18/03/11

Les femmes scientifiques de Jordanie laissées indifférentes par un fonds de recherche

Les femmes représentent un cinquième du personnel enseignant employé dans les Facultés de sciences en Jordanie Crédit image: Flickr/Roobee

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[AMMAN] Les autorités ont confirmé que le premier fonds jordanien ayant été établi pour stimuler la recherche chez les femmes scientifiques, nʹa reçu aucune candidature.

Le Scientific Research Support Fund, créé en 2008 pour développer tant la recherche scientifique dans le pays que la capacité de recherche de ses étudiants diplômés, a mis en place, au début de lʹannée, un petit fonds secondaire pour les femmes, offrant quatre bourses dʹun peu plus de 14 000 dollars américains (10 600 euros) chacune, pour les chercheuses.

Lʹappel à candidatures pour ce fonds a ouvert le 6 février, mais il nʹy avait toujours aucune candidature au 15 mars, date butoir ayant déjà été prolongée.

Nasri Al-Rabadi, Directeur du fonds a déclaré à SciDev.Net : "Ce programme de financement visait à encourager les chercheuses jordaniennes… nous avons été frustrés du manque de réactions".

N. Al-Rabadi sʹest engagé à revoir le processus, en signalant toutefois quʹil a fait la publicité de ces bourses sur le site officiel du fonds, dans les médias ainsi que dans les divers universités et instituts jordaniens de recherche.

Le fonds plus large est financé grâce à un pour cent de taxes prélevées sur certaines entreprises jordaniennes. Il a dépensé environ 18,4 millions de dollars américains (14,0 millions dʹeuros) au cours des deux dernières années pour soutenir des projets de recherche dans le domaine de lʹénergie, de la santé, des soins et de lʹeau.

Najwa Khuri-Bulos, doyenne assignée à la recherche à lʹUniversité de Jordanie, a rejeté lʹidée de bourses de recherches ouvertes uniquement aux femmes, en particulier celles limitées à un seuil peu élevé, alors que dʹautres bourses, provenant du fonds plus important, nʹont pas de plafond maximum.

"La recherche scientifique ne fait aucune différence entre les hommes et les femmes", a-t-elle déclaré à SciDev.Net. "La véritable distinction réside dans la qualité du travail des chercheurs".

Elle a ajouté que les démarches administratives étaient également susceptibles de décourager les chercheurs qui souhaiteraient postuler, étant donné quʹil faut attendre 18 mois pour que le financement soit approuvé.

Sawsan Oran, doyenne de la Faculté de sciences à lʹUniversité de Jordanie, a indiqué quʹelle nʹétait pas étonnée de la réticence des chercheuses à postuler pour les bourses.

Selon elle, tous les chercheurs, hommes et femmes, sont "lassés" de postuler au fonds plus large à cause de son taux élevé de rejet, y compris pour des propositions " conformes aux priorités nationales". Plus de 1 000 propositions ont été soumises au fonds depuis sa création, mais seulement une centaine a été acceptée.

"Dʹaprès mon expérience, il est plus facile de trouver un appui externe que de postuler pour une bourse nationale", a déclaré S. Oran.

Lara Tutunji, chercheuse à lʹUniversité de Jordanie, a indiqué quʹelle nʹavait pas postulé pour le fonds dédié aux femmes car le fonds plus large avait précédemment rejeté ses candidatures, qui avaient par la suite été financées par un organisme européen.

Al Rabadi a cependant déclaré : "Les membres du comité sont soumis aux standards et aux critères stipulés par le fonds". Chaque proposition est envoyée à trois rapporteurs différents avant quʹelle ne soit rejetée ou acceptée.

Il a ajouté que 12 à 18 mois, était le délai raisonnable pour prendre une décision, une fois que tous les aspects universitaires et financiers ont été pris en considération.

"Il y a des procédures dʹévaluation claires, pratiques et précises qui prennent tout ce temps ; ce nʹest pas une question administrative", a-t-il déclaré.

Selon la Commission nationale jordanienne pour les femmes, les femmes représentent 46 pour cent des étudiants en sciences, 30 pour cent des doctorants mais seulement 21 du personnel enseignant employé dans les Facultés de sciences.