02/09/13

Afrique de l’Ouest: la science trop dépendante de la coopération étrangère

West African Collaboration_Flickr_CGIAR Climate_J. Hansen (CCAFS)
Crédit image: Flickr/CGIAR Climate/J. Hansen (CCAFS)

Lecture rapide

  • Le financement international signifie que la recherche est moins susceptible d'avoir un centre d’intérêt local
  • Les gouvernements locaux devraient financer la recherche et lui assigner des objectifs, dit un expert
  • La collaboration en matière de recherche entre les pays d'Afrique de l’Ouest reste faible

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[COTONOU, BÉNIN] D'après deux articles publiés dans Scientometrics, les pays ouest-africains dépendent énormément des collaborations avec les pays occidentaux dans le domaine de la science, ce qui peut fausser leurs propres priorités nationales en matière de recherche.
 
"Les pays ouest-africains ont coopéré moins les uns avec les autres et moins avec les pays africains et les pays en développement qu'ils ne l’ont fait avec les pays développés", d’après une étude qui sera publiée dans le numéro de septembre de la revue qui a analysé les résultats de recherche de 15 pays ouest-africains entre 2001 et 2010.
 
Rien que trois pays, à savoir, la France, les Etats-Unis et le Royaume-Uni, ont contribué à plus de 63 pour cent des articles publiés avec un collaborateur non ouest-africain.
 
La région a maintenant besoin de ses institutions pour encourager et financer la recherche qui implique plusieurs organismes de différents pays d'Afrique de l'Ouest, en vue d’accroître la coopération régionale en matière scientifique, indique l’article.
 
Et les autorités nationales doivent mettre en application leur engagement de consacrer au moins un pour cent de leur PIB à la science et la technologie, poursuit l’article.
 
Une autre étude, publiée en juin, avait constaté que jusqu'à 80 pour cent de la recherche scientifique au Bénin dépend de la collaboration étrangère.

“Les résultats de cette recherche signifient que les questions de développement local ne sont pas prises en considération par les chercheurs béninois autant que dans d'autres pays.”

Eustache Mêgnigbêto, informaticien du Bureau d'études et de recherche en science de l'information, Bénin

Cette situation rend le Bénin trop dépendant de la collaboration internationale pour ses activités de recherche, selon l'auteur des deux études, Eustache Mêgnigbêto, informaticien du Bureau d'études et de recherche en science de l'information, au Bénin.
 
Cela signifie également que les chercheurs de ce pays alignent leurs activités sur les exigences des bailleurs de fonds internationaux plutôt que de se concentrer sur des travaux qui profiteront au Bénin, a affirmé Mêgnigbêto.
 
"Les résultats de cette recherche signifient que les questions de développement local ne sont pas prises en considération par les chercheurs béninois autant que dans d'autres pays", a déclaré Mêgnigbêto. "Leurs activités de recherche ne répondent pas nécessairement à des besoins de développement prédéfinis."
 
Il a soutenu que le gouvernement béninois devrait financer en grande partie le système national de recherche et lui assigner des objectifs.

"Les universités du Bénin signent des accords de coopération en matière de recherche avec des universités étrangères, mais ces accords devraient bénéficier aux universités locales et au pays. Je ne pense pas que ce soit actuellement le cas", a laissé entendre Mêgnigbêto.
 
L'étude en question a également révélé qu'il y a une faible collaboration entre le Bénin, le Ghana et le Sénégal, et que quand c’est le cas, ce n'est que grâce à l'intervention d'un pays tiers, souvent européen.
 
Cette étude a estimé que 58 pour cent et 63 pour cent de la recherche respectivement au Ghana et au Sénégal sont également tributaires de la collaboration étrangère.
 
L’étude a utilisé des données tirées du Web of Science Citation Index et a examiné des indicateurs tels que les taux de production et de citations de recherche.
 
Au nombre des défis auxquels est confronté le développement de la recherche dans ces pays figurent l’absence de motivation chez les chercheurs, l’absence de cadres institutionnels oprationnels, l’absence de rapports entre les programmes de recherche et les priorités du gouvernement en matière de développement, l’absence de financement, l’absence d'équipements et l’insuffisance des ressources humaines, a affirmé Mêgnigbêto.
 
Le Bénin doit mettre sur pied une politique de recherche nationale, identifier les secteurs prioritaires et réaliser les investissements nécessaires, selon le chercheur.

Armand Paraiso, entomologiste de l'Université de Parakou au Bénin, a affirmé que l'étude effleurait des questions intéressantes, notamment l’absence de financement national pour la recherche, ce qui signifie qu’ "un pays européen ou d’Amérique interviendra dans le projet", changeant inévitablement son centre d’intérêt.

"Nous pouvons constater la multiplication des projets de recherche, a-t-il déclaré. ‘Ce serait formidable s’ils étaient en rapport avec les réalités de développement de nos pays."
 

Références

Scientometrics doi: 10.1007/s11192-012-0948-6 (2013)

Scientometrics doi: 10.1007/s11192-013-0963-2 (2013)