09/02/16

Afrique centrale : 7% des arbres déterminent le bilan carbone forestier

Forêt d'Afrique centrale
Crédit image: Flickr / Alec Frazler

Lecture rapide

  • 7% seulement des arbres déterminent 90% de la variation des stocks de carbone.
  • Il s’agit de grands arbres et de quelques espèces hyperdominantes
  • La gestion des forêts tropicales est capitale contre le réchauffement climatique

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Selon les résultats d’une étude publiés en fin 2015, les grands arbres et quelques espèces hyperdominantes jouent un rôle majeur dans le stockage du carbone et la structuration des forêts d’Afrique centrale.
 
L’étude a été menée par l’Université libre de Bruxelles et le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), en collaboration avec divers instituts de recherche comme l’Institut de recherche pour le développement (IRD), le Center for International Forestry Research au Cameroun (CIFOR), les universités d’Oxford (Grande Bretagne), de Bangui (Centrafrique), de Buea et de Yaoundé (Cameroun), mais également avec la Wildlife Conservation Society en République démocratique du Congo.

“Il suffit d’avoir suffisamment d’informations sur les plus grands arbres, soit 5% de l’ensemble, pour connaître le reste de la structure de la forêt”

Jean-François Bastin
Université libre de Bruxelles

Elle a porté sur 10 000 arbres inventoriés dans 175 parcelles réparties entre le Cameroun, le Gabon, la République démocratique du Congo (RDC) et la République centrafricaine.
 
"Premier résultat de cette étude : la structure de la forêt tropicale africaine, caractérisée par l’abondance de petits arbres et la moindre présence de grands arbres, est stable. Par conséquent, il suffit d’avoir suffisamment d’informations sur les plus grands arbres, soit 5% de l’ensemble, pour connaître le reste de la structure de la forêt", explique le chercheur Jean-François Bastin, qui a mené l’étude pour le compte de l’Université libre de Bruxelles.
 
Concrètement, précise le CIRAD, il suffit de mesurer les arbres dont le diamètre est supérieur à 50 centimètres à 1,3 mètre de hauteur, soit 7% des individus seulement, pour expliquer plus de 90 % de la variation des stocks de carbone forestier.
 
Une avancée qui, d’après les chercheurs, permettra d’établir de nouvelles méthodes, bien plus simples, d’estimation du bilan carbone des forêts d’Afrique centrale.
 
"Aujourd’hui, pour réaliser l’inventaire carbone de la forêt du Congo, cela demande de collecter la biomasse au sol : bois mort et litière. Nous creusons le sol dans chaque parcelle pour extraire des échantillons, nous recensons les arbres de diamètre supérieur à 10 cm. C’est un travail difficile, long et coûteux qui devrait nous prendre deux ans pour réaliser la totalité de l’inventaire carbone forestier en RDC (…) En considérant seulement la biomasse aérienne, on peut alléger la collecte des données et donc aller beaucoup plus vite", confirme André Kondjo Shoko, directeur de l’aménagement des forêts en République démocratique du Congo.

Changement climatique

 
A en croire le CIRAD, "les chercheurs ont par ailleurs identifié certaines espèces hyperdominantes qui contribuent de façon disproportionnée aux stocks de carbone totaux, puisque 1,5 % des espèces recensées contiennent plus de 50 % des stocks de carbone des forêts étudiées".
 
Ces espèces sont par exemple le Gilbertiodendron dewevrei (Limbali), le Strombosia pustulata, le Polyalthia suaveolens ou encore le Klainedoxa gabonensis.
 
Le Klainedoxa gabonensis, en particulier, une espèce à croissance rapide, présentant de larges dimensions, pourrait jouer un rôle important dans la lutte contre le réchauffement climatique, indique Jean-François Bastin à SciDev.Net.
 
Ces espèces sont hyperdominantes non pas du fait de leur taille, mais parce qu’elles sont abondantes et présentes un peu partout dans les forêts d’Afrique centrale.
 
"Les espèces que nous appelons ici hyperdominantes sont celles qui contribuent le plus à la biomasse forestière en Afrique centrale. Elles peuvent être de grande taille, mais nous nous sommes rendu compte de ce que beaucoup d’arbres de dimension moyenne, c’est à dire dépassant rarement 70 cm de diamètre à 1, 3 mètre de hauteur, cumulaient une grande quantité de biomasse. C’est potentiellement une grande différence entre les forêts d’Afrique centrale et les forêts d’Amazonie", indique le chercheur.
 
Les forêts tropicales constituent un enjeu majeur pour les pays d’Afrique centrale, qui vont devoir ajuster la gestion de leurs forêts aux contraintes du changement climatique.