système d'assurance qualité type, qui inclurait « des directives sur la surveillance, la régulation et l'application des normes », qui serait adopté par tous les pays.

Le rapport fait suite à une étude publiée en ligne ce mois-ci dans l'International Journal of Tuberculosis and Lung Disease, qui conclut que « les médicaments ne répondant pas aux normes et les médicaments contrefaits sont facilement accessibles… et contribuent probablement à accroître la résistance aux antituberculeux dans les pays pauvres et les pays à revenus intermédiaires.

Cette étude s'est concentrée sur deux traitements de la tuberculose, l'isoniazide et la rifampicine. Des échantillons de ces médicaments ont été achetés auprès des pharmacies dans 19 villes africaines mais aussi au Brésil, en Chine, en Russie, en Thaïlande et en Turquie.

Sur plus de 700 échantillons d'antituberculeux, 9 pour cent n'ont pas passé les contrôles de qualité élémentaires. Avec un taux d'échec de 16 pour cent en Afrique, 10 pour cent en Inde et environ 4 pour cent dans les autres pays.

Le rapport américain affirme que la qualité des médicaments produits par les sociétés pharmaceutiques varie selon le lieu de distribution. Souvent, les médicaments de meilleure qualité sont produits pour les pays riches, où le contrôle des médicaments est plus rigoureux, tandis que ceux de qualité inférieure se retrouvent dans les pays pauvres et les pays à revenus intermédiaires où les normes de contrôle sont généralement moins élevées.

« Les entreprises parviennent à proposer les prix les moins élevés en achetant des ingrédients contenant des impuretés et en prenant des raccourcis dans les formules », poursuit le rapport. Les pays comme l'Inde, où la prévalence des médicaments contrefaits est élevée, enregistrent aussi un taux d'opérations de lutte contre les médicaments contrefaits faible.

Dans un entretien accordé à SciDev.Net, Hans V. Hogerzeil, professeur de santé mondiale à l'Université de Groningen, aux Pays-Bas, et membre du Comité de l'IOM à l'origine du rapport estime que c'est la preuve que même s'il est de notoriété publique pour tous que de nombreux médicaments contrefaits proviennent d'Inde, le gouvernement indien, tant au niveau fédéral qu'au niveau des Etats, n'accorde aucune attention à la qualité des médicaments en général, et des médicaments contrefaits en particulier ».

Cela fait partie d'une « stratégie politique du gouvernement déjà ancienne consistant à placer les intérêts industriels au-dessus de la santé publique, ajoute-t-il.

Mais Mira Siva, militant pour le droit à la santé publique, se montre sceptique quant aux inquiétudes liées aux médicaments contrefaits, qui selon lui sont des tentatives voilées de défense des grosses multinationales au détriment de plus petites entreprises qui produisent des médicaments génériques au Brésil et en Inde.

« Je ne suis pas d'accord avec ceux qui affirment que tout est contrefaçon, dit-elle. Ils essaient de présenter tout ce qui provient d'Inde ou de plus petits pays comme inutile et dangereux. Pourquoi une entreprise […] fabriquerait-elle des médicaments ne répondant pas aux normes susceptibles de nuire à sa réputation ? De même, comment les petits acteurs du marché pourraient-ils exporter des médicaments contrefaits? »